Venezuela : A propos de l'arrestation du journaliste Luis Carlos Díaz
Le ministre de la Culture, le journaliste vénézuélien Ernesto Villegas, a évoqué mardi l'arrestation, lundi, du journaliste d'opposition Luis Carlos Díaz : « Je suis un communicant, un journaliste, et je ne me réjouirai jamais de l'arrestation d'un journaliste. C'est toujours une mauvaise nouvelle, de savoir qu'un journaliste est impliqué dans une affaire pénale, » a déclaré Villegas lors d'une interview accordée mardi soir à la journaliste Nieves Valdez de Radio Nacional de Venezuela.
Il a précisé que « la condition de journaliste n'annule pas la condition de citoyen. Tous les citoyens, indépendamment de leur travail, qu'ils soient médecins, avocats, maçons ou menuisiers doivent se soumettre aux lois du pays dans lequel ils vivent. Si nous avions vécu aux Etats-Unis, le 11 septembre (de 2001) et qu’une vidéo comme celle de ce journaliste avait fait son apparition, ce qui lui serait tombé dessus, certainement, ça aurait été une tenue orange directement pour Guantánamo. Dieu merci, nous ne sommes pas aux Etats-Unis. »
Villegas évoquait ainsi une vidéo publiée dans l'émission Con El Mazo Dando et sur son site, sur laquelle le journaliste Díaz, lors d'une émission de radio diffusée le 27 de février, parle de ce qui pourrait arriver au Venezuela si le Gouvernement soi-disant appliquait « un blackout sur l'information, » c'est à dire un blocage total de l'accès à internet. Díaz appelle, dans ce cas, à « sortir dans la rue pour enregistrer, prendre des photos, faire des vidéos, interviewer les gens, jusqu'à ce que la lumière revienne, » une phrase que certains ont trouvée suspecte car comment le communicant pouvait-il savoir qu'il allait y avoir une grosse panne d'électricité dans le pays comme c'est arrivé effectivement le 7 mars dernier, suite à une attaque du système électrique qui a laisse 80% du pays dans le noir. Le mot anglais blackout s'applique à l'origine à des pannes d'électricité.
Lundi 11 mars dans la soirée, l'arrestation de Luis Carlos Díaz a été diffusée sur les réseaux sociaux. On ne savait pas officiellement si c'était pour ses paroles sur la vidéo ou si c'était pour une autre raison mais son arrestation a provoqué une polémique sur les réseaux sociaux et les journalistes des médias privés ont exprimé leur inquiétude. Même la Haute Commissaire aux Droits de l'Homme de l'ONU, Michele Bachellet, a écrit un twitt dans lequel elle exprimait sa préoccupation.
A ce propos, Villegas a déclaré mardi : « Je que je souhaite, c'est qu'il y ait le procès convenable, qu'on respecte – comme on le doit – son droit à la défense, que sa famille puisse voir le détenu, qu'il ait un avocat, qu'on puisse déterminer quelles sont les charges contre lui, si cette personne a ou non une responsabilité dans ce qu'on dit, qu'il y ait collaboration avec la justice et qu'en tant que pays, nous ayons tous des éclaircissements sur ce qui est arrivé. »
« A moi, il me semble très bizarre, vraiment, qu'il y ait des gens avec des pouvoirs divinatoires, qu'il y ait des gens qui aient anticipé l'intervention étrangère, la crise humanitaire, » a-t-il déclaré. « Il y a une espèce de prophétie auto-accomplie, de certains individus qui se consacrent à créer les conditions subjectives pour que cela se réalise ensuite et ces choses-là n'obéissent pas à quelque chose de spontané mais à des plans. »
Villegas a dit : « Puissions-nous, dans le cas de la mega-panne – comme ils l'ont appelée - voir la vérité fleurir bien plus vite que n'a été révélée dans New York Times la version prouvant que les camions de Cúcuta ont été brûlés par les guarimberos cagoulés de Trump et non par les membres de la Police Nationale Bolivarienne. »
Le ministre a comparé cette attaque du système électrique avec ce qu'a subi le peuple des Etats-Unis le 11 septembre 2001 « pour les conséquences psychologiques et économiques qu'elle a provoqués et dont nous n'avons pas encore perçu tous les effets parce qu'ils ont des conséquences sur la vie normale d'un pays » et causent, de plus, « une terrible angoisse parmi la population. »
« Puissions-nous ne pas attendre 15 jours, c'est trop longtemps, » pour savoir exactement ce qui est arrivé, qui y est impliqué et s'il y a quelqu'un qui a été arrêté au cours de l'enquête et a été blanchi dans ces faits, qu'il soit libéré le plus vite possible, indépendamment de son travail. »
A propos de la préoccupation exprimée par certains journalistes à cause de l'arrestation de Díaz, Villegas a déclaré : « Puisse la préoccupation que certains collègues ont manifestée pour le sort de ce collègue, qui est légitime, s’appliquer à tous les communicants : ceux qui ont la carte et ceux qui ne l'ont pas, les anti-chavistes, les pro-Trump et les communicants bolivariens, révolutionnaires, ceux qui nécessairement, militent dans un courant politique. »
Il a rappelé le cas de la photographe chilienne Nicole Kraumm, qui travaille pour RT et était sur la frontière avec la Colombie, le 23 février dernier, et a été blessée quand des déserteurs vénézuéliens ont pris des blindés de la Garde Nationale Bolivarienne, les ont utilisés pour fuir en territoire colombien et ont renversé Kraumm sur le pont Simón Bolívar en fonçant sur les barrières.
Il a signalé qu'aucune organisation de défense des Droits de l'Homme ni vénézuélienne ni chilienne n'a mentionné cette journaliste et ne s'est préoccupée de son état de santé. Pas même le président chilien Sebastián Piñera qui, ce jour-là, était à Cúcuta.
Díaz a été libéré
Selon le site du journal El Universal, Luis Carlos Díaz a été libéré mardi soir après une audience au 31° tribunal de contrôle, avec des mesures de présentation.
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
Source en espagnol :
http://albaciudad.org/2019/03/ernesto-villegas-sobre-luis-carlos-diaz/
URL de cet article :