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Venezuela : L'embargo et Petrocaribe

13 Février 2018, 18:51pm

Publié par Bolivar Infos

 

La tournée du secrétaire d'Etat des Etats-Unis Rex Tillerson en Amérique Latine montre l'importance de cette région dans la politique étasunienne considéré par leurs stratèges géopolitiques comme un lac intérieur leur appartenant où leur hégémonie a été remise en cause par des initiatives du Venezuela comme Petrocaribe.

 

Annonces et réflexions de Tillerson sur un éventuel embargo

 

Le dernier jour de sa tournée en Amérique Latine, le secrétaire d'Etat des Etats-Unis Rex Tillerson a rencontré Andrew Holness, le premier ministre de la Jamaïque avec qui il a discuté des implications d'un éventuel embargo du Gouvernement Trump sur le pétrole vénézuélien destiné à restreindre l'accès du brut vénézuélien aux raffineries étasuniennes.

 

Tillerson a souligné qu'un éventuel embargo « porterait préjudice au peuple vénézuélien déjà accablé, aux entreprises étasuniennes et aux nations des Caraïbes qui en dépendent. » Une déclaration qui, en plus de clarifier les effets sur la République Bolivarienne, met en évidence l'intention de couper l'approvisionnement de Petrocaribe par le Venezuela.

 

C'est pourquoi il a annoncé que lors de la dernière réunion trilatérale entre le Mexique, le Canada et les Etats-Unis, il a été décidé de former « un très petit groupe de travail concentré sur l'amortissement des effets de cette décision si elle est prise par le président Trump. » Une preuve évidente que le voyage de Tillerson était en grande partie destiné à organiser une coalition multilatérale qui élargisse le soutien à un embargo contre le Venezuela.

 

Sur la même ligne, Tillerson a affirmé qu'il « a eu une longue discussion avec le premier ministre de la Jamaïque pour promouvoir une plus grande indépendance énergétique des Caraïbes en développant les ressources qu'elles ont et en partageant l'abondance de ce dont jouit l'Amérique du Nord. » Une référence à l'Initiative de Sécurité Energétique mise en place par les Etats-Unis pour éliminer l'influence de Petrocaribe.

 

Les objectifs de l’embargo sur le pétrole et ExxonMobil

 

La visite de Tillerson en Jamaïque révèle une cohérence dans la politique étasunienne dans les Caraïbes, surtout si on tient compte qu'en 2015, Barack Obama fut le premier président étasunien à se rendre sur l'île après l'arrivée de Ronald Reagan en 1982. Une chose qui met également en évidence l'importance pour les Etats-Unis de récupérer la Jamaïque pour arriver à supplanter Petrocaribe.

 

Ce point de vue est basé sur Initiative de Sécurité Energétique destinée à concevoir des plans de financement pour les sources d'énergies renouvelables comme l'énergie solaire et éolienne soutenus par l'importation de « technologies propres » vers les Caraïbes. Une proposition qui, selon l'ex-vice-président étasunien Joe Biden, servirait à « enlever à la région l’obstacle du coût de l'énergie et de la dépendance envers des fournisseurs uniques, » en référence directe au Venezuela.

 

Les mots de Tillerson sur le «  partage de l'abondance » des ressources que possèdent les Etats-Unis prennent alors une importance particulière étant donné qu'il évoque la possibilité que le gaz non conventionnel, produit à partir du fracking sur le sol étasunien remplace en partie le brut vénézuélien en tant que source d'énergie de la région. Un détail qui a son importance si on lui ajoute qu'ExxonMobil, la compagnie que dirigeait Tillerson avant de devenir Secrétaire d'Etat, est le second producteur de gaz naturel au monde par fracking, selon un article de la revue Forbes paru en 2016.

 

Le Venezuela parie sur des relations de complémentarité durables dans le temps.

 

Comme nous le voyons, les conversations de Tillerson avec le premier ministre de la Jamaïque ont pour but évident d'utiliser ce pays comme avant-centre d'une partie plus large destinée à utiliser l'embargo sur le pétrole comme méthode d'extorsion envers les pays des Caraïbes pour qu'elles consentent à une éventuelle coupe de la fourniture en pétrole vénézuélien. Malgré cela, Petrocaribe continue à être beaucoup plus attractif pour ces pays à cause des prix et des conditions de paiement qui donnent la possibilité de faire des échanges commerciaux de produits au lieu de donner de l'argent. Cette relation complémentaire est ce que Tillerson cherche à enlever de l'équation pour qu'ExxonMobil et d'autres entreprises comme Chevron s'assurent un nouveau marché.

 

Le jeu géopolitique

 

L'intention de boycotter la fourniture de pétrole de Petrocaribe et d'affecter le circuit de raffinage de PDVSA dans les Caraïbes n'est pas nouvelle. Justement, les sanctions prises par Donald Trump contre l'Etat et PDVSA sont destinées à rendre impossible les paiements des pays des Caraïbes et à affecter les entreprises mixtes formées par l'entreprise pétrolière avec ses homologues dans la région. Ce qui a eu pour résultat que la Jamaïque cherche à prendre 49% des actions de PETROJAM, aujourd'hui aux mains de l'entreprise vénézuélienne. Un embargo sur le pétrole est directement destiné à couper le Venezuela de la mer des Caraïbes, considérée par les Etats-Unis comme une zone stratégique pour sa sécurité nationale.

 

Au-delà de l'intention de monopoliser le marché de l'énergie des Caraïbes, un objectif géopolitique immédiat est le désir de porter atteinte à la complémentarité du Venezuela avec la région. Si on tient compte que Tillerson a affirmé avoir eu des conversations avec d'autres pays de la région « pour rétablir la démocratie au Venezuela grâce au Groupe de de Lima et à l'OEA, on comprend que, lors d'un vote éventuel sur l'application de la Charte Démocratique, les pays des Caraïbes seraient essentiels pour atteindre les 23 voix nécessaires pour sanctionner la République Bolivarienne.

 

Cette réalité est indubitable étant donné que les Etats-Unis ont échoué l'année dernière à cause, justement, du soutien que le Venezuela a obtenu à l'OEA de la part des pays alliés de la région. C'est pourquoi il n'est pas insensé de penser que le Gouvernement Trump prépare un nouveau recours à l'OEA après avoir appliqué un paquet de mesures pour porter atteinte aux relations de la nation bolivarienne avec son environnement le plus proche, sachant que Washington a besoin d'une institution qui agisse à travers la Charte Démocratique pour enlever à ses mesures leur aura d'unilatéralisme et faire pression sur le reste des pays de la région pour trouver plus de soutien.

 

Dans ce contexte, le chancelier vénézuélien Jorge Arreaza fait une tournée par Trinidad et Tobago, le Suriname et Haïti pour renforcer les relations avec les pays de cette région. Le cas de Trinidad et Tobago est une démonstration de la stratégie bolivarienne pour arrêter

les Etats-Unis : récemment, les 2 pays ont signé 3 accords de coopération dans le domaine du gaz. Un exemple qui montre comment, même assiégée, la République Bolivarienne parie sur des relations de complémentarité durables dans le temps et balaient l'incertitude qu'ils cherchent à semer par les menaces.

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

http://misionverdad.com/COLUMNISTAS/eeuu-quiere-aplicar-un-embargo-petrolero-para-aislar-a-venezuela-del-caribe

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/ 2018/02/venezuela-l-embargo-et-petrocaribe.html