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Venezuela : Interview du Président Nicolás Maduro : J'aspire à la réconciliation des Vénézuéliens

5 Janvier 2021, 19:04pm

Publié par Bolivar Infos

Par Ignacio Ramonet

Tellement effrayante pour le monde entier, l'année 2020 a été relativement clémente envers le Venezuela. Evidemment, le blocus et les attaques de l'étranger n'ont pas cessé et même, par moments, se sont intensifiées. Mais la Révolution Bolivarienne qui a à présent 22 ans, a déjà une grande expérience de ces batailles. Ce qui est important, c'est qu'ici, contrairement à ce qui s'est passé dans la presque totalité de l'Amérique Latine et en particulier dans les pays voisins (Colombie, Brésil), la pandémie de COVID-19 a été contrôlée. Peu de malades, une faible mortalité. Alors que l'économie, pour sa part, dans ces circonstances très difficiles, connaît un rebond spectaculaire et une augmentation inédite de la production agro-alimentaire et des activités commerciales. De plus, la nouvelle législation favorise les investissements étrangers. Cette nouvelle situation, après plusieurs années de difficultés, s'est traduite politiquement par une grande victoire du chavisme, le 6 décembre dernier, aux élections législatives.

 

Attaqué aussi durement depuis des années, le président Nicolás Maduro savoure ce moment de douceur pendant lequel, en outre, 2 de ses principaux adversaires mordent la poussière. A l'intérieur, l'opposition extrémiste dirigée par Juan Guaidó, a été vaincue le 6 décembre et expulsée démocratiquement de l'Assemblée Nationale. A l'étranger, le chef de la conspiration internationale, Donald Trump, a été battu à plates coutures aux élections étasuniennes, le 3 novembre dernier et quittera la scène le 20 janvier prochain.

 

Pour en parler, nous bavardons avec Nicolás Maduro dans les superbes jardins de La Casona qui fut la résidence officielle des présidents du Venezuela et est aujourd'hui un centre culturel ouvert au public.

 

Ignacio Ramonet :Monsieur le Président, permettez-moi de vous remercier pour la gentillesse avec laquelle vous nous avez accordé cette interview. Nous rencontrer tous les premiers janvier pour faire un bilan de l'année écoulée et pour que vous nous disiez comment vous voyez l'année à venir va devenir une tradition. Cette interview va contenir 9 questions : 3 sur la politique intérieure, 3 sur l'économie, 3 sur la politique étrangère.

 

Je voudrais commencer par la politique intérieure. L'année 2020 qui s'achève restera dans l'histoire comme « l'année de la pandémie de COVID-19 » avec un bilan terrifiant à l'échelle de la planète en termes de malades et de victimes... Dans cette situation d'horreur, les chiffres que donne le Venezuela sont très encourageants, très positifs, ils se situent parmi les meilleurs du monde... Comment expliquez-vous ces bons résultats malgré le blocus et les mesures coercitives unilatérales imposées au pays par les autorités étasuniennes et européennes ? Y a-t-il un « modèle vénézuélien » de lutte contre le coronavirus ?

 

Nicolás Maduro: Bon, je te remercie pour cette opportunité, cette fenêtre que tu nous ouvres pour que nous parlions à beaucoup de gens honnêtes du monde, en Europe, aux Etats-Unis, en Amérique Latine, dans les Caraïbes, en Afrique... Ces interviews font déjà partie, en effet, d'une tradition puisqu'elles sont publiées le 1er janvier et que commence la nouvelle année 2021. En effet, sur le traitement du coronavirus, nous avons fait de gros efforts. Je pourrais dire que oui, il existe un modèle vénézuélien. Je le dis avec modestie parce qu'au Venezuela, il existe un système public de santé gratuite et de qualité construit pendant la révolution... Et parce que malgré la persécution et les sanctions criminelles qui nous empêchent d'acheter du matériel médical dans le monde et nous empêchent d'acquérir, tout naturellement, les médicaments dont le pays a besoin, nous avons réussi à conserver, à élargir, à perfectionner le système public de santé fondé par le commandant Chávez. La 'Misión Barrio Adentro' (dans le quartier) a été le premier pas vers la construction de notre système primaire de médecine familiale avec plus de 14 000 dispensaires, avec le médecin de famille, etc... tout cela avec le soutien de Fidel Castro, de Cuba et, depuis 16 ans, de milliers de médecins et de personnels de santé cubain... Pendant ce temps, nous, nous avons aussi formé des milliers dé médecins, d'infirmiers...

