Honduras : Qu’est venu faire Kamala Harris à l’investiture de Xiomara Castro ?
Par Alfredo Jalife-RahmeQue la vice-présidente des Etats-Unis, Kamala Harris, ait assisté à l’investiture, dans un stade bondé, de la première femme présidente du Honduras, Xiomara Castro de Zelaya, est surprenant. Ses 2 motivations principales pourraient être de ressusciter son plan migratoire affaibli et de retarder la rupture du nouveau Gouvernement avec Taïwan et sa reconnaissance de la Chine communiste.
Il y a 4 raisons à sa présence spectaculaire :
1. Etayer l’ordre du jour féministe dont elle a besoin à cause de ses aspirations à la présidence pour 2024.
2. Soutenir une gauche modérée qui se propage en Amérique Latine.
3. Arrêter la migration vers le Mexique et les Etats-Unis dont les Etats-Unis sont également responsables.
4. Retarder la pénétration de la Chine après l’incorporation du Nicaragua à la Route de la Soie.
Aussi bien Kamala Harris que son alliée Hillary Clinton mettent en place un ordre du jour féministe global et cherchent à faire baisser la candidature à la présidence du parti démocrate quand le binôme Biden/Kamala Harris s’est effondré dans les sondages – au fond du trou aujourd’hui avec peu de possibilités à cause des graves erreurs du binôme Biden/Kamala Harris - ce qui fait prévoir un tsunami électoral à la chambre des représentants et au sénat en faveur du parti républicain avec un retour relatif du trumpisme avec ou sans Trump.
A cause de la dynamique même des événements, l’ordre du jour féministe a beaucoup plus bougé en Amérique Latine dans les faits, comme on peut le voir dans les récentes élections. La sémiotique géopolitique des Etats-Unis avec le parti démocrate – une coalition qui comprend une gauche progressiste à laquelle sont alliés Bernie Sanders et le SQUAD que dirige la millénale Alexandria Ocasio-Cortez, ne se dit pas le secteur afrodescendant du wokenismo qui se heurte au suprémacisme des Blancs protestants anglo-saxons (WASP) qui aujourd’hui brandit le trumpisme ravivé – classe la gauche de façon très discutable et manichéenne en gauche modérée, acceptable pour les intérêts monroïstes des Etats-Unis et gauche radicale pro-Russie et pro-chine, inacceptable pour leurs intérêts hégémoniques, représentée par les 3 pays de l’Alliance Bolivarienne pour les Peuples de Notre Amérique (ALBA): le Nicaragua, le Venezuela et Cuba.
Curieusement, ; il existerait une gauche hybride acrobatique, intermédiaire, qui oscillerait entre la gauche modérée politiquement correcte et la soi-disant repoussante gauche radicale : ce serait le cas de la Bolivie dans sa phase post-coup d’État du lithium et de retour de l’ex-président Evo Morales, accepté même par le FMI.
Dans ce classement, le Honduras, qui est également dans une phase de post-coup d’État, celui perpétré il y a 12 ans contre le président Zelaya (mari de l’actuelle présidente Xiomara Castro), est acceptable pour Washington. On a pu le voir de façon évidente grâce à la présence de la vice-présidente Kamala Harris et de sa délégation nourrie dont faisait partie Brian Nichols, un sous-secrétaire d’État qui se trouvait à Tegucigalpa une semaine avant les élections de novembre 2021 quI ont mis fin au Gouvernement paramilitaire de Juan Orlando Hernández, intronisé 2 fois président avec la bénédiction des putschistes de 2009.
Un autre point important concernant la visite de Kamala Harris, est le problème migratoire bien connu dont elle a la charge et à propos duquel elle n’a pas obtenu les résultats prévus alors que le Honduras pourrait être son laboratoire d’expérimentation pour combattre les racines du mal qui sont très complexes parce que la nouvelle présidente Xiomara Castro a hérité d’un pays littéralement brisé dans ses finances publiques – la présidente s’est exclamée de façon lugubre qu’elle avait hérité d’une « catastrophe économique » - fortement endetté (la dette a augmenté 7 fois sous les 2 mandats de Juan Orlando pour atteindre presque 16 000 000 000, soit 60% du PIB) et en pleine déliquescence avec une délinquance dans laquelle se distinguent le trafic de drogues, les bandes des Mara Salvatrucha, la misère extrême, la corruption et le chômage qui s’alimentent entre eux de façon circulaire.
