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Chili : Un coup d'Etat pour massacrer et piller un pays

12 Septembre 2017, 16:38pm

Publié par Bolivar Infos

 

Alfredo Seguel, Mapuexpress

 

Le coup d'Etat au Chili le 11 septembre 1973 a été une action militaire menée à bien par des dirigeants des Forces Armées du Chili de la Marine, des Forces Aériennes et de l'Armée avec les Carabiniers pour renverser le gouvernement de l'Unité Populaire dirigé par le Président Salvador Allende.

 

Salvador Allende était devenu président du Chili en 1970 et la possibilité d'un coup d'Etat était apparue auparavant dans le cadre de ce qu'on appelait la « Guerre Froide. » Le Gouvernement des Etats-Unis dirigé par le président Richard Nixon et son secrétaire d'Etat Henry Kissinger ont eu une influence décisive sur des groupes politiques, patronaux et militaires d'opposition à Allende qui finançaient et soutenaient activement la réalisation d'un coup d'Etat. Parmi ces actions se trouvent l'assassinat du général René Schneider et le Tanquetazo, un soulèvement militaire, le 29 juin 1973.

 

L'entrepreneur qui a dirigé les relations avec les services de renseignement des Etats-Unis pour la planification du coup d'Etat était Agustín Edwards Eastman, propriétaire de l'entreprise de journalisme El Mercurio S.A.P. Qui publie les journaux chiliens El Mercurio et La Segunda, entre autres. Les actes de conspiration au Chili ont compris des mesures pour déstabiliser le Gouvernement, des campagnes de communication, la polarisation du pays, la promotion de la violence civile, les sabotages, entre autres.

 

Même si d'autres pays sud-américains ont vécu aussi de féroces dictatures militaires comme la Bolivie, le Brésil, l'Uruguay et l'Argentina, celle du Chili s'est caractérisée par l'instauration d'un laboratoire grotesque du modèle néolibéral qui a développé à la fois le pillage du pays en accordant de larges bénéfices et privilèges à un groupe économique de l'oligarchie qu'elle a installé au sommet du pouvoir et en gouvernant avec les secteurs militaires putschistes, un statut obtenu par de multiples actes de cruauté, la persécution, les assassinats, les massacres et l'exil d'un large secteur de la population.

 

Une partie importante de ces statuts et des privilèges obtenus par l'oligarchie pendant la dictature militaire sont toujours présents dans l'Etat chilien et pour des raisons légales, factuelles et aussi de corruption, ont été une partie importante des négociations et de la soumission des divers Gouvernements de ce qu'on appelle le retour à la démocratie où les groupes économiques, après le pillage et le contrôle des ressources, des biens et des services sous le régime d'Augusto Pinochet Ugarte et de la Junte Militaire (11 septembre 1973 au 11 mars 1990) qui maintenait de nombreuses restrictions commerciales avec les pays démocratiques du monde ont réussi sous les Gouvernements de la Concertation à ouvrir des voies aux exportations grâce à de nombreux traités internationaux de Libre Commerce. Le Gouvernement de Ricardo Lagos a été celui qui est le plus allé dans ce sens en augmentant la fortune au niveau mondial de groupes comme Angelini, Matte, Paulmann, Luksic, Piñera, entre autres.

 

Pendant la dictature militaire, les eaux du pays ont été privatisées et une longue période de privatisations a débuté, commençant un processus d'expansion de l'extractivisme (mines, forêts, celluloses, pêche, autres) et de sur-exploitation des territoires pour le bénéfice de ces groupes.

 

Le dictateur Augusto Pinochet Ugarte est mort le 10 décembre 2006 avec une grosse fortune qui était en relation avec le pillage et les faveurs concédées à des intérêts patronaux. Pour sa part, l'entrepreneur conspirateur du coup d’État, Agustín Edwards, est mort le 24 avril 2017.

 

Les antécédents du massacre

 

Avec le coup d'Etat, l'Etat de Siège est déclaré dans tout le Chili et il se prolonge jusqu'en 1987. Cela signifie qu'il n'y a plus de justice et que la connaissance et les décisions concernant les affaires d'infraction aux règles de l'Etat de Siège sont déférées à une juridiction militaire de temps de guerre.