 

Quand, en mars dernier, le Venezuela a commencé à affronter le coronavirus, je me souviens des articles du Miami Herald, des journaux El País et ABC d'Espagne, du New York Times, etc... qui « prévoyaient » comme toujours quand il s'agit du Venezuela, « l’effondrement » de la société vénézuélienne, « l’effondrement » de notre système de santé, ils donnaient des chiffres véritablement terrifiants, tragiques...

 

Cette guerre psychologique a fait de l'effet... Parce qu'on lit ces numéros et on se dit : « Mon dieu ! Que va-t-il se passer ? » En mars, quand on a su que c'était une pandémie, bon, nous avons activé tous les mécanismes de la médecine préventive... Nous avons mobilisé quelques 16 000 brigades médicales qui sont encore actives pour aller à la recherche des cas avec les tests PCR, les tests rapides, maison par maison, dans les quartiers, dans les communautés...

 

Nous avons décidé de donner le traitement complet à tous les patients... A tous ! Et nous avons réussi à les hospitaliser dans le système public de santé... Et un petit pourcentage dans des cliniques privées, le système privé avec lequel nous avons établi une coordination parfaite pour donner le traitement à 100% des cas et les hospitaliser ...

 

Aujourd'hui, je peux te dire que 95% des cas que nous avons eus au Venezuela , quelques centaines et un pic de milliers de malades ont été détectés à temps, ont reçu un traitement médical à l'hôpital et ont eu tous leurs médicaments.

 

Nous avons identifié les meilleurs médicaments dans le pays et dans le monde et nous avons réellement donné le traitement complet, garanti à tous les patients, à ceux qui n'avaient pas de symptômes, à ceux qui avaient des formes légères, à ceux qui avaient des formes modérées et, naturellement, à ceux qui avaient des formes graves, dans leurs différentes modalités.

 

Et de plus, la science vénézuélienne a réussi à créer 2 médicaments : un qui s'appelle le DR10 et l'autre que j'appelle les « gouttes miraculeuses de José Gregorio Hernández, » des thérapies qui permettent d'attaquer le coronavirus et de le neutraliser à 100%. C'est notre petit apport...

 

Ces 2 médicaments, l’Organisation Panaméricaine de la Santé (OPS) et l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) les ont certifiés... Et très vite le pays entrera dans la phase de production de masse de ces 2 médicaments vraiment encourageants, pour la consommation intérieure.

 

Quand nous parlons du « modèle vénézuélien, » nous devons mentionner aussi une formule que nous avons créée après les longues quarantaines volontaires des mois de mars, avril, mai, juin et juillet... Parce qu'ensuite, nous avons essayé une méthode qui est notre méthode et que nous appelons "7 + 7": 7 jours de quarantaine radicale profonde, toujours volontaire et 7 jours d'assouplissement. Ce qui nous a permis de combiner la protection indispensable et l'activité économique... Le rétablissement de l'économie doit être combiné avec la quarantaine stricte, volontaire, destinée à couper les cycles de contagion. C'est ainsi que nous avons construit notre méthode.

 

D'où l'avons-nous sortie, Ramonet? De l'étude des expériences du monde. De l'étude des expériences positives comme celles de la Chine, du Vietnam, de Cuba, du Nicaragua, de la Nouvelle Zélande, de la Corée du Sud à un moment donné... De ces expériences et de l'étude des expériences négatives comme celles des Etats-Unis, du Brésil, de la Colombie qui nous a amené le coronavirus, de la maladie et de la mort dans ces pays frères. Ainsi, nous avons atteint un point d'équilibre entre la quarantaine nécessaire, les précautions nécessaires, la discipline nécessaire et la souplesse.

