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Culture: Vers la décolonisation de la Culture. L’Heure des brasiers et sa validation.

25 Mai 2022, 18:40pm

Publié par Bolivar Infos

Par Joel López Muñoz

 

Le pouvoir de la parole dans le cinéma comprend de grandes dimensions politiques, culturelles et historiques, tant du point de vue de sa consommation que dans les processus de production de récits. Il y a dans la production cinématographique, des dispositifs économiques qui dominent l’industrie internationale et la production de narrations, néanmoins il n’a pas été impossible à partir d’un pouvoir populaire, de raconter nos propres histoires, réalités et langages. Il existe un troisième cinéma, un autre regard, un cinéma décolonisateur apparu dans les années 70, qui vise à éveiller des consciences révolutionnaires. C’est l’héritage cinématographique d’une génération qui a lutté pour la libération et la décolonisation de la culture. Le film, L’Heure des brasiers, est sans doute un film essentiel pour comprendre ce mouvement et sa relation avec l’actualité.

 

Le film de Fernando « Pino » Solana et Octavio Getino, L’Heure des brasiers, produit en 1968 est une œuvre fondatricedu cinéma militant argentin et une bannière de lutte pour l’Amérique latine. Le film démarre avec plusieurs inscriptions qui disent : « Mon nom : Offensé, mon prénom : Humilié, mon état civil : Révolte », « Un même passé, un même ennemi, une même possibilité », « démunis, marginaux, condamnés », « L’histoire qu’on nous a enseignée est fausse », « Les libertés que les textes proclament n’existent pas », « Notre premier geste, notre première parole, Libération », « Pour ne pas être une colonie, il ne nous reste qu’une option : Le pouvoir au peuple ».

 

Ce n’est pas la première fois que l’audiovisuel est utilisé comme un outil de transformation sociale en Argentine, cela a été le cas dans les secteurs populaires et intellectuels et il convient de le souligner et de le revendiquer. La culture populaire comme arme d’expression des peuples opprimés est crainte par les pouvoirs oppresseurs, d’autant plus quand l’artiste élève sa condition. Comme l’a si bien dit Hernández Arregui : « Si la misère de la société capitaliste ne s’élève pas à l’art comme cause révolutionnaire, elle cesse d’être une misère rédemptrice et transforme l’artiste en misérable ». Le philosophe Nietzsche mentionne aussi le bon sens de l’artiste, qui est la création comme être non figé, et non adaptable. 

 

Bien qu’à certaines périodes de l’histoire du pays, des mécanismes de censure aient été mis en place, des cinéastes engagés politiquement ont travaillé dans la clandestinité pour élever leur voix. Par exemple la loi 18.019 de répression cinématographique et culturelle sous le gouvernement Onganía à la fin des années 60 a montré la crainte éprouvée face à la progression des cinéastes militants engagés dans la cause sociale. Mauricio Macri a révélé cette même faiblesse en 2016, en balayant la loi sur les services de communication audiovisuelle 26.522, favorisant ainsi les grands monopoles et freinant l’esprit critique. 

 

La percée néocolonialiste a asservi la culture populaire grâce à un ensemble de modèles, de valeurs et d’idées indissociables d’une machinerie économique, d’un pouvoir et d’un langage, pas en tant qu’anti-culture mais pour imposer une culture bourgeoise. En Amérique latine, avant l’invasion économique capitaliste il y eu une bataille culturelle colonialiste, c’est pourquoi la lutte pour donner le pouvoir au peuple implique également qu’il possède l’outil de la communication pour raconter ses réalités. 

 

En 1969, Fernando Solana et Octavio Getino écrivent Vers un troisième cinéma, un manifeste publié à Cuba, dans lequel ils exposent par écrit une façon innovante de transformer le langage cinématographique pour en faire un acte de résistance et de libération des peuples opprimés. Voici un extrait : « La lutte anti-impérialiste des peuples du Tiers Monde et de leurséquivalents au sein des métropoles constitue de nos jours la plus grande manifestation culturelle et artistique de notre temps, la grande possibilité de construire à partir de chaque peuple une personnalité libérée : La décolonisation de la culture. »

 

Pour livrer bataille pour la décolonisation, il faut entrer dans la dimension culturelle, où l’audiovisuel a une grande importance. Sur les réseaux sociaux comme à la télévision et sur les plateformes audiovisuelles, les éléments d’une alternative sont un défi et l’expérience historique nous a enseigné que donner le pouvoir au peuple, c’est lui donner l’outil pour s’exprimer. C’est un défi du journalisme, de la communication, de l’art et de la culture populaire.

 

Traduction David Lopez pour Bolivar infos

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2020/07/14/cine-hacia-la-descolonizacion-de-la-cultura-la-hora-de-los-hornos-y-su-vigencia/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2022/05/culture-vers-la-decolonisation-de-la-culture.l-heure-des-brasiers-et-sa-validation.html