Bolivie : Erick Foronda, "l'agent de la CIA qui dirige le gouvernement d'Anez"
Erick Foronda est un journaliste qui a été chargé de presse à l'Ambassade des Etats-Unis à La Paz de 1995 à 2008 jusqu'à ce que le gouvernement d'Evo Morales expulse l'Ambassadeur, rompant toutes relations diplomatiques avec les Etats-Unis.
Au cours de ses 13 années d'activité à l'Ambassade de la Place Avaroa, Forondo a collaboré avec 5 ambassadeurs, Curtis Warren Kamman, Donna Jean Hrinak, Manuel Rocha, David N. Greenley et Philip Goldberg.
Après l'expulsion décidée par le gouvernement de Morales, Forondo est parti à Washington avec l'ambassadeur Goldberg en septembre 2008. Il est resté dans la capitale des Etats-Unis pendant 12 ans, a pris la nationalité nord-américaine et adhéré au Parti Républicain.
Pendant son séjour à Washington, selon un rapport du journal El Deber, "il a travaillé pour diverses organisations". Des sources aux Etats-Unis assurent à Sol de Pando que l'une d'elle a été l'Agence Centrale du Renseignement (Central Intelligence Agency, CIA) où il a acquis des compétences de "négociateur politique". C'est l'ancien Ambassadeur Philip Goldberg qui l'a introduit à la CIA.
Forondo est revenu en Bolivie pour y exercer la charge de secrétaire privé d' Añez et pour "contribuer à la pacification du pays", selon les propos de Pagina Siete ; cette charge avait d'abord été attribuée à Carlos Sanchez Berzain, qu'il avait rencontré en Floride en avril 2018 pour assurer une sorte de couverture au procès qui s'est tenu dans un total silence médiatique à Fort Landerale contre Sanchez de Lozada et son ministre de la défense pour les morts de El Alto en octobre 2003.
L'agent de la CIA s'est empressé de se distancier de Sanchez Berzain, niant être son "envoyé". Il déclara dans une interview publiée par Pagina Siete "Je n'ai aucuns lien ni relation quelle qu'elle soit avec Sanchez Berzain. Je ne souhaite pas en établir car rien ne nous rapproche".
Une fois installé en Bolivie, il a déployé un intense lobbying pour asseoir sa situation très privilégiée au sein du régime provisoire qui a émergé après le départ forcé d'Evo Morales. Il a l'habitude d'offrir des "grillades entre amis" dans les jardins de sa résidence, y invitant d'influents politiciens et journalistes ; Jeanine Añez déjeune régulièrement chez lui.
Il s'immisce dans diverses sphères de l' appareil d'Etat, y déployant un rôle d'accapareur, très similaire à celui qu'avait eu Juan Ramon Quintana.
Il a imposé la nomination de la soeur du ministre du gouvernement, Arturo Murillo comme consul de Miami, alléguant des "raisons humanitaires" et il a tenu la Ministre des Affaires Etrangères, Karen Longaric, à distance, décidant par lui-même de la politique extérieure du gouvernement de transition. Alors que Longaric se trouvait hors du pays, Forondo obligea Añez à rompre ses relations avec Cuba.
Dans le domaine de la Sécurité, où la priorité américaine est de réactiver la présence de la DEA dans le pays, Forondo a mis le très bavard ministre Murillo dans sa poche.
L'agent de la CIA a exigé des transformations dans la chaîne de télévision d'Etat Canal Siete. L'ancien conseiller de presse de l'Ambassade des Etats-Unis à La Paz, Erick Forondo Prieto, devenu l'émissaire de l'Agence Centrale du Renseignement (CIA en anglais) a licencié le directeur de Bolivia TV, la chaîne d'Etat. Toujours sur décision d'Erick Foronda, le célèbre présentateur et directeur de presse d'UNITEL, Jorge Tejerina, prendra en charge dès lundi la direction de Bolivia TV en remplacement de Gonzalo Rivera dont le brutal congédiement a suscité nombre de critiques dans les milieux de la presse nationale. Tejerina a rendu public samedi son départ d'UNITEL. Le nom du journaliste André Rojas a aussi été mentionné.
