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Pérou : Vizcarra se renforce et les élections auront lieu en janvier

3 Octobre 2019, 22:05pm

Publié par Bolivar Infos

par Mariana Álvarez Orellana

Le président péruvien Martín Vizcarra, s'est renforcé au pouvoir après avoir dissout le Congrès, soutenu par l'Armée, les gouverneurs et les maires malgré le rejet de l'assemblée dominée par les fujimoristes et les apristes qui, en réponse à cette dissolution, ont voulu imposer la vice-présidente Mercedes Aráoz comme présidente « par interim. »

 

Mais face à l'absence de soutien des institutions, pressée par l' OEA et la rue qui exigeait « qu'ils s'en aillent tous, » la « présidente autoproclamée » Aráoz, représentante de l'oligarchie et du patronat, a démissionné par twitt et demandé d'avancer les élections générales, considérant qu'elle « n' a pas les conditions minimales pour exercer la charge que lui a donnée le Congrès. »

 

Lundi, après avoir appris la dissolution du Congrès, plusieurs manifestations de soutien à Vizcarra ont eu lieu dans le pays. Personne n'est sorti dans la rue pour soutenir le Congrès dont la position est condamnée par presque 90% de la population, selon tous les sondages. De récentes manifestations populaires ont exigé « que (les politiques) s'en aillent tous ! »

 

L’Organisation des Etats Américains (OEA), face à la déstabilisation que pourrait survenir dans le pays, cette fois, n'a pas reconnu la présidente autoproclamée et a appelé mardi le Tribunal Constitutionnel péruvien à dire si la décision de Vizcarra est conforme à la Constitution au lieu d’intervenir dans la controverse.

 

Par l’intermédiaire de la Conférence Episcopale, l'Eglise a appelé au dialogue et au calme et à « agir conformément à l'ordre constitutionnel et démocratique » en attendant qu'un secteur s'impose.

 

Ce choc entre les pouvoirs a eu lieu après que le Congrès, contrôlé par l'opposition fujimoriste du parti Force Populaire, ait été dissout par Vizcarra, de la formation Péruviens pour le Changement, ait annoncé la convocation des élections pour le 26 janvier 2020, respectant le délai fixé par la Constitution.

 

Des députés de l'opposition ont accusé le président de faire un « auto-coup d'Etat » et lundi soir, le Congrès dissout a déclaré la vacance temporaire du Pouvoir en nommant comme présidente par interim la vice-présidente Aráoz qui a reçu immédiatement le soutien des centrales patronales.

 

La Confédération Nationale des Institutions Patronales Privées a exprimé son « rejet énergique de la violation de la Constitution et du système démocratique perpétrée par le président qui a plongé le pays dans l'incertitude. »

 

Force Populaire, majoritaire au Congrès, est le parti de Keiko Fujimori, la fille de l'ex-dictateur génocidaire Alberto Fujimori. Keiko est actuellement en prison préventive pour suspicion de blanchiment d'argent.

 

La crise politique au Pérou s'est intensifiée il y a 3 ans quand le banquier Pedro Pablo Kuczynski (2016-2018) a battu de justesse la populiste Keiko Fujimori aux élections présidentielles mais que la fujimorisme a eu une écrasante majorité au Congrès grâce à laquelle il a maintenu dans les cordes Kuczynski jusqu'à le forcer à démissionner en mars 2018.

 

La corruption institutionnalisée

 

Vizcarra, qui est arrivé au pouvoir le 23 mars 2018, a été le vice-président de Kuczynski qui a démissionné après 20 mois au pouvoir à cause de son implication dans l'affaire de corruption de l’entreprise de construction transnationale brésilienne Odebrecht.

 

Précisément, l'ex-chef de cette transnationale au Pérou, Jorge Barata, a commencé ce mercredi-là à révéler à Curitiba le nom de 71 “pseudonymes”, parmi lesquels ceux de plusieurs parlementaires. Entre mars 2010 et le même mois de 2011, on a enregistré 9 entrées d'argent pour la campagne électorale des législatives pour un total de 455 776 dollars et on espère que Barata identifie ses destinataires.

 

Le dimanche, le président avait lancé un ultimatum au Congrès en avertissant qu'il le dissoudrait s'il lui refusait la confiance pour réformer la méthode de désignation des magistrats du Tribunal Constitutionnel. Il cherchait ainsi à empêcher que le processus soit dominé par l'opposition.

 

La réponse de l'assemblée a été de suspendre le président pour « incapacité temporaire, » la première étape d’une destitution, et a désigné à sa place Aráoz.

 

Le président a dénoncé le fait que le processus de choix des juges était peu transparent. La Constitution péruvienne prévoit que le p résident a la faculté de dissoudre le Congrès s'il lui refuse 3 fois un vote de confiance. Lundi, c'était la troisième fois.

 

Les chefs des Forces Armées et de la Police ont exprimé leur loyauté à Vizcarra qui a aussi reçu le soutien de nombreux gouverneurs de régions ainsi que de l'Association des Maires.

 

Le président a gagné en popularité en stimulant une croisade contre la corruption dans un pays où les 4 présidents précédents ont été accusés d'avoir reçu des fonds illégaux de l’entreprise de construction brésilienne Odebrecht : Pedro Pablo Kuczynski, Ollanta Humala, Alejandro Toledo, et Alan García qui s'est suicidé le 17 avril en se tirant une balle dans la tête alors qu'il était sur le point d'être arrêté à son domicile.

 

Dans un message à la nation, Vizcarra a confirmé sa décision en disant que « la dissolution du congrès est destinée à donner une solution démocratique et participative à un problème que le pays traîne depuis plus d e3 ans. » Il a dit que cette initiative est destinée à ouvrir la voie à « de nouvelles élections législatives et que ce soit enfin le peuple qui décide.

 

En avril 1992, le président de l'époque, Alberto Fujimori, a dirigé ce qui a été qualifié « d'auto-coup d'Etat » et a pris les pleins pouvoirs dictatoriaux avec le soutien des militaires. Vizcarra, par contre, a invoqué la Constitution pour ce faire... et il a obtenu le soutien des militaires.

 

Jusqu'aux élections prévues à présent pour fin janvier, la Commission Permanente du Congrès fonctionnera. Elle comprend 27 membres dont 18 fujimoristes. Les législateurs dissous ne peuvent postuler à leur réélection et, en fait, ils ont déjà perdu leurs privilèges.

 

Si les élections ont lieu en janvier, le mandat des nouveaux députés s'achèvera en juillet 2021 comme celui de Vizcarra. Les membres du Congrès dissout perdront leur immunité parlementaire dans les 30 jours, conformément à al Constitution.

 

*Anthropologue, enseignante et chercheuse péruvienne, analyste associée au Centre Latino-américain d'Analyse Stratégique (CLAE).

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

http://www.resumenlatinoamericano.org/2019/10/02/peru-se-impone-vizcarra-habra-elecciones-parlamentarias-en-enero-proximo/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2019/10/perou-vizcarra-se-renforce-et-les-elections-auront-lieu-en-janvier.html