 

Sous ce prétexte, le Gouvernement de Pinochet s'est consacré à faire des arrestations arbitraires. On estime à plus de 250 000 le nombre d'arrestations effectuées pendant les premiers jours du coup d'Etat.

 

Les exécutions sans avis préalable, les disparitions et les morts dans de faux affrontements sont devenus des pratiques habituelles. Divers témoins ont rendu compte de l'existence pendant cette période de la délation entre voisins et collègues provoquées par la Junte mIlitaire.

 

Au début de la dictature, le Congrès National et le Tribunal Constitutionnel ont été dissous, les partis de gauche ont été considérés comme illégaux et ont été dissous.D'autres partis ont été considérés en sommeil tandis que les Registres Electoraux ont été brûlés et que les fonctions de maires et de conseillers municipaux ont cessé.

 

Même s'il n'y a pas l'unanimité sur le nombre réel de victimes des violations des droits de l'homme au Chili pendant cette période, le nombre qui a été donné sous le commandement d' Augusto Pinochet est estimé à 40 280 personnes, entre assassinats, disparitions et personnes torturées. Cette donnée se trouve dans le rapport officiel de 2011 de la Commission de Conseil pour la Qualification des Prisonniers, Disparus, des Exécutions Politiques, des Victimes de la Prison Politique et de la Torture.

 

Entre 1990 et 1991, la Commission pour la Vérité et la Réconciliation – plus connue sous le nom de Commission Rettig - a réuni des milliers de témoignages et de documents sur les morts et les disparus. Son travail a été complété en 2003 et 2004 par la Commission sur la Prison Politique et la Torture - plus connue sous le nom de Commission Valech - qui a connu les récits des victimes et les méthodes que les militaires et les agents de la dictature ont utilisées.

 

La Commission Rettig a estimé à 2 279 le nombre de morts ou de disparus mais un troisième groupe de travail, la Commission pour la Réparation et la Justice, a ajouté une nouvelle liste de 899 crimes, ce qui a élevé le nombre total de victimes à 3 197.

 

Dans un rapport élaboré par les Forces Armées remis à une Table de Dialogue civique et militaire qui s'est réunie entre 1999 et 2001, figurent 200 noms de personnes arrêtées disparues. Elles ont toutes été jetées dans le Pacifique, dans des fleuves et dans des lacs du Chili ou enterrés on ne sait où, sur un total de 1 198 hommes et femmes, a publié laverdad.es.

 

Les principaux chiffres de ces rapports révèlent qu'environ 46% des victimes assassinées n'avaient pas d'affiliation politique et que la majorité des militants exécutés étaient des membres du Parti Socialiste, du Mouvement de la Gauche Révolutionnaire et du Parti Communiste. Les syndicats aussi ont subi le même sort. Ils ont été l'une des principales cibles de la vague initiale.

 

Au moins 150 religieux ont été obligés de quitter le pays dans less premiers temps de la dictature. Les églises ont formé des groupes en faveur de la défense des Droits de l'Homme (Comité Pro-Paz) et leur action a fini parfois par rendre furieux le Gouvernement lui-même.

 

Fin 1975, cette organisation dirigée par le Cardinal est fermée sous prétexte que c'est une organisation pour laquelle les marxistes-léninistes créent des problèmes qui perturbent la tranquillité du pays. Pendant sa vie, cette organisation a dénoncé plus de 6 900 cas de persécutions politiques et plus de 6 900 cas d'exonération ont reçu des conseils.

 

des persécutions de religieux ont eu lieu et il y a eu des morts et des tortures de religieux laïcs et des incendies de chapelles. En 1974 les religieux espagnols Antonio Llido et Gerardo Poblete sont morts suite à des tortures. Le Comité Pro-Paz du Cardinal Silva a été remplacé par le Vicariat de la Solidarité créé par l'Archidiocèse. Son travail de conseil et de dénonciation a provoqué la persécution de ceux qui y travaillaient.

 

Auparavant, il y eut de grandes exécutions et des enlèvements massifs dans le monde paysan et communautaire. La persécution de dirigeants ruraux était parallèle au démantèlement de la réforme agraire qui faisait passer des terres de paysans et de communautés à des intérêts d’entreprises.

