Venezuela: Loi anti-blocus, reconfiguration du scénario des élections et baisse des cas de Covid-19 ?
Coup d’œil sur la semaine du 26/09-04/10
Par Jesús A. Rondón
Nous commençons le mois d’octobre avec au mois 3 questions très importantes concernant le Venezuela. toutes ces questions, comme c’est l’habitude dans le débat concernant le Venezuela, ont de multiples réponses. Nous en proposons quelques-unes ici pour aider à comprendre la situation et nos terminerons par 2 commentaires à propos du sujet que nous avons traité la semaine dernière à propos de la publication d’un rapport sur les Droits de l’Homme aux Nations Unies.
Qu’est-ce que la loi anti-blocus ?
Le président Nicolás Maduro a annoncé cette semaine le dépôt devant l’Assemblée Nationale Constituante de la « loi anti-blocus pour le développement du pays et la garantie des droits de l’homme. » Cette loi a pour but ce qui est dit dans son article 1: « établir un cadre de loi spécial et temporaire qui donne au Pouvoir Public vénézuélien les outils juridiques pour contrecarrer, faire baisser et réduire de façon efficace, urgente et nécessaire, les effets nocifs de l’imposition à la République Bolivarienne du Venezuela et à sa population, de mesures coercitives, unilatérales et d’autres mesures restrictives ou punitives émanant d’un autre Etat ou dictées par un autre Etat ou par un groupe d’Etats. »
C’est une proposition nouvelle destinée à apporter une réponse à une situation atypique pour le pays comme l’application de mesures coercitives unilatérales par d’autres Etats mais qui suit, à mon avis, une logique déjà connue, c’est-à-dire la logique des lois habilitantes. Je m’explique : dans des situations exceptionnelles, l’Assemblée Nationale, au Venezuela, peut habiliter le Président à prendre une série de mesures (qui s’expriment dans des lois) pour faire face à des réalités dans des domaines définis sans que celles-ci ne soient débattues et approuvées par le Parlement à conditions qu’elles soient conformes à la Constitution[1]. Etant donné l’inefficacité de l’Assemblée Nationale, l’incertitude concernant le rapport de forces au Parlement en janvier de l’année prochaine et le fait que l’Assemblée Nationale Constituante cessera en décembre, le gouvernement cherche à se doter d’un mécanisme légal efficace pour agir dans une situation d’agression extérieure.
Cette loi est donc destinée à diminuer les effets des mesures coercitives unilatérales mais pas leurs causes, celles-ci étant dépendantes des politiques d’autres Etats. Son domaine est essentiellement le domaine de l’économie car c’est dans celui-ci que leurs conséquences s’expriment. Ainsi, aucune discussion n’est nécessaire sur ses buts mais il doit y en avoir une sur les mécanismes qu’elle contient pour les atteindre. D’autre part, il est évident que cette loi prévoit certaines conditions pour agir mais ne révèle pas expressément le plan ou la direction que suivra le Gouvernement bolivarien.
L’opposition n’a pas réagi à cette proposition de loi comme elle le fait habituellement mais il y a déjà des discussions entre différents acteurs politiques chavistes.
Nous ne pouvons pas présenter ici une analyse exhaustive de cette loi mais aujourd’hui, exceptionnellement, je vais indiquer un lien vers une analyse réalisée par le député à l’Assemblée Nationale Constituante Luis Brito García (https://m.aporrea.org/tiburon/a295799.html) [2]. Son analyse alerte sur le fait que certaines choses contenues dans cette loi, de la façon dont elles sont formulées, sont en contradiction avec notre Constitution Nationale. Il considère aussi qu’il faudrait y apporter certains amendements.
Comme à d’autres occasions, on n’attend pas un violent débat à l’Assemblée Nationale Constituante bien que, conformément à la Constitution, ce débat soit nécessaire. Par conséquent, on s’attend à ce qu’elle soit approuvée rapidement. L’Assemblée Nationale Constituante ne s’est pas réunie depuis le début de la pandémie.
Le scénario électoral se reconfigure-t-il ?
Pendant ces 7 derniers jours, plusieurs événements ont eu lieu concernant les élections. Le plus important est la déclaration de l’Union Européenne demandant l’ajournement à 6 mois des élections pour, selon elle, avoir les garanties nécessaires aux opposants à la Révolution Bolivarienne. Cette déclaration a été faite après la visite d’une mission spéciale de l’Union Européenne qui jusqu’à présent, a été publique. Selon ce qu’elle a fait savoir, elle a rencontré les différents acteurs politiques vénézuéliens et a encouragé des négociations entre eux sans avoir obtenu de résultats à la hauteur des attentes des opposants au chavisme. L’impact de cette déclaration sur le processus électoral a été faible car seul Henrique Capriles Radonski qui, à l’origine avait décidé d’y participer, et son collègue Henri Falcón, se sont retirés de la compétition, s’alignant ainsi sur la déclaration de l’Union Européenne.
