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Venezuela : Le danger d'une autre guerre pour le pétrole

20 Janvier 2021, 18:29pm

Publié par Bolivar Infos

Par Geraldina Colotti

 

Aujourd'hui, nous allons parler d'un différend frontalier, un différend historique qui pourrait provoquer une nouvelle guerre d'agression dévastatrice pour le pétrole. Nous parlons des eaux de l'Esequibo que se disputent le Guyana et le Venezuela. Un territoire qui couvre les 2/3 de la superficie du petit Guyana, le plus petit pays d'Amérique du Sud de langue anglaise, le troisième plus petit Etat souverain d'Amérique du Sud après l'Uruguay et le Surinam.

 

Le Guyana a une population de 780 000 habitants et couvre 215 000 kilomètres carrés. C'est une ancienne colonie hollandaise et ensuite britannique, le seul pays d'Amérique du Sud qui parle anglais. Comme toujours, pour comprendre, il faut recourir à l'histoire qui, pour les peuples du sud, est l'histoire de l'oppression coloniale et de l'oppression de classes, c'est pourquoi on ne peut pas vraiment parler d'Etat souverain : il n'est pas étonnant que le drapeau de la seconde indépendance continue d'être aussi présent en Amérique Latine (et ailleurs).

 

Le Guyana a obtenu son indépendance en 1966 et proclamé la république en 1970 mais il est resté dans le Commonwealth, une organisation inter-gouvernementale de 54 Etats indépendants (sauf le Mozambique et le Rwanda) d'anciennes colonies de l'empire britannique.

 

Un pays dont les décisions sont fortement influencées par les politiques britanniques et nord-américaines de façon plus ou moins évidente selon si le Congrès National du Peuple (de droite, toujours soutenu par les Etats-Unis) ou le Parti Progressiste (de gauche et auquel appartient l'actuel président Irfaan Ali, le premier président musulman pratiquant officiellement) est au pouvoir.

 

Pour se faire une idée de la présence impérialiste dans cette zone, il suffit de savoir qu'il existe une organisation du nom de GuyanaUsa qui prône l'intégration du Guyana dans les Etats-Unis. Pourquoi ? Parce que plus de 100 000 Guyanais ont la double nationalité et qu'environ 350 000 Guyanais, 1/3 de la population totale, résident aux Etats-Unis. Et parce que l'influence des Etats-Unis, auxquels le Royaume Uni a accordé l'autorisation d'utiliser ses ports en Amérique du Sud y compris ceux situés au Guyana pendant la seconde guerre mondiale, n'a jamais cessé à cause des relations particulières qui existent toujours entre les Etats-Unis et la Grande Bretagne.

 

Pour comprendre les origines du différend concernant l'Esequibo et son impact actuel, je te demande de suivre, avec un peu de patience, ses principales étapes.

 

La première manipulation coloniale date du 3 de octobre 1899. A ce moment-là, on a signé à Paris ce qu'on appelle la sentence arbitrale, émise par un tribunal créé 2 ans auparavant sur la base du traité d'arbitrage de Washington dans lequel les Etats-Unis qui représentaient le Venezuela, d'un côté, et de l'autre le Royaume Uni en tant que propriétaire de ce qui était alors la colonie du Guyana britannique (à présent République Coopérative du Guyana) avaient décidé d'amener devant un tribunal d'arbitrage international le différend sur la frontière ouest de la colonie britannique à l'est du Venezuela. Le Venezuela était déjà indépendant mais n'a pas été convoqué pour trouver une solution amicale à de différend territorial. Il était représenté par une puissance coloniale. 

 

En définitive, la sentence a été favorable au Royaume Uni qui s'est octroyé le territoire que le Venezuela appelait déjà «  Guayana Essequiba » qui couvrait 159 500 kilomètres carrés à l'ouest du fleuve Esequibo (pas du tout un nom anglais...). A ce moment-là, le Venezuela a immédiatement protesté en arguant un vice de forme mais c'est seulement en 1962 qu'il a réussi à protester à l' ONU en fournissant des preuves de ce qu'il avançait.

 

Sa demande a été acceptée et a donné lieu à l'accord de Genève, le 17 février 1966, un accord signé par le Venezuela et les représentants de la Guyane britannique qui allait bientôt obtenir son indépendance. Cet accord est toujours en vigueur bien qu'il soit un accord de transition vers un accord définitif et consensuel que le Venezuela continue de réclamer encore aujourd'hui.

 

L'affaire est toujours entre les mains du secrétaire général des Nations Unies devant qui le Venezuela et le Guyana, après l’indépendance de ce dernier, ont décidé de nommer un médiateur en la personne du Jamaïcain Norman Girvan, disparu en avril 2014. Depuis, l'affaire est restée en suspens ou, mieux, a été l'objet d'ingérences internationales dues aux énormes intérêts qui existent dans cette zone.

