Venezuela : Je ne passerai pas dans l'histoire comme un traître
L'auto-proclamation du dirigeant d'opposition Juan Guaidó comme soi-disant « président par interim » du Venezuela, le 23 janvier dernier, a divisé le monde en 2 : les pays qui soutiennent le Gouvernement légitime du Président vénézuélien Nicolás Maduro et ceux qui reconnaissent celui qui était jusqu'à présent président de l'Assemblée Nationale (AN). RT a conversé en exclusivité avec le Président Maduro qui nous donne sa vision de la situation actuelle de son pays.
« Peu m'importe comment je vais passer dans l'histoire. Je ne vais pas y passer comme un traître, comme un faible, comme un homme qui a tourné le dos à ses engagements historiques, à son peuple, » a déclaré le Président, soulignant que son objectif est de remplir ses fonctions et de dénoncer l'agression de son homologue étasunien Donald Trump. « Je demande à Dieu que notre pays n'en arrive pas à une intervention nord-américaine. »
« En Europe,ils ont reconnu quelque chose qui n'existe pas. »
Selon Maduro, les pays européens et le Groupe de Lima ont commis une erreur diplomatique en reconnaissant Guaidó, en obéissant aux ordres des Etats-Unis et en lançant un ultimatum au Gouvernement élu. « En Europe,ils ont reconnu quelque chose qui n'existe pas, » a-t-il dit car, souligne-t-il, au Venezuela seul le gouvernement qu'il préside existe.
En particulier, il pense que le président du Gouvernement d'Espagne, Pedro Sánchez, « commet une aussi grosse erreur que José María Aznar » qui, dans la guerre d'Irak , « s'est mis du sang sur les mains pour toujours » après s'être mis au service des Etats-Unis. Et il a ajouté qu' s'il y avait une invasion étasunienne au Venezuela, « les mains de Sánchez seraient pleines de sang pour toujours. »
Il n'y aura pas d'élections présidentielles mais des élections législatives
A propos des appels de différents pays à ce que des élections présidentielles anticipées soient organisées, le Président a souligné qu'il ne va pas le faire parce que « Au Venezuela, les élections ne manquent pas » et les seules qui sont en suspens, ce sont les élections législatives qui, selon le calendrier électoral, devraient avoir lieu en 2020.
« Le problème, c'est l'opposition, pas une élection de plus. Nous avons fait 25 élections en 20 ans. Pendant ces 18 derniers mois, nous avons eu 6 élections. Les élections, en 2018, ont été avancées sur proposition de l'opposition, » a-t-il conclu.
Mesures pour stabiliser l'économie
Le Président considère qu'il faut « exiger que cesse […] le blocus économique, financier et commercial contre le peuple du Venezuela » pour que les ressources du pays « prises en otage par le monde » soient libérées. Cela provoquerait une récupération de l'économie.
« L'hyperinflation produite par une sorte de change parallèle criminel nous fait de terribles dégâts, » a dit Maduro qui s'est montré optimiste à propos de l'ensemble des politiques mises en place par son Gouvernement qui, à son avis, commencent à donner de bons résultats.
« L'impérialisme n'aide personne au monde, personne. Dites-moi où ils ont apporté de l'aide humanitaire. Ce qu'ils ont apporté, ce sont des bombes ! Des bombes pour détruire l’Afghanistan, l'Irak, la Libye, la Syrie… Pour faire des morts, c'est du cinéma, c'est simple... »
Il a expliqué que son Gouvernement met en place 2 mesures pour stabiliser l'économie : la création de nouveau paramètres destinés à fixer la valeur réelle de la devise étrangère et l'essai d'un système de prix fixés qui « ne permette pas l'impact direct du prix sur les produits. » « Nous affrontons une guerre économique, » a assuré Maduro et il a rappelé que « la protection sociale de l'emploi, de la sécurité sociale, du revenu national et des pensions » est l'une des priorités de la politique de son Gouvernement.
« Pour les grandes tâches de l'économie […] le Venezuela va avoir besoin d'au moins 10 ans de plus pour l'orientation d'un appareil de production qui génère suffisamment de diversité dans la richesse nationale, » a affirmé Maduro et il a souligné que l'objectif final est qu'elle ne dépende pas d'un seul bien, dans ce cas, le pétrole.
