Venezuela : Lavrov désarme Pompeo, l'alliance Moscou-Caracas se renforce
Le Venezuela est, en ce moment, le pays déterminant dans les relations internationales pour le rôle important qu'il a tenu en se définissant comme nœud stratégique et espace de contradiction des principaux blocs du pouvoir mondial.
Cela a été à nouveau confirmé par 2 événements qui ont eu lieu ces jours-ci.
Tout d'abord, la rencontre entre le secrétaire d'Etat, Mike Pompeo, et le chancelier russe, Sergueï Lavrov, en Finlande, dans le cadre du Conseil de l'Arctique, une réunion qui avait un ordre du jour concernant des sujets essentiels comme la position des 2 principales puissances nucléaires de la planète à propos de l'armement. Cependant, la discussion a aussi eu pour priorité le Venezuela.
Ensuite, la tournée réalisée par le chancelier vénézuélien, Jorge Arreaza, dans des pays d'Europe, du Moyen Orient et d’Afrique pour renforcer la position du Venezuela face aux menaces du Gouvernement Trump sur la vie économique et politique du pays ces dernières années qui ont évolué vers une intervention militaire en herbe.
La question du Venezuela est vue comme un sujet à large spectre parce que c’est le point de rupture dans l'hémisphère occidental. Dans le cadre des relations et des contradictions géopolitiques, il y a une sérieuse possibilité que es événements au Venezuela évoluent vers un conflit dont les proportions seraient difficiles à estimer si Washington maintient son ordre du jour de destitution du président Nicolas Maduro.
Les contradictions entre l’Occident et la Russie
Lavrov a déclaré après la rencontre avec Pompeo qu'il n'a trouvé aucun pays qui soit réellement en faveur de l'usage des armes pour résoudre la crise vénézuélienne, faisant allusion à ses « collègues étasuniens, européens et latino-américains » qui, à son avis, ne partagent pas l'idée d'une « solution militaire imprudente. »
Le journal vénézuélien El Nacional rapporte que le seul point commun entre les 2 fonctionnaires se trouve dans le fait qu'aucun d'entre eux n'est partisan d'une intervention militaire dans le pays.
En effet, les déclarations de Pompeo et de Lavrov concordent avec celles qu'auraient faites le président Donald Trump qui a discuté récemment au téléphone avec son homologue Vladimir Poutine. Comme on le sait, ils ont parlé de la situation au Venezuela. Trump a indiqué que « Poutine ne pense pas à intervenir au Venezuela et je pense a même chose. »
Lavrov a affirmé que sa rencontre avec Pompeo a été « un pas en avant » dans la discussion des principaux sujets à l'ordre du jour entre les 2 pays. Cependant, les divergences ne se sont pas faites attendre dans les préliminaires à cette rencontre.
Pompeo a déclaré aux médias, sous-estimant ainsi la rencontre entre Lavrov et le chancelier vénézuélien Jorge Arreaza, à qui celui-ci a affirmé que Moscou soutenait le Gouvernement du Venezuela en exercice : « Lavrov en réalité, n'a pas rencontré un fonctionnaire vénézuélien, il a rencontré un proche de Maduro qui est un renégat, pas le dirigeant du Venezuela. »
Pompeo a souligné, en outre, que bien que le Président Maduro « commande » au Venezuela, « il ne peut pas gouverner » et il a défini la position du Président Maduro comme « faible. »
Les déclarations de Pompeo sont clairement en contradiction avec le déroulement du coup d'Etat manqué du 30 avril qui n'a pas réussi à fracturer le tissu politique et institutionnel de la FANB.
Dans les préliminaires à la réunion de Finlande, Pompeo a repris l’argument disant que le Président Maduro était soi-disant prêt à quitter le Venezuela, le 30 avril, ce qu'il n'a pas fait, soi-disant à l'instigation de la Russie.
Une lecture approfondie de cette rencontre montre que le chancelier russe a fait des déclarations après qu'elle ait eu lieu alors que Pompeo a gardé le silence. Lavrov s'est posé en porte-parole, faisant un pas en avant, se montrant optimiste et se basant sur les concordances que, semble-t-il, ils ont eues, lors de cette rencontre « bonne et constructive. »
En fait, la position russe, évidemment plus professionnelle que la position étasunienne sur tous les sujets diplomatiques depuis l'arrivée du Gouvernement Trump, laisse supposer que même pour Washington, tout n'est pas défini dans sa feuille de route de destitution et qu'ils luttent dans un cadre défavorable.