 

Les principaux organes de « renseignement » qui ont agi dans cette politique de terreur sont le Service du Renseignement Militaire (S.I.M.), le Service du Renseignement Naval. (S.I.N.), le Service de Renseignement des Carabiniers (S.I.CAR.), le Service de Renseignement des Forces Aériennes (S.I.F.A.), la Direction Nationale du Renseignement (DI.NA.), le Commandement conjoint, la Centrale Nationale d'Information (C.N.I.), la Direction des Communications des Carabiniers (DI.COM.CAR), le Commandement des Vengeurs des Martyres (CO.VE.MA.). Des agents de renseignement ont formé après la dictature des entreprises de sécurité comme Osepar qui ont collaboré avec des entreprises forestières chiliennes, un sujet dont s'est occupé un Groupe de Travail de l'ONU sur les Mercenaires et les Gardes Privés qui a présneté un rapport de Mission au Chili devant le Conseil des Droits de l'HOmme de l'ONU en mars 2008.

 

Les antécédents du pillage

 

Il n'est pas possible de détacher le coup d'Etat des principaux groupes qui ont bénéficié de la dictature militaire, pas plus que de la fortune du dictateur. Selon l'auteur du livre « Pinochet, le grand commissionnaire », la fortune du dictateur dépassait les 29 millions de dollars mais certaines voix disent que son montant est bien supérieur : des appartements à Valparaíso, Reñaca, Iquique, Santiago, des propriétés dans le Molocotón, des parcelles à Quintero, des voitures, entre autres. Une fortune personnelle gagnée dans une carrière militaire et au service de la « Patrie » ?

 

Il y avait 725 compagnies dans les mains de l'Etat au moment du coup d'Etat du 11 septembre 1973. La plupart est passée aux mains de groupes économiques hautement concentrés dont la plupart ont surgi et se sont renforcées dans les premières années de la dictature. Au moins 2 500 millions de dollars de l'époque ont été perdus seulement dans le transfert aux mains du privé des 30 plus grandes entreprises. Ces montants, selon le taux du PIB, correspondraient aujourd'hui à quelques 6 000 millions de dollars, selon un rapport de députés qui étaient opposés à la dictature et qui ont recueilli des informations.

 

Plusieurs de ces entreprises sont retombées dans les mains d'amis proches et même de parents du dictateur comme son gendre avec l'entreprise Soquimich qui a représenté 261,9 millions de dollars de moins que sa valeur réelle. Corfo, de plus, a cessé de percevoir 184 millions de dollars pour la vente de la sucrerie d'Etat Iansa. L'entreprise d'électricité Endesa a représenté une perte de 895,6 millions de dollars, une autre entreprise du même secteur, Chilgener (aujourd'hui Gener), une perte de 171,1 millions de dollars, l'entreprise de distribution Chilectra, une perte de 96,4 millions de dollars et la Banque du Chili une perte de 66,9 millions de dollars, dit le rapport parlementaire. De même, 15 000 propriétés et immeubles faisant partie des biens nationaux ont été aliénés sur lesquels 11 000 sont allés directement dans les mains du privé. « Nous parlons d'environ 8 millions d'hectares qui étaient aux mains de l'Etat, presque 20% sont restés aux mains des paysans mais le reste a été transféré à des mains privées, » expliquait le député Carlos Montes dans ce rapport.

 

D'autre part, plus de 600 entreprises ont été fermées pendant la dictature militaire, la tendance étant de privilégier le monopole de groupes alliés aussi appelés co-gouvernants, sur certaines activités. Fermeture de médias, d'entreprises de services, d'énergie, entre autres. Enfin, imposition d'un modèle néolibéral a nettement imposé une pyramide qui après la dictature a été administrée par les Gouvernements de la concertation et a provoqué par exemple, que des groupes ou des personnes comme « Luksic, Angelini, Matte, Paulmann et Piñera  gagent autant qu'un million de Chiliens » avec des fortunes accumulées de façon tout à fait immorale, en grande partie au prix du pillage des industries de l'extraction, de l'énergie ou de la banque.