 

Le petit Guyana, dont l'économie, basée sur la canne à sucre, la banane, la noix de coco et d'autres fruits tropicaux, dépend du capital étranger et a les corollaires classiques des pays dépendants : pauvreté générale, corruption, absence d'infrastructures, dette publique très importante, très petite industrie basée essentiellement sur le rhum, la bière et le sucre, vol des ressources précieuses qu'il possède comme la bauxite, l'or et les diamants.

 

Mais depuis 2008, Exxon Mobil, une des principales multinationales pétrolières étasuniennes d'importance mondiale qui opère sur le marché européen sous la marque Esso, a commencé à forer arbitrairement dans la zone en litige de l'Esequibo.

 

Immédiatement, les grands médias ont répercuté des projections du Fonds Monétaire International selon lesquelles en 2025, cette produirait un revenu de 5 000 000 000 de $ qui permettrait au petit pays frontalier avec le Venezuela et le Brésil d'avoir une croissance 14 fois supérieure à celle de la Chine. Des chiffres énormes qui feraient de l'Esequibo la zone possédant les plus importantes réserves de pétrole per cápita du monde.

 

Souvenons-nous qu'actuellement, le Venezuela a les plus importantes réserves de pétrole certifiées du monde, en plus de l'or, des diamants, du coltan et d'autres ressources sur lesquelles l'impérialisme étasunien cherche à mettre la main comme il l'a fait sous les Gouvernements de la IVème république au pouvoir avant la victoire de Chávez aux élections de 1998.

 

Comme nous le voyons, la question n'est pas sans importance. Exxon Mobil, comme d'autres multinationales qui n'ont pas accepté le dédommagent proposé par Chávez pour les nationalisations, a déposé des plaintes devant les tribunaux arbitraux internationaux dont la nature n'est pas très différente de celle de la cour qui a émis la sentence arbitrale de Paris en 1899.

 

Des intérêts gigantesques sont au centre de la farce de « l'investiture » du « président par intérim » du Venezuela autoproclamé Juan Guaidó qui a volé la principale raffinerie du Venezuela aux Etats-Unis, CITGO. Un vol autorisé par le blocus économique et financier imposé par les Etats-Unis et l'Europe dont les banques 'en particulier les britanniques, gardent illégalement l'or vénézuélien. Et ces jours-ci, on a appris que le pantin Guaidó allait vendre CITGO pour payer des compensations à une autre grande multinationale, CRISTALLEX.

 

Pendant ce temps, le 11 janvier, l'amiral étasunien Craig Faller, chef du Commandement Sud, est arrivé au Guyana pour une visite de 3 jours dans le cadre des manœuvres conjointes des garde-côtes des Etats-Unis et du Guyana décidées le 8 janvier. Le Venezuela a dénoncé cette nouvelle ingérence dangereuse qui suscite encore une fois des tensions dans la politique des faits accompli mise en œuvre par Trump et qui, selon toute probabilité, sera poursuivie par Biden.

 

Le 31 janvier 2018, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a annoncé qu'il transfèrerait le différend à la cour internationale de justice sans nommer de nouveau médiateur entre les parties.

 

Le 18 décembre 2020, la cour s'est déclarée compétente pour décider de la validité de la sentence arbitrale de 1899, remise en cause par le Venezuela. Dans quelques jours aura lieu une audience de délibération. Le Gouvernement bolivarien a protesté, créé par décret une zone spéciale au large de la zone en litige, mis en alerte l'armée bolivarienne et lancé un large débat dans le pays auquel participent des juristes, des enseignants et évidemment, les structures du pouvoir populaire. 

 

Il faut aussi rappeler que, sur uen vidéo révélée l'année dernière, l'émissaire de Guaidó à Londres promettait au Gouvernement britannique qu'il lui céderait les droits sur l'Esequibo s'il soutenait le président autoproclamé et sa bande de voleurs.

 

Mais, en Grande Bretagne, un avocat italo-anglais, Ugo Giuliani, en 2018, découvre les cartes originales cachées et falsifiées par l'impérialisme, ce qui apporte un fondement légal à la thèse du Venezuela concernant sa souveraineté sur l'Esequibo.

 

Un sujet brûlant, comme nous pouvons le voir, dans le contexte de la crise mondiale et du différend entre l'impérialisme nord-américain et le camp des forces qui agissent dans un monde multi centré et pluripolaire autour de la Chine, camp dont fait partie le Venezuela bolivarien. Un problème qui concerne aussi les relations de solidarité de Cuba et du Venezuela avec les pays des Caraïbes dans le CARICOM, une organisation sur laquelle les Etats-Unis cherchent à influer depuis longtemps. 

 

Les journaux de la droite vénézuélienne et leurs sympathisants en Europe ont fait savoir que Biden aurait invité à son investiture non le représentant légitime du Gouvernement bolivarien mais le faux chancelier de Guaidó, Carlos Vecchio. Cette semaine, Trump se prépare à se retrancher en Floride, le centre de la déstabilisation des riches et des anti-castristes et anti-chavistes.

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2021/01/19/pensamiento-critico-desde-el-esequibo-el-peligro-de-otra-guerra-por-el-petroleo/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2021/01/venezuela-le-danger-d-une-autre-guerre-pour-le-petrole.html