Argentine: Les fonds vautours posent leurs conditions
Par Eduardo Lucita /Resumen Latinoamericano / 11 mars 2016.-
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
Le macrisme a cessé de financer l'Etat avec un transfert brutal de al richesse vers les secteurs les plus puissants. Pour cela, il lui faut s'endetter et il pousse à payer tout ce qu'exigent les fonds vautours.
En continuant la pratique de tous les gouvernements actuels, celui-ci finit de valider la dette envers les fonds vautours avec un pré-accord - parce qu'il est conditionné à une série d'exigences du juge et des créanciers - onéreux qui, de plus, porte atteinte à la souveraineté de la Nation.
Depuis 1983, tous les gouvernements ont fini par avaliser la dette extérieure laissée par la dictature militaire. Personne ne s'est risqué à enquêter dessus et à l'auditer. Après les plans Brady, de super-échanges, des blindages, des restructurations et de nouveaux échanges, on est arrivé à présent à ce pré-accord avec les fonds vautours - acheteurs de bons à vil prix, spéculateurs de haut vol - qui, s'il se concrétise, feront un bénéfice qui, selon le type de bons, peut dépasser les 1000%. Ce sont aussi ceux qu'on appelle les “me too”, ceux qui se sont joints ensuite à la procédure et ceux qui sont en litige dans d'autres juridictions. En parallèle, ils se sont mis d'accord avec les créanciers italiens et continuent de négocier avec les Allemands et les Japonais.
Se réincorporer au monde
L'axe quipréside à toute l'action du gouvernement Macri dans osn plan à court terme est de se réincorporer au monde, de rompre l'"isolement" dans lequel a été plongé le pays dans la dernière décennie et de revenir sur les marchés volontaires de crédit. Se réincorporer aux flux financier globalisés et se ré-endetter. Il est clair que la plus basse relation dette extérieure-PIB laissée par le kirchnérisme est une incitation à cela.
Prendre une nouvelle dette est la poutre maîtresse qui soutiendrait ce plan et l'accord avec les détenteurs de bons qui ne sont pas entrés dans les échanges de 2005 et de 2010 est la clef qui ouvrira les portes eu peu vertueux cycle de ré-endettement.
Le schéma du ministre Prat Gay est très simple: s'arranger avec les holdouts (vautours et autres), se ré-endetter pour les payer et faire face à d'autres dettes en suspens ensuite avec le reste, financer la part de déficit et se tourner vers les provinces pour les travaux publics. Ainsi, suppose-t-il, l'économie commencera à croître et l'inflation à baisser. Et il ne semble pas avoir de plan B.
L'accord
Selon ce qu'a indiqué le ministre au Congrès, les engagements pris exigent que l'Etat national paie une somme de 11 684 millions de dollars (2 190 correspondent aux détenteurs sans sentence, 6 562 à ceux qui ont des jugements en leur faveur et 3 311 aux bons sousmis à la législation d'autres juridictions) à quoi il faut ajouter la bagatelle de 379 millions qui seraient les honoraires des avocats des fonds vautours. Pour cela, le gouvernement national émettrait des bons de dette à 5 ans, 10 ans et 30 ans à un taux moyen estimé de 7,5% par an qu'il devrait vendre parce que le paiement doit etre effectué en liquide. Il semble qu'il y ait là un engagement des banques J.P.Morgan, HSBC et Santander pour concrétiser cette opération. Selon le ministre, le montant à payer implique une remise de dette de 38% en moyenne du capital et des intérêts d'origine.
Pour que l'accord soit effectif, le gouvernement doit obtenir que le Congrès abroge ce qu'on appelle la Ley Cerrojo - qui empêche de réouvrir l'échange - et celle sur le Paiement Souverain - qui oblige les créanciers à payer à la Banque de la Nation. Si ces conditions sont réunies, le juge Thomas Griesa s'est engagé à lever la mesure préventive qui jusqu'à présent bloquait le paiement aux détenteurs de bons déjà restructurés. Souvenons-nous que la Loi sur le Paiement Souverain contenait la formation d'une commission bicamérale pour analyser la dette, une commission qui n'a jamais été constituée.
Démarches express
L'accord a été salué avec effusion aussi ben par la présidente du FMI Christine Lagarde que parle médiateur Dante Pollack (en réalité un représentant des vautours) et d'autres parce qu'il "va mettre fin à un long isolement sur les marchés internationaux du crédit " et "aidera à restaurer la normalité de l'économie".