En servant de secrétaire privé à la présidente Anez, Forondo Prieto accumule tous les pouvoirs du gouvernement de transition entre ses mains (comme Quintana à l'époque d'Evo Morales). Ses fonctions habituelles consistent, entre autres, à conseiller la Chef d'Etat sur sa campagne présidentielle et à rédiger ses discours de gestion. Il officie également comme porte-parole présidentiel.
Des sources fiables du Ministère de la Communication ont informé Sol de Pando qu'en raison des pressions exercée par Foronda, la chaîne UNITEL aurait reçu le privilège de se charger de la publicité de l'Etat, ce qui aura une forte incidence sur le niveau de couverture de ce média privé sur les intenses activités de prosélytisme d'Añez dans le cadre de sa gouvernance transitoire.
Lizarraga et la nièce de Foronda.
Selon les propos d'un fonctionnaire du Ministère de la Communication, la démission de l'ancienne titulaire de ce ministère, Roxana Lizarraga, aurait été hâtée par son désaccord au sujet des transactions passées avec UNITEL. Lizarraga n'approuvait pas le recrutement éventuel de journalistes d'UNITEL sur le staff de Bolivia TV sans que le personnel en question ne se désengage totalement de la chaîne privée.
Nicole Bisbal Brto, une nièce de Foronda qui avait été présentatrice du journal télévisé d'UNITEL avec Jorge Tejerina, a fait l'objet d'un différend entre le secrétaire privé de la Présidente et la Ministre de la Communication de l'époque ; Lizarraga refusa d'embaucher la nièce. Mais la parente de Foronda vient d'être recrutée par l'actuelle ministre Isabel Fernandez (également d'UNITEL), qui fait partie du cercle intime de l'ex-fonctionnaire de l'Ambassade nord-américaine.
Jeanine Añez encadrée par Foronda.
Lizarraga a accusé Erick Foronda de saboter sa gestion ministérielle. Il avait commencé par lui couper l'accès au bureau de Jeanine Añez. Elle affirme que dans les jours qui ont précédé sa démission -présentée le 25 janvier- elle n'avait pu contacter la Présidente que "par le biais de messages sur son téléphone portable" en raison du barrage imposé par Foronda qui voulait empêcher la Ministre de contacter directement la Présidente-candidate.
Lizarraga a aussi dénoncé le fait que Foronda a ordonné la transmission complète du lancement de la campagne de candidature d'Añez aux élections du 3 mai, acte transmis par Bolivia TV le 24 janvier, lui imposant cette utilisation abusive du média d'Etat. "J'ai demandé qui avait ordonné cette transmission et on m'a répondu que c'était le secrétaire privé de la Présidente, Erick Foronda au cours d'un appel téléphonique", a révélé Lizarraga dans une interview publiée sur le site "Questions fondamentales".
Le licenciement de Gonzalo Rivera vendredi dernier reposait sur des mobiles identiques. Foronda a constaté que Rivera n'était pas "fonctionnel" dans sa stratégie d'utiliser la chaîne d'Etat à des fins électorales et de promotion systématique de l'image "glamour" de Jeanine Añez, négligeant et mettant au second plan les tâches spécifiques du processus de transition. La stratégie de Foronda repose sur une sorte d'alliance entre UNITEL et BOLIVIA TV.
La Ministre Isabel Fernandez, qui exerce sa charge dans une étroite subordination à Foronda -assurent nos sources-, a été chargée d'éloigner Rivera selon les instructions données par Foronda lui-même, arguant d'un "manque de coordination entre le Ministère et la direction de la Chaîne pour définir les contenus de sa programmation". "Mme la Ministre a raison quand elle affirme qu'il s'agit d'une question de coordination, mais ce qu'elle ne dit pas, c'est qu'elle n'a pas voulu organiser une réunion pour examiner le projet de la chaîne de tous les Boliviens ; ce qu'elle ne dit pas, c'est qu'elle a imposé le personnel et voulait aussi imposer des programmes très similaires à ceux du gouvernement précédent", a déclaré Gonzalo Rivera sur ses réseaux sociaux.
Extrait de Plurinacional
Traduction Frédérique Buhl pour Bolivar Infos
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