Venezuela : Une nouvelle internationale contre le fascisme
Par Geraldina Colotti
Traduction Françoise Lopez pour Amérique latine–Bolivar infos
« La vérité du Venezuela ne se trouve pas à Miami mais dans les rues et les quartiers de notre pays. » C'est ainsi que le président Nicolas Maduro à clôturé le « congrès mondial contre le fascisme, le néo-fascisme et d'autres expressions similaires », à Caracas, en rejetant les prétentions, néo-coloniales de l'impérialisme occidental. Dignité, indépendance et vision de l'avenir ont été les caractéristiques du débat de deux jours auxquels ont participé plus de 1200 délégués du monde entier.
Le fil conducteur a été l'analyse comparative des agressions réalisées par un capitalisme en crise systémique contre des peuples décidés à être libres. Le ministre des relations extérieures, Ivan Gil et le vice ministre, Render Peña, assistés par les structures qui ont contribué à cette initiative (en commençant par le Parti Socialiste Uni du Venezuela -PSUV-) ont présenté les interventions des internationalistes qui participaient aux tables rondes pour illustrer ce sujet à partir de l’actualité et dans la perspective des différents pays.
Après les élections présidentielles du 28 juillet qui ont confirmé la victoire de Nicolas Maduro avec un gros écart, l'opposition vénézuélienne a saboté et remis en question les résultats. Et elle a mis en scène un scénario déjà vu en brûlant, en tuant, et en demandant à ses maîtres impérialistes d'envahir le pays avec des armes. Et au moment où j'écris cet article, le ministre de l'intérieur, de la justice et de la paix, Diosdado Cabello, a annoncé lors d'une conférence de presse l'arrestation d'un groupe de mercenaires de haut niveau équipés de 400 armes en provenance des États-Unis et avec le soutien du renseignement espagnol qui préparaient des attaques contre le président et d'autres hauts dirigeants du Gouvernement bolivarien.
Pendant ce temps, avec la complicité massive des médias internationaux, avec l'action omniprésente des réseaux sociaux, avec les manipulations mises en place par les « influenceurs » financés par Washington dont la liste a été révélée, on a imposé un schéma d'opinion préétabli : utile pour « soutenir » les attaques de l'extrême droite dans les organismes internationaux pour essayer de rééditer le défunt groupe de Lima raté.
Pendant ce temps, après des négociations avec le Gouvernement bolivarien et un bref passage dans les ambassades des Pays-Bas et de l'Espagne, l'ancien candidat de la droite fasciste Edmundo Gonzalez Urrutia s'est rendu à Madrid. Et d'Espagne, où d'autres Vénézuéliens qui fuient la justice vivent dans le luxe, est venu une nouvelle série d'attaques contre la démocratie bolivarienne, rejetée par les délégués au Congrès.
Après avoir qualifié de « héros », le fugitif Edmundo Gonzalez, le premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, l’a reçu à Madrid « en privé et à cause d'un engagement humanitaire » et au parlement espagnol, on a débattu d’une résolution non contraignante présentée par le Parti Populaire (PPE) destinée à « reconnaître » l'ancien candidat d’opposition comme président du Venezuela. Une réédition de la précédente (et ratée) « auto-proclamation » de Juan Gaido rejetée dédaigneusement et sarcastiquement par le congrès mondial contre le fascisme.
Pendant ce temps, un groupe de 49 pays de l'Union européenne a présenté devant l’ONU une déclaration demandant le « rétablissement des règles démocratiques au Venezuela. » Les États-Unis, pour leur part, ont imposé des « sanctions » à 16 fonctionnaires de la Force Armée Nationale Bolivarienne, de la police, de l'autorité électorale (CNE) et du Tribunal Suprême de Justice (TSJ), le plus haut organe judiciaire, auquel le président Maduro a demandé de résoudre la controverse et qui a réalisé la vérification du résultat des élections.
« Les sanctions n'aideront pas à trouver une issue à la crise politique, », a dit le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres. Et alors que la société vénézuélienne descend presque tous les jours dans les rues pour défendre sa souveraineté, alors que les hauts commandants de la FANB et de la police unissent leurs voix à celle du TSJ pour rejeter cette dernière ingérence dans les affaires intérieures du Venezuela, les tensions politiques avec le Gouvernement espagnol augmentent.
Le Parlement vénézuélien a voté une résolution demandant le retrait des ambassadeurs des deux pays. Et Maduro a convoqué aussi bien sa représentante en Espagne, Gladys Gutierrez, que le chargé d'affaires espagnol. Pendant ce temps, dans les communes, dans divers organes et institutions, on discute de la proposition approuvée au congrès mondial contre le fascisme : la formation d'une table ronde permanente qui implique tous les secteurs sociaux du pays et du monde autour d'un ordre du jour de lutte commun : pour la construction d'une nouvelle internationale anti fasciste qui démasque la véritable nature de de l'extrême droite en utilisant les termes de la lutte des classes.