Le politique de l’Union Européenne garde le même relent d’ingérence en prétendant s’ériger comme arbitre supranational des démocraties mais elle diffère de l’action des Etats-Unis en reconnaissant le dialogue ou la négociation entre les parties pour résoudre le conflit politique mais dans l’intention évidente de favoriser les appétits de ses protégés. La politique étasunienne, elle, est frontale et exige le départ du chavisme du pouvoir sans conditions et c’est à cette politique que Guaido est vendu. De sorte que cette façon d’agir provoque des tensions entre l’Union Européenne et ses alliés d’Amérique du Nord.
L’Union Européenne ignore l’invitation du Gouvernement vénézuélien à accompagner les élections comme le font d’autres organismes, d’autres organisations politiques et des personnalités. Observer les élections dans notre pays signifie être présent lors des élections pour donner son opinion sans que cela ait un caractère contraignant.
Le chavisme, comme on pouvait s’y attendre, a rejeté la proposition et affirme que les élections auront bien lieu. Les organisations d’opposition qui participent aux élections n’ont pas manifesté de changement de position sauf ceux dont nous avons parlé. Ce qui a attiré l’attention, c’est que certains dirigeants d’opposition comme Javier Bertucci ont dénoncé le fait qu’ils n’ont pas été convoqués par la mission européenne pour les dialogues qu’elle a établis avec des acteurs politiques sur le terrain.
Lundi, comme prévu, le Conseil National Electoral a publié la liste définitive des candidats. Cette publication rend compte de ce qu’établit la loi concernant la distribution par sexe, ce qui garantit que la représentation entre hommes et femmes soit proche de 50%. Les audits du processus électoral, auxquels participent les organisations politiques qui présentent des candidats continuent.
Les cas de COVID-19 baissent-ils ?
Nous avons terminé septembre avec un bilan encourageant car le nombre de cas a été légèrement supérieur à ceux d’août, le mois pendant lequel on a rapporté leplus de cas. Il y a eu une augmentation de moins de 1%. Le 29 septembre, selon le « rapport statistique COVID-19 » du Centre Vénézuélien d’Etudes sur la Chine, la moyenne des cas par semaine diminue. Le taux de mortalité a un peu augmenté mais reste en-dessous de 0,9 %.
Le 3 octobre, on a diagnostiqué 77.646 cas positifs et le taux de guérison se situé à 88 %, sur lesquels 6 651 sont traités par le Système National de Santé Publique. a cette date, il y avait 649 morts.
Brèves:
- Cette semaine, une réunion a eu lieu entre le président Nicolás Maduro et la haute commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet. Selon le chancelier Jorge Arreaza, « nous avançons dans la coopération avec son bureau de Genève et son équipe au Venezuela. Un dialogue constructif, respectueux, pour la garantie des droits de l’homme de notre peuple. »
- Le Gouvernement met en place une forte campagne destinée à révéler les intérêts dont témoigne le rapport de la « mission de détermination des faits sur les violations des droits de l’homme au Venezuela depuis 2014 » des Nations Unies et à démonter les faux principes sur lesquels il s’appuie. Ainsi, un document intitulé « La vérité du Venezuela contre l’infamie, données et témoignages d’un pays attaqué, » circule dans les milieux de la diplomatie et de la communication. Il expose les conséquences sur notre peuple de toutes les agressions mises en place depuis l’étranger pour forcer un changement du rapport de forces dans la politique de notre pays.
Si vous souhaitez commenter ce texte, demander qu’on approfondisse un sujet ou poser tout autre question en rapport avec ce texte, vous pouvez écrire à l’auteur : jesusalbertorondon@gmail.com
NOTES de la traductrice:
Lorsque les institutions de la République, l'indépendance de la Nation, l'intégrité de son territoire ou l'exécution de ses engagements internationaux sont menacés (1) d'une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des Présidents des Assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel.
Il en informe la Nation par un message.
Ces mesures doivent être inspirées par la volonté d'assurer aux pouvoirs publics constitutionnels, dans les moindres délais, les moyens d'accomplir leur mission. Le Conseil constitutionnel est consulté à leur sujet.
Le Parlement se réunit de plein droit.
L'Assemblée nationale ne peut être dissoute pendant l'exercice des pouvoirs exceptionnels.
Après trente jours d'exercice des pouvoirs exceptionnels, le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat, soixante députés ou soixante sénateurs, aux fins d'examiner si les conditions énoncées au premier alinéa demeurent réunies. Il se prononce dans les délais les plus brefs par un avis public. Il procède de plein droit à cet examen et se prononce dans les mêmes conditions au terme de soixante jours d'exercice des pouvoirs exceptionnels et à tout moment au-delà de cette durée.
[2] analyse en espagnol, naturellement.
Traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
Source en espagnol :
Jesús A. Rondón
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