Après la reconnaissance retentissante de la Chine par le Nicaragua, voisin du Honduras par le sud avec une frontière de 940 km, la plus importante de ses frontières, avec le Guatemala, il a 244 km de frontière et avec le Salvador 391 km), et la rupture des relations de Managua avec l’île renégate de Taïwan, une crainte géopolitique s’est emparée du Gouvernement Biden/Kamala Harris décidé à empêcher que le même chose se produise à Tegucigalpa.
Selon le Time, la visite de Kamala Harris au Honduras «est en réalité sur la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. »
Sa visite visa aussi à se sauver elle-même puisqu’un échec est très probable et que cela détruirait sas ambitions présidentielles.
Il faut rappeler que l’aide rachitique 1 200 000 000 de $ des Etats-Unis au Triangle Nord composé par le Guatemala, le Salvador et le Honduras ne représenterait rien face à la pénétration de la Chine qui aujourd’hui, possède les plus importantes réserves de devises du monde : 3 200 000 000 de $, selon la CIA.
Ni lente ni paresseuse, la Chine a inclus le Nicaragua dans son schéma géo-économique de la Route de la Soie, ce qui, de fait, sort de son isolement asphyxiant le Nicaragua qui rêve à présent des revenus des capitaux pléthoriques de la Chine communiste qui, elle, souhaite construire le canal inter-océanique qui doit compléter le stratégique canal de Panamá et affaiblir le géoéconomie déjà faible des Etats-Unis.
Pendant la campagne présidentielle, la présidente Xiomara Castro de Zelaya a promis de rompre les relations avec Taïwan et d’établir des relations diplomatiques la Chine communiste. Ensuite, la présidente hondurienne est revenue un peu en arrière et a toujours des relations avec Taïwan dont le représentant s’est fait remarquer dans les couloirs du Palais Présidentiel à Tegucigalpa. Il faut dire qu’à l’investiture de la présidente hondurienne, Taïwan était représenté par son vice-président William Lai.
Cela n’est pas sans importance puisqu’aujourd’hui, il ne reste plus que 3 pays, en Amérique Centrale, qui reconnaissent Taïwan : le Honduras, le Guatemala et l’ancienne colonie britannique et paradis fiscal de Belize.
Kamala Harris pourrait-elle vraiment empêcher Xiomara Castro de reconnaître la Chine communiste?
En échange de quelle sorte de contrepartie le Gouvernement de Xiomara Castro serait-il prêt à laisser sans suite sa promesse de reconnaissance de la Chine qui peut représenter une grande manne financière dont il a tant besoin ?
Ses 3 pays frontaliers du Honduras – où les Etats-Unis ont une importante base militaire à Palmerola - 2 collaborent déjà ouvertement avec la Chine communiste : le Nicaragua, avec Daniel Ortega, et le Salvador, avec Nayib Bukele.
La présidente Xiomara a un atout inestimable dans sa manche dans la partie qui se déroule entre les Etats-Unis et la Chine en Amérique Latine en général et en Amérique Centrale en particulier.
Dans les prochains mois, la dynamique électorale dans 2 pays très importants d’Amérique du Sud, Colombie et au Brésil aura une grande importance.
En Colombie, où les Etats-Unis ont 9 bases militaires ou des installations qui sont presque des bases militaires, le candidat de gauche Gustavo Petro (reste à savoir comment le qualifie le Département d’État), ancien maire de Bogotá, se présente comme le numéro 1.
Au Brésil, Lula Da Silva, qui a été victime d’un coup d’État judiciaire, semble sufr le point d’être réélu.
Alors, les résultats des élections en Colombie et au Brésil imposeront leur rythme et donneront une marge de manœuvre plus importante au Gouvernement de Xiomara Castro.
Plus qu’une victoire de Gustavo Petro en Colombie, où tout peut arriver, une victoire de Lula renforcerait la marge de manoeuvre et les prises de décision de la présidente Xiomara Castro.
L’Amérique Latine en général et l’Amérique Centrale en particulier seront dpéendantes du résultat des prochaines élections de novembre aux Etats-Unis où un retour du trumpisme renverserait les récents châteaux de sable édifiés sur des sables mouvants par le binôme Biden/Kamala Harris.
Traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
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