Comme ce à quoi on s'est engagé doit être mis en oeuvre avant le 14 avril prochain, le gouvernement a déjà remis aux députés le projet de "Loi de Normalisation de la Dette Publique et d'Accès au Crédit Public" qui comprend l'abrogation des lois indiquées plus haut et l'autorisation de contracter une nouvelle dette de 15 000 millions de dollars pour solder les obligations, qu'il prétend faire approuver rapidement.
Un déficit menteur
Prisonnier de ces urgences, le ministre Prat Gay a recouru à un véritable chantage public pour obtenir l'approbation de la loi par l'opposition parlementaire: "C'est ça ou plus d'ajustement (structurel)". L'argument joue sur l'existence douteuse d'und éficit fiscal de l'ordre de 7%, "le plus important de ces 30 dernières années". Pour arriver à ce pourcentage, la nouvelle équipe économique se raccroche à l'orthodoxie et ne comptabilise pas les revenus produits par la non capitalisation des bénéfices du BCRA et les bénéfices du Fonds de Garantie de la Anses et d'autre part inclue dans les dépenses ce qu'on appelle la dette flottante, c'est à dire la dette qui est contractée lors d'un exercice mais dont le solde se fait lors de l'exercice suivant. D'autre part, il s'agit du déficit total qui inclut les intérêts de la dette. Si tous ces arrangements discutables et à remettre en question n'étaient pas réalisés, le déficit primaire serait de 3% à 4%. Pourquoi le gonfle-t-on? Simplement pour justifier l'ajustement et le ré-endettement.
L'opposition
Le FIT le rejette complètement et peut faire qu'aucun député de centre-gauche ne suive ce chemin. Au FPV, ils débattent pour savoir s'ils donneront ou non le quorum étant donné qu'une fraction du kirchnérisme semble décidée à ne pas avaliser le projet. Le reste de l'opposition n'aura pas de problème pour donner le quorum et approuver en général ce projet de loi bien que s'il y avait débat pour savoir comment éviter de futurs litiges, ils exigeraient des garanties que la nouvelle dette ne s’applique pas aux vautours. Rien de plus.
D'un autre point de vue, je me permets de reproduire un long paragraphe de l'historien et analyste Ezequiel Adamovsky qui fait la synthèse de ce que nous pensons: "S'il est approuvé, l'accord Prat Gay-Singer passera dans l'histoire comme l'une des plus importantes escroqueries perpétrées contre les citoyens de ce pays avec le pacte Roca-Runciman et le Super-échange (auquel, soit dit en passant, ont participé ceux qui aujourd'hui proposent cet accord et Sturzenegger est encore inculpé). Du point de vue économique (7% des détenteurs de bons ont emporté la moitié de l'argent qu'ont reçu les autres 93%), juridiquement risqué (parce que le juge de New York peut tranquillement interpréter que la clause pari passu protège les détenteurs de bons précédents pour demander la même chose), contraire au droit international (parce que es Nations Unies ont établi il y a quelques temps les règles que doivent suivre les restructurations de dettes et ce que font les vautours est expressément défendu), ruineux pour le pays qui reste endetté pour des générations avec ces bons qu'il doit émettre et avec la dette que va prendre ce gouvernement. Et surtout, inutile."
Avis positif
Au moment où je finis d'écrire cet article, le parti au gouvernement a accepté de limiter l'endettement et que l'excédent revienne dans son budget. Il a accepté de construire une commission bicamérale pour le suivi de la dette et d'y inclure des précisions qui permettent de faire baisser le risque de réclamations futures des détenteurs de bons. Avec cela, on cherche à obtenir un avis positif sur le projet qui sera traité le semaine prochaine. Il faut rappeler que pendant la campagne, les 3 principaux candidats à la présidence promettaient de résoudre le problème et d'amener au pays des milliers de millions de dollars. Par conséquent, au-delà du critère convenu prévisible, le plus probable est que la loi sera approuvée aux deux chambres.
Comme nous l'avons signalé en plusieurs occasions, c'est le prix à payer pour avoir refusé plusieurs fois d'auditer la dette et d'enquêter dessus. Un prix qui, inévitablement, sera payé, comme toujours, par le peuple travailleur.
*Membre du collectif EDI (Economistes de Gauche)
source en espagnol:
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