Ils ont donné des « munitions » à la bataille des idées, renforcée par les deux jours de débat international, diverses publications et différents livres comme « Les visages du fascisme au troisième millénaire, » une collection d’essais. Ce livre est produit par l'université internationale de la communication (LAUICOM), dirigé par la députée Tania Diaz et coordonné par Fernando Buen Abad au niveau international. Ce volume contient un prologue du vice-président du PSUV, Diosdado Cabello, et a été présenté par Maduro dans son discours final au congrès anti-fasciste.
Avec l'Alba–TCP, dont le président est aujourd’hui Jorge Arreaza, avec le réseau des intellectuels, des artistes et des mouvements sociaux en défense de l’humanité (REDH), coordonné par Sergio Arria, avec le centre d'études latino-américains et caribéen Romulo Gallegos, dirigé par l'historien Pedro Calzadilla, avec le ministère de la culture, que dirige Ernesto Villegas, et avec Telesur, dirigés par Patricia Villegas, l’AUICOM a participé à une réunion d'organisation pour recueillir les propositions et coordonner l'engagement pour les mois qui viennent.
Pendant le congrès mondial contre le fascisme, le président a aussi lancé la proposition de consacrer à ce problème l'important prix Libérateur de la Pensée Critique. Et d'autres importants événements internationaux approchent comme le congrès de la jeunesse antifasciste et le congrès de la communication antifasciste en harmonie avec les évènements organisés à Cuba dans le cadre de l’Alba.
De Cuba sont arrivé d'autres "munitions » et d'autres apports importants comme le livre digital « Fascisme et anti-fascisme, une sélection de textes pour un débat indispensable, » sous la direction d'Ariana Lopez (éditrice du Blog Redh-Cuba), publié par le congrès mondial contre le fascisme.
La résistance de Cuba aux multiples attaques grâce auxquelles l'impérialisme voudrait imposer une nouvelle doctrine Monroe sur le continent, a aussi servi et sert toujours au Venezuela à indiquer, dans une perspective historique, ce qui se cache derrière les fausses déclarations et les récits toxiques diffusés par l'extrême droite pour cacher la main de la CIA.
En effet, comme l’a souligné l'historien Ernesto Limia devant les professeurs de la LAUICOM, qualifier les troupes de Machado-Gonzalez, de « commandements », en les faisant passer pour des commandements de campagne électorale a servi à cacher leur véritable fonction : pas des « commandements » démocratiques mais des unités militaires composées d'une centaine de personnes équipées pour le combat, c'est-à-dire, d'authentiques compagnies militaires à la solde de la CIA.
Pendant deux jours, le congrès a démantelé le récit impérialiste en soulignant les véritables intérêts économiques et politiques sous-jacents. L'événement s'est ouvert avec la conférence de Delcy Rodriguez, vice-présidente du pays et ministre du pétrole, s'est poursuivi avec celle du président du parlement, Jorge Rodriguez, celle du vice-président. du PSUV et ministre de l'Intérieur, Diosdado Cabello, et a été clôturé par l'intervention du président Maduro.
L’accolade aux familles des victimes des attentats mortels du 28 juillet qui apporteront prochainement leur témoignage au monde comme c'est arrivé précédemment avec le comité des victimes des Garimbas a été importante et émouvante. Ça n'a pas été un spectacle de souffrance mais la démonstration de la fierté de la dignité qui animent la résistance du peuple contre le fascisme. Une résistance qui donnera de la substance, dans toutes les instances de la Révolution Bolivarienne, à la nouvelle internationale contre le fascisme : pour s'opposer à l’avancée de la droite radicale et putschiste qui est en train de s'organiser dans le monde.
Un projet permanent qui implique tous ceux qui sont intéressés par la construction d'une alternative, sur le continent latino américain et en dehors, dans un ordre du jour de discussions et d'actions visible au niveau mondial. Comme point de départ, il y a la conscience que, comme pendant le siècle dernier, quand l'avancée des classes populaires a trouvé sa réponse dans le communisme, pour affronter la crise systémique du modèle capitaliste, la bourgeoise a donné le champ libre à de nouvelles formes de fascisme, qui se déploient à partir de l'Europe vers l'Amérique latine, et les États-Unis pour contrecarrer la croissance d'une alternative au niveau mondial.