La Maison Blanche, bien qu'elle ait soutenu que le Venezuela est impossible à gouverner sous le chavisme, a lancé de constants appels à la FANB pour qu'elle tourne le dos à Maduro. Ces manœuvres ont été inutiles et cela s'est confirmé par l'échec du coup d'Etat du 30 avril lors duquel ses 2 principaux agents politiques sur le terrain ont été épuisés : Juan Guaidó et Leopoldo López, 2 fugitifs après cet événement.
La Russie fait intervenir le fait que l’épuisement de ce schéma donne du temps à Washington et des possibilités de détente politique.
C'est pour cela que Moscou invoque la voie politique pour tenter d'établir, conjointement avec Washington, un traitement différent de l'affaire vénézuélienne. Les efforts diplomatiques du Kremlin concordent clairement avec l’initiative qu'il a prise récemment de créer une coalition de pays à l'Organisation des Nations Unies (ONU) pour contrecarrer une intervention militaire au Venezuela.
L'ordre du jour du chancelier Arreaza et la recherche de fronts de soutien
La diplomatie vénézuélienne s'est caractérisée ces dernières années par un travail consistant à dénoncer l'agression étasunienne par les mesures coercitives du Gouvernement Trump dans le domaine politique et économique.
Cela a servi à renforcer les contradictions de plus en plus palpables et croissantes qui sont apparues sous diverses latitudes face à la politique étrangère des Etats-Unis.
Au point où on en est, l'éventuelle agression militaire des Etats-Unis ou l’organisation et le soutien d'un conflit interne est considérée comme l'une des situations les plus périlleuses pour la sécurité de l'hémisphère occidental.
C'est pourquoi le chancelier Jorge Arreaza, en tournée dans des pays d'Europe, du Moyen Orient et d’Afrique, a soumis à leur considération la gravité de l'ingérence étasunienne au Venezuela et s'est rapproché, comme la Russie, du Système des Nations Unies pour tenter d'arrêter Washington.
Pour le Venezuela il est donc indispensable de renforcer des fronts de soutien à 2 niveaux : premièrement, pour arrêter les intentions d'agression militaire qui sont nées avec la brèche qu'on a essayé de provoquer dans les institutions vénézuéliennes à partir du moment où la Maison Blanche a décidé de breveter et de légitimer Juan Guaidó comme «président par interim » du Venezuela en provoquant une rupture du cadre des relations internationales grâce à la cooptation et aux pressions sur plus de 50 pays.
Alors, le Venezuela se trouve aux côtés de plus de 140 pays de l'Organisation des Nations Unies pour lesquels le président légitime du pays reste le Président Maduro.
Deuxièmement, pour désarmer la guerre interne, le Venezuela cherche à renforcer la position de son Gouvernement qui a appelé constamment à une résolution pacifique des conflits entre Vénézuéliens. Le chancelier Arreaza, au nom du Président Maduro, a réaffirmé lors de cette tournée, sa position en faveur du dialogue intérieur en demandant au Mexique, à l'Uruguay, à la Bolivie et aux pays des Caraïbes de réactiver le Mécanisme de Montevideo, une alternative née dans la capitale uruguayenne pour créer une détente politique entre le chavisme et l'opposition.
L'argumentaire de la tournée du chancelier Arreaza concorde aussi avec la politique et l'exercice de la diplomatie que la Russie a avancés en appelant les pays à lutter pour la protection du Droit International et pour éviter des précédents « néfastes » pour le système de relations internationales à cause de l'unilatéralisme et du bellicisme brandis par les Etats-Unis.
En outre, cette tournée a, pour le Venezuela, l'importance stratégique de renforcer des accords économiques avec différents pays qui permettent d'affaiblir et de briser les mesures d'asphyxie financière et commerciale que subit le pays. Ces derniers mois, ces mesures ont servi à accroître les problèmes économiques du Venezuela grâce au blocus des exportations de pétrole.
Le 25 avril dernier, un rapport réalisé par la firme indépendante Centre d'Investigation Politique et Economique (CEPR), située aux Etats-Unis, révèle qu'on a découvert que ces mesures avaient provoqué des milliers de morts au Venezuela en 2017 et 2018.
Le chancelier Arreaza a annoncé lundi dernier qu'il se rendrait en Afrique du Sud pour renforcer les liens en matière économique, concrètement dans le domaine des mines, de l'agriculture et de l’industrie pharmaceutique.
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
Source en espagnol :
URL de cet article :