 

L'entreprise d'Etat Endesa a été privatisée et là, les intérêts de différents groupes économiques et politiques alignés sur la dictature se sont liés à leur tout à la transnationale mère en Espagne. Celle-ci a reçu le contrôle de plus de 80% des eaux du Chili. COPEC, le holding pétrolière connexe avec des entreprises comme Forestal Arauco et Celulosa Celco est passée aux mains du patron italien Angelini. De grandes étendues de terre dont beaucoup avaient été l'objet de la réforme agraire pour les paysans et les communautés sont transférées à des groupes forestiers, y compris les Matte avec CMPC. De même, avec la fermeture de nombreux médias, Agustín Edwards en a pratiquement le monopole et contrôle le presse écrite grâce à El Mercurio et à ses journaux connexes nationaux et régionaux,devient l'outil de communication de la dictature et reçoit des fortunes en provenance des coffres publics. On peut aussi signaler le passage de concessions minières à de nombreuses entreprises étrangères parmi d'autres nombreux cas de pillage du pays.

 

Le départ du dictateur

 

Des pactes et différents accords entre militaires, secteurs politiques – patronaux de l'extrême-droite chilienne et la Concertation pour la Démocratie auraient provoqué le départ pacifique du dictateur Pinochet en 1990 à une telle extrémité que les gouvernements "démocratiques » ont fini par administrer le modèle économique de al dictature et ont conservé les bénéfices des groupes économiques privilégiés par le régime militaire.

 

Il faut signaler que le patron et militant de droite Sebastián Piñera, qui a été président du Chili de 2010 à 2014 a été vu pendant la campagne du Oui ou du Non à la poursuite du Gouvernement de Pinochet manifestant son choix du Non, essayant de s'habiller en « démocrate. » Il était évident qu'il en serait ainsi pour les groupes privilégiés par la dictature. Le modèle avait déjà été imposé, les monopoles et les oligopoles avaient déjà été installés et maintenir Pinochet à la tête de l'Etat n'était pas viable puisque les différents pays qualifiés de « démocratiques » et respectueux des Droits de l'Homme ne pouvaient avoir de relations commerciales et diplomatiques avec une dictature militaire largement dénoncée pour des massacres et des violations systématiques des Droits de l'Homme. Alors, il fallait « faire partir le dictateur » avec un pacte, pour qu'ensuite les différents traités internationaux puissent êtrepetre libérés.

 

Il faut mentionner que Piñera, pendant la dictature militaire, non seulement a été privilégié mais en plus a obtenu des protections à plusieurs niveaux. Des documents déclassifiés de la CIA aux Etats-Unis montrent non seulement le niveau d'influence et les relations qu'il avait avec la dictature par lui-même ou grâce à son frère qui était ministre d'Etat ou à son père qui lui ont donné des avantages dans leurs entreprises mais qu'en plus il gérait un groupe de pression de l'ambassadeur des Etats-Unis James Theberge avec le Président de la Cour Suprême en sa faveur et même en faveur d'une opération de renseignement qui l'a fait sortir du pays alors qu'il était sous mandat d'arrêt sans préjudice des conclusions de l'enquête judiciaire par la condamnation de 2 de ceux qui étaient impliqués dans l'escroquerie de la Banque de Talca, mentionnés dans les documents qui ont passé un temps respectable sous les verrous.

 

Cela explique le rôle fondamental de Piñera pour demander le retour du dictateur qui se trouvait en Angleterre, arrêté par la justice internationale à la demande du juge espagnol Baltazar Garzón pour crimes contre l'humanité. Piñera disait : « Nous ne sommes la colonie de personne. »

 

Finalement, Pinochet est rentré au Chili et est mort prostré, boiteux, sanctionné moralement mais sous une impunité politique et judiciaire décodée par le pacte « Militaire, politique et patronal » dont l'héritage se manifeste à présent dans les fortunes faramineuses des groupes économiques, une constitution politique de fait qui continue à être en vigueur et dans les larges réseaux de corruption des secteurs patronaux avec les secteurs politiques.

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

http://www.resumenlatinoamericano.org/2017/09/11/chile-un-golpe-para-masacrar-y-saquear-a-un-pais/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/ 2017/09/chili-un-coup-d-etat-pour-massacrer-et-piller-un-pays.html

Chili : Un coup d'Etat pour massacrer et piller un pays