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Colombie : Le Prix et la vérité

12 Décembre 2021, 17:56pm

Publié par Bolivar Infos

Par Omar Rafael García Lazo

 

L’Assossiation Mondiale des Juristes a remis à la « démocratie colombienne » le prix World Peace and Liberty Award 2021. Celui-ci, pour la première fois n’a pas été remis à une personne mais à la ville de Barranquilla par le roi d’Espagne Felipe VI.

 

Lors de al cérémonie de remise du prix, on a expliqué que « la Colombie est un exemple de la réussite de la démocratie non seulement en Amérique Latine mais parmi toutes les nations du monde » et qu’elle a « une société civile qui honore le droit à la liberté d’expression. »

 

Dans toutes ses années d’existence, la Colombie na jamis connu la démocratie, pas même la démocratie libérale bourgeoise. Marqué par diverses guerres et des violences de différentes sortes, le pays n’a jamais non plus connu la paix.

 

Seulement en 2021, selon l’Institut d’Etudes pour le Développement et la Paix (INDEPAZ), une ONG colombienne reconnue dans le monde entier, 160 dirigeants sociaux et 44 anciens combattants de la guérilla des FARC qui avaient signé les accords de paix qui ont été torpillés par le président qui a reçu le prix en question ont été assassinés.

 

Comme si cela ne suffisait pas, entre avril et juin, 80 personnes ont perdu la vie lors de la répression policière des protestations qui ont secoué le pays tandis que l’armée, dans sa lutte contre les groupes armés illégaux, a bombardé des caps où se trouvaient des enfants.

 

Ces actions sont des actions récentes mais sait la terreur que l’oligarchie colombienne a fait régner pendant des décennies grâce à sers structures répressives officielles, paramilitaires ou au trafic de drogues.

 

La violence structurelle est constante dans ce pays. Pendant cette année, selon la même source, 80 massacres ont eu lieu, qui ont fait 313 victimes dont beaucoup de jeunes et de femmes.

 

La Banque Mondiale ne semble pas appliquer le même critère à la démocratie colombienne que la prestigieuse Association des Juristes car elle affirme dans un récent rapport que le pays est le second pays d’Amérique Latine en termes d’inégalités.

 

Le Département Administratif National de Statistiques, un organisme officiel colombien reconnaît dans un rapport d’avril 2021 que la pauvreté touche 21 000 000 de Colombiens, soit 42,5 % de la population et que parmi ceux-ci, plus de 7 000 000 vivent dans l’extrême pauvreté.

 

En termes d’emploi, 48 % des travailleurs colombiens travaillent de manière illégale, ce qui augmente les inégalités dans l’accès aux autres droits comme al sécurité sociale et la santé. En ce moment, 12 % n’ont pas d’emploi.

 

Quand les droits à la vie, à l’alimentation, à l’emploi, à la santé et à la sécurité sociale sont violés, il n’est pas possible de parler de démocratie.

 

Mais si le prix est attribué pour la permanence d’un modèle multi-partiste, une soi-disant séparation des pouvoirs et la fameuse liberté d’expression, la Colombie ne peut pas non plus être qualifiée de démocratique.

 

Le système de partis prend l’eau de toute part. La plupart des partis du pays se caractérisent essentiellement par la corruption, les liens avec le trafic de drogues, l’absence d’éthique et la suprématie des intérêts économiques et personnels sur les idéologies. Les politiciens eux-mêmes, pendant leur carrière électorale, optent pour se démarquer de ces conglomérats traditionnels qui survivent à cause de leurs structures clientélistes.

 

Les entités officielles chargées de veiller à la propreté des processus électoraux sont la cible d’innombrables critiques. Les affaires de fraude sont connues et l’impunité règne. Le président Duque en personne a été critiqué pour des entrées d’argent en provenance du trafic de drogues sans que rien ne bouge.

 

Quant à la justice, le même président qui a reçu le prix, souriant, a mis tous les obstacles possibles à l’action de al Juridiction Spéciale pour la Paix (JEP), une entité indépendante issue du processus de négociations entre la guérilla des FARC et le Gouvernement de Juan Manuel Santos. Non content de cela, le président s’est chargé d’interférer dans la justice ordinaire et de défendre politiquement son mentor Álvaro Uribe, accusé de plusieurs délits.

 

Et quant à la liberté d’expression, voici seulement 2 exemples. L’immense réseau de médias traditionnels (presse écrite, radio et télévision) et digitaux est aux mains de 5 groupes patronaux qui ont le contrôle économique et politique du pays.

 

Et pour comble, une partie de ce qui semble être la presse alternative est financée par ces mêmes groupes, par l’USAID ou par la NED, et travaille franchement au détriment de la voix des exclus.

 

Et pour finir, une curiosité : au Congrès, où a été remis le prix à la « démocratie colombienne » était invité, entre autres personnalités, le secrétaire général de l’OEA, Luis Almagro. Sa seule présence dénote la qualité politique de cet événement et la probité de ce prix.

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2021/12/10/colombia-el-premio-y-la-verdad/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2021/12/colombie-le-prix-et-la-verite.html