Amérique Latine : Almagro et son action perverse
Certainement, les phénomènes qui ont l'habitude de survenir et de marquer de façon indélébile les réalités des pays latino-américains – comme celles des autres endroits de la planète – sont des processus de nature très complexe. Et quand on a voulu développer une vision totalisante de ces processus historiques, culturels, politiques, économiques et sociaux de notre région à partir d'une perspective élaborée en fonction des intérêts de l'impérialisme états-unien et basée exclusivement sur la méthode néo-positiviste, le résultat a toujours été désastreux. Dans ce contexte, on a l'habitude de donner comme explication ou comme justification le fait que les erreurs commises dans les interprétations de ces réalités sont essentiellement dues à des limitations d'ordre politico-idéologique et intellectuel.
Mais dans le cas particulier de Mr. Luis Almagro, l'actuel Secrétaire Général de l'OEA, de son obsession et de sa campagne pour déstabiliser et renverser le Gouvernement bolivarien au Venezuela, il ne s'agit pas d'une limitation intellectuelle mais essentiellement d’une manifestation évidente de son rôle d'agent au service de l'impérialisme yankee et des secteurs bourgeois et oligarchiques du Venezuela. Et ce comportement révèle non seulement sa position politico-idéologique réactionnaire mais aussi son cynisme, son hypocrisie et ses mensonges.
En se basant consciemment sur des mensonges et des exagérations bien argumentés par les ennemis des luttes populaires qui aspirent à mettre fin à la relation de domination-assujetissement-exploitation imposée depuis déjà plusieurs siècles en Amérique, Almagro prétend « crucifier » le Gouvernement du Venezuela dirigé par le président chaviste Nicolás Maduro. Ainsi, dans plusieurs interviews, Almagro, avec arrogance et superbe, affirme que pratiquement, au Venezuela, il n'y a pas de démocratie. Selon lui, il y a des violations des droits de l'homme, il n'y a pas d'élections honnêtes, le pouvoir exécutif domine le pouvoir judiciaire, il y a des dirigeants politiques d'opposition injustement emprisonnés et il y a une situation économique effrayante provoquée exclusivement par la soi-disant inaptitude des gouvernants chavistes actuels. Par conséquent, dans la tête d'Almagro, le devoir et l'obligation de l'organisme qu'il dirige est d'accourir immédiatement au secours du peuple vénézuélien terrorisé par le « dictateur » Maduro. En conséquence, Almagro tente par tous les moyens de faire appliquer la si célèbre et si mensongère Charte Démocratique de l'OEA contre le Gouvernement de Maduro pour atteindre ainsi son but pervers qui est le renversement du processus chaviste.
Alors, bien, si Almagro n'avait pas été Ministre des Relations Extérieures de son pays, l'Uruguay, pendant plusieurs années avant d'être choisi comme Secrétaire Général de l'OEA, on pourrait lui accorder le bénéfice du doute, de l'inexpérience ou de l'ignorance des affaires internationales. Cependant, il n'en est rien. Pour moi, il y a une totale coïncidence entre le comportement du chancelier Almagro et celui d'Almagro Secrétaire Général de l'OEA.
Mon affirmation est basée sur ce qui suit. En tant que chancelier, Almagro a défendu cyniquement et hypocritement la présence de la Mission des Nations Unies pour le Stabilisation d'Haïti (MINUSTAH) malgré les innombrables preuves de violations des droits de l'homme perpétrées par des membres de cette force d'occupation pendant 12 ans qui vont des viols jusqu'à des assassinats dans les quartiers populaires et à l'introduction du choléra qui a déjà coûté a vie à plus de 10.000 Haïtiens et touche plus de 800.000 personnes. Il a avalisé ou ignoré toutes les répressions anti-démocratiques de manifestations populaires de masse de l'ex « président » haïtien Michel Martelly. Il s'est tu quand Martelly, un « président » imposé par le couple Clinton pendant la farce scandaleuse des élections de 2010-2011 en Haïti qui n'a organisé pratiquement aucune élection comme l'exige la Constitution Haïtienne pendant presque toute la durée de son mandat (5 ans), a rendu caduc le Parlement Haïtien et a dirigé le pays, pendant sa dernière année de mandat, à l'aide de décrets et de répressions violentes.
D'autre part, Almagro a considéré comme légitimes les élections caractérisées par des fraudes massives, des assassinats, l'incendie de plusieurs urnes et de certains bureau de vote qui se sont déroulées en Haïti et août et en octobre 2015 sous la présidence de Martelly. La situation a été tellement grave que 2 Commissions Indépednantes de Contrôle Electoral composées de personnalités haïtiennes ont déclaré que ce qui s'était passé était inacceptable. On en est même arrivé à annuler les élections présidentielles d’octobre 2015. Cependant, malgré toutes les preuves présentées prouvant le comportement anti-démocratique du Gouvernement de Martelly pendant ces élections, jamais Almagro n'a élevé la voix pour critiquer ce « président ». Au contraire, en tant que bon ami de Martelly, il a déclaré qu'Haïti avait fait des pas importants en organisant ces élections qui étaient une véritable farce et ont été ignorées par l'immense majorité de l'électorat haïtien.