 

Ignacio Ramonet : Il faut dire aussi que le Venezuela a été le premier pays d'Amérique, de tout le continent, qui a pris des mesures de quarantaine... Si je me souviens bien, l'OMS a déclaré la pandémie le 11 mars et ici, la quarantaine a été décrétée le 13, c'est à dire bien avant tout autre pays dans la région. 

 

Nicolás Maduro: Oui, et nous avons eu un grand succès avec très peu de cas pendant les 3 premiers mois. Ensuite, il s'est produit un phénomène : le retour massif de milliers de migrants vénézuéliens de Colombie, d'Equateur, du Pérou... Fuyant le coronavirus, la violence, la « coronafaim »... certains étaient venus à pied d'Equateur, du Pérou, de Cali, de Medellín, de Bogotá jusqu'à la frontière.

 

Nous avons reçu plus de 270 000 Vénézuéliens dont presque 250.000 de Colombie...une « vague » qui est arrivée en juin, juillet... La frontière est très poreuse et aussi très longue. Et une grande partie de ces migrants est arrivée par des voies illégales, par les "trochas "... C'est pourquoi nous parlons de « trochisme »... Beaucoup d'entre eux arrivaient de Colombie, d'Equateur, du Pérou déjà malades et allaient directement dans leurs communautés... Ce qui a fait augmenter le nombre de malades.

 

Actuellement, c'est sous contrôle. Aujourd'hui, je peux dire que bien que nous ayons réalisé un assouplissement complet au mois de décembre 2020, un assouplissement nécessaire à la famille, à l'économie, nous avons un bon niveau de contrôle...

 

Et maintenant, nous avons signé un accord avec la Russie pour acheter 10 000 000 de doses du vaccin Spoutnik-V. Nous avons achevé les études de la phase 3 de ce vaccin et elles sont très bonnes. Nous allons commencer la vaccination. Mais on ne peut pas appeler à tromper les gens : les vaccins vont aider mais ne vont protéger que pendant 6 mois à 2 ans... Ce n'est pas pour toujours... Les gens doivent le savoir. Beaucoup de gens qui se vaccinent en ce moment dans le monde se vaccinent en pensant que tout danger est définitivement écarté d’attraper le coronavirus... Non, c'est une expérimentation. La vaccination de masse n'est rien d'autre qu'une expérimentation qui va devoir être évaluée.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, pendant toute l'année dernière, les attaques et les sabotages en particulier contre l'industrie électrique et l'industrie pétrolière dirigés et financés de l'étranger contre la Révolution Bolivarienne ont continué. La défaite de l'incursion armée de ce qu'on appelle l' Opération Gedeón, en mai 2020, a démontré, une fois de plus, la solidité de l'union civique et militaire. Quelles sont les clefs de cette union qui semble résister à toute épreuve ? Quelles nouvelles menaces armées existe-t-il contre le Venezuela et contre votre personne ?

 

Nicolás Maduro: Bon, nous travaillons beaucoup... Premièrement, nous travaillons avec les mots, avec l'exemple, avec des actions de gouvernement permanent. Nous travaillons l'idéologie, le politique, les valeurs de toute la société... Le Venezuela a démontré, en cette année 2020, une fois encore, la grande force de ses nouvelles institutions, des valeurs constitutionnelles et a démontré la grande force de la conscience de l'union civique, militaire et policière, comme je l'appelle.

 

Le Venezuela est soumis aux attaques d'une guerre permanente. Personne ne doit douter que l'Empire nord-américain, en tant qu'empire, a décidé de reconquérir, de recoloniser le Venezuela, de détruire notre révolution, de détruire nos institutions.

