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Amérique Latine : L'investiture des vendus

16 Février 2020, 18:03pm

Publié par Bolivar Infos

 

Parmi toutes les raisons pour ne pas inviter Cuba, le Nicaragua et le Venezuela à la cérémonie d'investiture du président Luis Lacalle Pou, l'absence de « totale démocratie » est, de loin, la plus invraisemblable. Ce qu'on appelle la « totale démocratie » est une rareté dans le monde et, selon ceux qui établissent ces indices, il n'y en a que 2 sur notre continent : l'Uruguay et le Costa Rica.

 

Mais il ne faut pas se noyer dans une mare d'arguments ridicules parce que nous savons tous que cela n'a rien à voir avec un idéal de démocratie. Lacalle Pou n'a aucun problème pour inviter Jair Bolsonaro, devenu président grâce à l'emprisonnement truqué de Lula et, à ce niveau, il est évident qu'il n'a rien de démocratique et qu'il est bien plus proche du fascisme ou du nazisme, du suprémacisme racial, de la misogynie et de l'homophobie.

 

Il n'a aucun problème non plus pour inviter le président chilien Sebastián Piñera qui réprime le peuple du Chili depuis 3 mois, faisant des dizaines de morts, des milliers de prisonniers politiques et des centaines de personnes qui ont perdu la vue à cause de l'action des forces de la répression.

 

Il n'a pas décidé de ne pas inviter à son investiture l'Etat Plurinational de Bolivie alors qu'il est indiscutable qu'il y a eu un coup d'Etat même s'il y avait eu une fraude électorale qui n'a pas eu lieu, que personne n'a prouvée, que l'OEA de Luis Almagro a fait passer pour un fait scientifique pour devenir la risée de tous les experts électoraux du monde qui ont étudié la chose.

 

Une dictature, en outre, qui, dès ses premiers jours, a ordonné 2 massacres, persécuté ses opposants et même violé les sauf-conduits qu'elle avait accordés elle-même à des hauts fonctionnaires du précédent Gouvernement. Il n'a aucun problème pour inviter le Honduras dont le Gouvernement – celui-là, oui, arrivé par la fraude – tue des gens dans la rue, ni Haïti qui est quelque chose d'indescriptible même si c'est passé sous silence par les grands médias ou le Salvador dont le président fait entrer l'Armée au Parlement pour forcer les députés à approuver une résolution.

 

Il n'a aucun problème pour inviter l'Equateur qui, pour soutenir un paquet de mesures exigées par le FMI a instauré un état de siège qui s'est achevé par une dizaine de morts. Il n'a aucun problème pour inviter les monarchies arabes qui lapident les femmes et pendent les opposants, les sultanats, le Gouvernement à parti unique comme le Gouvernement chinois et même des rois, pour ensuite venir parler de l'importance de la « totale démocratie. » 

 

Sur les 3 pays concernés par la décision de Lacalle Pou, celui qui est le plus embêtant est Cuba. Non que cette décision ne soit pas également hostile et offensante pour le Nicaragua ou le Venezuela, 2 pays sous blocus, soumis à une guerre économique, médiatique et même militaire permanente dirigée par les Etats-Unis mais la décision envers Cuba frôle l'indignité et implique l'ingratitude.

 

Car on ne peut oublier que Cuba, qui est un pays économiquement très pauvre, plus petit que l'Uruguay, sous blocus depuis 60 ans, au point qu'à présent, les Etats-Unis empêchent l'entrée du pétrole et du gaz liquide destinés à remplir les bombonnes que les Cubains utilisent pour cuisiner, a toujours été solidaire de l'Uruguay, même à l’époque où les relations diplomatiques étaient rompues.

 

Lacalle Pou ne peut ignorer les dons que Cuba a faits de vaccins anti-méningocoque mis au point par l'Institut Finlay de La Havane qui ont permis d'arrêter l'épidémie de méningite B dans la ville de Santa Lucía à Canelones, sous le Gouvernement de Jorge Batlle. Il faut souligner que Jorge Batlle avait rompu les relations diplomatiques avec Cuba unilatéralement et même alors, Cuba, à cause de son engagement envers la société uruguayenne, a envoyé 1 200 000 doses pour vacciner les 600 000 enfants qui en avaient besoin.

 

L'avion est arrivé alors que les relations diplomatiques étaient rompues sur décision de Fidel en personne et l'Uruguay a dû les utiliser et ainsi a arrêté une épidémie d'une très grave maladie très souvent mortelle pour les enfants comme le purpura fulminant. Lacalle Pou ne peut ignorer que plus de 500 Uruguayens humbles et majoritairement de l'intérieur ont passé leur diplôme de médecins à l'Ecole Latino-américaine de Médecine, que des dizaines d'autres ont passé leur diplôme en Education Physique et que même certains ont fait des études d'ingénierie, tous avec des bourses accordées par Cuba, sans débourser un seul peso.

 

Il ne peut ignorer qu'en Uruguay, le programme cubain “Yo sí puedo” destiné à alphabétiser les adultes, a été appliqué, que l'Opération Miracle y a été mise en place et que, grâce à ce programme, 90 000 Uruguayens ont retrouvé la vue gratuitement. Les premières centaines ou les premiers milliers de patients ont été opérés directement à Cuba parce que l'Hôpital des Yeux José Martí n'avait pas encore été créé.

 

Lacalle Pou ne peut ignorer que plus de 1 000 Uruguayens ont reçu des prothèses mises au point par des techniciens cubains sans que cela leur coûte un seul peso grâce aux accords existant entre les 2 pays qui ont permis le développement de ces programmes qui étaient impossibles auparavant à cause de leur coût. Il ne peut ignorer tout cela.

 

Quand il décide de ne pas inviter ces 3 pays, il commet une grossière erreur diplomatique qui, comme l'a dit l'ex-chancelier Rodolfo Nin, va avoir des conséquences. Mais en plus, dans le cas de Cuba, c'est une vulgarité, un acte moralement répugnant puisqu'il tourne le dos à un petit pays qui a généreusement collaboré avec l'Uruguay beaucoup plus que d'autres pays immenses, infiniment plus riches et puissants qui, eux, sont invités et ont des présidents que Lacalle Pou aimerait certainement côtoyer mais qui n'ont jamais bougé le petit doigt face à une calamité qui se soit déroulée là.

 

Ce geste de Lacalle Pou, de plus ostentatoire parce qu'inutile, étant donné qu'aucun des 3 présidents auxquels il fait allusion ne s'y serait rendu en personne, n'est qu'un acte de traîtrise honteux, propre à un vendu qui a pour vocation évidente de s'incliner devant les Etats-Unis et de se soumettre aux orientations du Département d'Etat. En une seule décision personnelle, il montre déjà sa minuscule stature historique. Jusqu'à présent, dans le monde, aucun personnage sans consistance qui se vante d'être fort devant les faibles mais est faible devant les forts n'a réussi à obtenir la tendresse du peuple ni le bronze ni la gloire. La couardise est une attitude qui fait la différence et est insoutenable.

 

(Extrait de Caras y Caretas)

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/especiales/2020/02/15/la-asuncion-cipaya/#.Xklfqi17R_9

URL de cet article : 

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