Une alternative qui va prendre forme à plusieurs niveaux et avec diverses modalités dans l'apparition d'un monde multicentré et multipolaire en opposition avec l'hégémonie impérialiste dirigée par l'OTAN. Au niveau géopolitique, les nouvelles alliances sud–sud remettent en question les objectifs expansionnistes du camp occidental soumis aux États-Unis et arrêtent ses appétit aussi bien militaires que monétaires.
Dans celle-ci se reflètent les indices avant-gardistes nés d'un cycle précédent d'alliances et de consonances politiques qu’on appelle la « renaissance latino-américaine. » Cette situation heureuse qui a débuté avec l'élection de Hugo Chavez comme président du Venezuela, a mis au centre du débat la possibilité d'une nouvelle architecture financière et d'une nouvelle indépendance du continent telle que l'imaginait Simon Bolivar dans son projet de Grande Patrie.
Un cadre dans lequel la Révolution Bolivarienne se situe comme un laboratoire de résistance et d'expérimentation d'où émergent des coûts, des obstacles et des projets à affronter dans le présent et dont la signification dépasse les frontières du pays et celles du continent.
Avec les idéaux et l'esprit du siècle dernier (le siècle siècle des révolutions), on a trouvé la fière revendication d'une mémoire historique, anticolonialiste et de tendance bolivarienne dans laquelle les classes populaires ont combattu, même par les armes, les démocraties déguisées de la IVe République.
Le bilan des révolutions passées, l'analyse du point le plus haut atteint par les classes populaires au siècle dernier et les questions qui ont surgi constituent le bagage substantiel mais non rigide du socialisme bolivarien. C'est pourquoi le congrès antifasciste a rendu hommage au sacrifice de Salvador Allende, à ses positions anti-impérialistes oubliées par les gouvernants chiliens actuels qui sont revenus du côté des oppresseurs malgré leurs apparentes positions « de gauche. »
C'est pourquoi les messages envoyés par le Nicaragua, la dernière révolution du siècle dernier, par la voix du président Daniel Ortega et de la vice-présidente Rosario Murillo, ont une signification profonde. Et, à plusieurs occasions, le congrès a rendu hommage à la résistance palestinienne, victime d'un génocide qui représente une nouvelle forme de fascisme, maintenant impossible à cacher après le chantage de l'holocauste. Une tragédie historique très bien contextualisée dans les analyses et les documents diffusés pendant le congrès. Les interventions vidéo de la Russie et son combat pour la « dénazification de l'Ukraine » ont aussi été très applaudis et les délégués ont réaffirmé une claire position anti-impérialiste.
Le problème de la liberté des femmes et de la lutte des femmes contre le patriarcat, le fascisme et les expressions similaires était très présent et transversal pendant ces deux journées.
Pour combiner le concept de paix avec celui de justice sociale, la révolution bolivarienne a donné une grande importance à la recherche du consensus, à la formation permanente, des militants et à la bataille des idées, reprenant, ainsi dans la pratique d’anciennes fractures théoriques entre idéologie libertaire et modèle marxiste–léniniste du XXe siècle.
Au niveau économique, l'expérimentation de nouvelles formes de production qui rejettent le néolibéralisme sauvage et remettent en question le capitalisme en combinant autogestion et planification de l'État, réformes structurelles et ouverture partielle au « marché » grâce à l'implication des secteurs patronaux nationalistes intéressés par le développement interne, a débuté.
Dans un pays qui a soumis la gestion de ses immenses ressources à l'approbation du pouvoir populaire, malgré les limitations dues aux mesures coercitives unilatérales, la démocratie « participative et agissante » s'est renforcée et les options approuvées par le Gouvernement pour affronter la crise donne d'excellents résultats comme l’indiquent les statistiques qui montrent, pendant trois trimestres consécutifs, la croissance la plus forte du continent.
Mais la principale force de la Révolution Bolivarienne réside dans la continuité des générations. Les délégués internationaux ont pu le constater pendant la grande marche des jeunes qui a eu lieu immédiatement après le congrès anti-fasciste pour le 16e anniversaire de la JPSUV, la structure du Parti Socialiste du Venezuela pour les jeunes.
Une manifestation qui s'est achevée sur la place de la Caserne sans Carlo, l'ancienne prison dans laquelle étaient détenus les prisonniers politiques de la IVe République, et où aussi a été incarcéré Chavez après la rébellion civile et militaire du 4 février 1992. Pour l'occasion, Maduro a accordé à Nangula Geingob, fille de l'ancien président de Namibie, Hage Geingob, la plus haute décoration de la République Bolivarienne du Venezuela pour témoigner de la continuité envers les batailles anti-coloniales du continent africain, dans un engagement renouvelé entre mémoire et présent.
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