« Ceux qui quittent le pays se laissent attirer par le chant des sirènes »
« Beaucoup de Vénézuéliens sont partis dans l'espoir d'une vie meilleure. Et qu'ont-ils trouvé ? La xénophobie, la persécution, l'exploitation, le travail d'esclave, » a déclaré Maduro, interrogé sur les Vénézuéliens qui quittent le pays et qui, à son avis, « se laissent attirer par le chant des sirènes. »
Le « casus belli » de Trump contre le Venezuela
La raison pour laquelle les Etats-Unis veulent intervenir militairement au Venezuela se trouve dans les ressources naturelles – comme le pétrole, l'or et le gaz – puisque Caracas n'a pas d'armes de destruction massive et n'est pas une menace pour Washington, soutient Maduro. De plus, le chef de l'Etat inclut dans le « casus belli » contre le Venezuela « la richesse morale de la Révolution Bolivarienne » et la volonté « d'en finir avec une révolution qui donne l'exemple de l'indépendance et de la justice sociale. »
Aide humanitaire à Guaidó
Maduro, qui a qualifié de « cirque politique » les propositions d'aide humanitaire faites à Guaidó par les Etats-Unis prévient que l'impérialisme n'aide personne au monde mais ne fait « qu'amener des bombes » et « provoquer des morts » comme c'est arrivé en Afghanistan, en Irak, en Libye et en Syrie. « Je ne vais accepter aucune sorte d’interventionnisme » souligne le chef de l'Etat vénézuélien.
Prêt au dialogue ?
A la question de savoir s'il est prêt à négocier avec Guaidó, le Président a répondu qu'il pense que le dirigeant de l’opposition est « un instrument de circonstance » choisi par les opposants vénézuéliens « pour une aventure dont ils savent qu'elle va échouer. »
Il a profité de l'occasion pour appeler au dialogue avec toutes les parties de l'opposition et remercier les Gouvernements qui ont manifesté une position favorable au dialogue et diplomatique pour résoudre le problème politique actuel du Venezuela.
Réponse aux sanctions : « le Venezuela est autosuffisant »
Les sanctions de Washington contre CITGO et Petróleos de Venezuela, S.A. (PDVSA) sont « une mesure d'embargo, de confiscation illégale » selon les lois étasuniennes contre lesquelles Caracas a pris des mesures légales. « Ce qu'ils ont fait n'a pas de nom, jamais ça n'a été fait contre aucun pays, » a déclaré Maduro.
L'entreprise texane CITGO, filiale de PDVSA, est au cœur d'une bataille politique concernant l'avenir du Venezuela puisqu'il s'agit d'une source vitale de liquidités pour le Gouvernement de Maduro et c'est la raison pour laquelle les Etats-Unis ont remis à Guaidó le contrôle de ses actifs. Lundi dernier, la Maison Blanche a gelé les fonds de PDVSA en territoire étasunien estimés à 7 000 000 000 de dollars, une mesure qui, selon le conseiller à la Sécurité des Etats-Unis, John Bolton, provoquerait des pertes supplémentaires d'une valeur de 11 000 000 000 de dollars pour cette année.
En tout cas, Maduro souligne que le Venezuela est autosuffisant et ne dépend pas des revenus de la vente du pétrole en provenance des Etats-Unis et il a rappelé qu'il vend du pétrole à d'autre pays comme la Chine ou l'Inde pour arriver à « produire 2,5 millions de barils » par jour à la mi-2019.
« Je demande au monde entier de sortir dénoncer la folie de Donald Trump et l'arrêter »
La diplomatie de paix et l'opinion publique mondiale doivent aider à éviter une invasion nord-américaine qui serait inestimable du point de vue du coût militaire et humain » pour Washington, prévient Maduro.
« Au Venezuela, il ne va pas y avoir la guerre ni une intervention militaire, » souligne le Président et il ajoute que « cela ne veut pas dire que nous ne nous préparons pas à défendre notre terre sacrée. »
« Comment évite-t-on une guerre ? Grâce à la diplomatie de paix et à l'opinion publique mondiale. Nous nous préparons aussi pour rendre inestimable du point de vue du coût militaire et humain une invasion des Etats-Unis. »
Nicolás Maduro, président du Venezuela
« Je profite de chaque média pour demander au monde entier de sortir dans le calme dénoncer et arrêter la folie de Donald Trump. Le Venezuela ne se rendra jamais. Une vague de conscience, de sensibilité mondiale commence à se lever. Et chaque jour qui passent, il va y avoir un rejet plus fort de Donald Trump, » soutient le Président vénézuélien.
Face à la menace intérieure de coup d'Etat qui plane sur le Venezuela, Maduro parie sur l’initiative du Mexique, de l'Uruguay et des membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) destinée à « construire un scénario de compréhension. »
Interrogé sur les paroles de Bolton, qui lui a suggéré de démissionner et de prendre « une retraite agréable et tranquille sur une belle plage, » le Président vénézuélien a expliqué qu'il aimerait se retirer au Venezuela quand il aura 90 ans avec ses « petits-enfants et ses arrières petits-enfants. » « Je pense qu'ils nous sous-estiment, Donald Trump, John Bolton, Mike Pompeo, Mike Pence…, » a-t-il dit et il a dénoncé « la suprématie blanche impérialiste que la Maison Blanche transforme en « mépris de tous les peuples du monde. »
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
source en espagnol :
http://albaciudad.org/2019/02/nicolas-maduro-entrevista-russia-today-rt/
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