Il a eu le même comportement quelques jours avant la désignation de Jovenel Moïse comme nouveau « président » d'Haïti par le Conseil Electoral Provisoire (CEP). Il faut rappeler que 21% des électeurs ont participé – selon le CEP - aux élections présidentielles de novembre dernier dont J. Moïse est sorti « vainqueur ». Le nouveau « président » a eu officiellement moins de 600.000 voix sur un corpus de 6.200.000 électeurs. Ce qui pose au « vainqueur » un sérieux problème de légitimité. De plus, ce processus a été qualifié de « coup d'Etat électoral » par les 3 principaux candidats à la présidence et ils ne reconnaissent pas jusqu'à présent la victoire de J. Moïse. Et comme si ça ne suffisait pas, le nouveau « président » qui a pris ses fonctions le 7 février dernier, est encore inculpé de blanchiment d'argent.
Mais pour Almagro et son OEA, il n’y a pas de problème. En Haïti, il n'y a eu que quelques irrégularités et rien de lus. Et cet organisme régional a assuré qu'avec l'accession au pouvoir de J. Moïse, la démocratie s'était renforcée dans le pays. Il a donc envoyé ses félicitations au « président » et a promis d'aider son Gouvernement. De plus, le Secrétaire Général de l'OEA ne s'est pas préoccupé de faire une critique pas même minime du processus électoral haïtien ni même un appel à la Justice Haïtienne pour qu'elle agisse avec indépendance dans le dossier dans lequel est inculpé J. Moïse. Cependant, c'est ce même Luis Almagro qui ose critiquer constamment le président Maduro pour de soi-disant violations des droits de l'homme et des principes démocratiques et met en place des mesures de contraintes et d'agression de toute nature contre le président du Venezuela légitimement élu. Pour atteindre son but, il recourt à des lectures partiales et tendancieuses de la réalité et même à des subterfuges que les agents de l'impérialisme ont l'habitude d'utiliser. Par exemple, dans ses déclarations à de puissants médias internationaux, Almagro ne parle pas des “guarimbas” mises en place par des opposants vénézuéliens lors desquelles des tueurs à gages fascistes ont provoqué la mort de plus de 40 personnes en 2014. Les “guarimbas” sont définies par les autorités vénézuéliennes de la façon suivante : « Ce sont des actes de vandalisme qui impliquent le barrage arbitraire de rues, l'incendie d'ordures, des agressions avec des objets contondants, des fils de fer barbelés disposés à hauteur d'homme et des tirs d'armes à feu, qui supposent la réclusion des citoyens chez eux par crainte de perdre la vie. En 2014 au Venezuela, ces violences ont coûté la vie à 43 citoyens et membres des forces publiques dans tout le pays qui, dans la plupart des cas, ont reçu des tirs d'armes à feu au visage parce qu'ils essayaient d'enlever les barricades. » Il ne fait pas non plus référence à toutes les actions de boycott de l'opposition et de l'impérialisme yankee envers l'économie du pays, aux attaques contre les institutions. Et il s'est même transformé ces derniers mois en porte-parole de l'opposition, surtout quand il réclame sans cesse et sans détour la libération du politicien de droite Leopoldo López, condamné par la Justice vénézuélienne en tant que principal responsable des morts provoquées par les “guarimbas”, ce qui constitue un attentat flagrant contre la souveraineté et l'auto-détermination du peuple vénézuélien.
Encore une fois, alors, depuis sa naissance dans le cadre de la Conférence Internationale Américaine de Bogotá en 1948, l'OEA n'a pas manqué de remplir son rôle principal : être un instrument au service des intérêts de l'impérialisme yankee et des secteurs bourgeois et oligarchiques de l'Amérique Latine. Encore une fois, l'OEA avec Almagro à sa tête donne raison à l'ex ministre des Relations Extérieures de Cuba, le Dr. Raúl Roa, qui accusait cet organisme, en 1962, d'être un « ministère yankee des colonies. »
Mais si Almagro – incapable à cause de sa cécité politique étant donné sa position tellement réactionnaire, de lire correctement la honteuse histoire de l'OEA et les nouvelles demandes du peuple dans la région – persiste dans son action anti-chaviste, la seule chose qu'il obtiendra, c'est de plonger encore plus l'OEA dans le puits du discrédit et il recevra l'inévitable condamnation des véritables patriotes latino-américains.
Henry Boisrolin
Coordinateur du Comité Démocratique Haïtien en Argentine
2 mars 2017
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
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