 

Pendant ces 4 années de présidence de Donald Trump, nous avons connu une version extrême de la politique impériale contre le Venezuela. Un extrémisme total... Trump a autorisé plusieurs fois - cela se saura un jour, Ramonet - mon assassinat. Trump a pris goût au sang, à la mort... Il a commandé d'assassiner Soleimani et d'autres encore... Et à plusieurs occasions, il a autorisé des plans, coordonnés avec [le président] Iván Duque de Colombie, destinés à m'assassiner. Ces plans continuent à être en vigueur aujourd'hui. Nous, de temps en temps, nous découvrons des éléments et nous prenons des mesures pour protéger, pas seulement ma vie, mais la vie de ma famille, la vie des hauts gradés de l'armée, la vie des dirigeants du pays, la vie des institutions...

 

Récemment, nous avons démantelé un plan ourdi à Riohacha, un territoire de l'Atlantique colombien. Là, le 21 décembre, a eu lieu une réunion dirigée par 3 fonctionnaires du renseignement colombien étroitement liés à [l'ex-président de la Colombie] Álvaro Uribe Vélez, envoyés par Iván Duque pour organiser un plan destiné à attaquer notre usine hydroélectrique de Guri, à attaquer nos raffineries, à essayer de détruire en le faisant exploser, le siège de l'Assemblée Nationale... Ce plan s'intitulait « Boycott de l'Assemblée Nationale. »

 

Nous sommes en train de le démanteler, en ce moment, preuves en mains, avec des témoignages de personnes qui ont participé à cette réunion de Ríohacha. Le Gouvernement colombien a gardé le silence parce que nous avons découvert le plan secret qu'ils avaient pour ces jours-ci de décembre et de janvier. Nous sommes soumis à une attaque permanente, à une menace permanente...

 

Mais la clef est la conscience. Sans aucun doute, si on nous demande, à nous : « Quelle est la clef pour que la Révolution Bolivarienne reste debout ? » la réponse est : la vérité, la parole engagée, l'action permanente, avoir l'initiative politique... Et la conscience supérieure du peuple, la conscience supérieure de notre Force Armée Nationale Bolivarienne. »

 

Cette année, une loi a été votée, la loi constitutionnelle qui régit la Force Armée Nationale Bolivarienne. Et dans cette loi, on a fixé les éléments doctrinaires qui font agir le soldat vénézuélien. On a fixé l'anti-impérialisme, le bolivarisme, le latino-américanisme... La Force Armée a été déclarée Force Armée anti-oligarchique.

 

Il y a des principes, des éléments clefs : travailler la conscience, travailler les valeurs et la vérité... C'est un élément essentiel de l'union civique, militaire et policière qui soutient, dans le combat permanent, notre révolution.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, les élections législatives du 6 décembre dernier ont donné une nouvelle et grande victoire au chavisme et à ses alliés. Le 5 janvier prochain, le mandat de l'Assemblée Nationale dominée par l'opposition s'achève et le 

chavisme reprendra le contrôle de l'Assemblée Nationale. Mais une partie de l'opposition a refusé de participer à ces élections et n'en reconnaît pas les résultats. Quelles initiatives comptez-vous prendre pour convaincre cette opposition de participer à une nouvelle table de dialogue destinée à avancer vers la pacification définitive de la vie politique ?

 

Nicolás Maduro: Bon, effectivement, une partie importante de l’opposition a adopté la vision extrémiste imposée par Washington pendant cette ère Trump... Mais l'ère Trump s'achève et nous allons voir comment réagit à présent cette partie de l'opposition. Nous, nous avons toujours maintenu des dialogues et des négociations avec toute l'opposition, même avec l'opposition qui s'est exclue du système politique démocratique du pays. Même avec eux, nous avons discuté, nous les avons invités à occuper leurs espaces. L'opposition vénézuélienne a des partisans, des militants, des électeurs. Et bon, ils ont le droit d'occuper leurs espaces politiques.

 

J'aspire à ce qu'avec l'installation de la nouvelle Assemblée Nationale pour la période 2021-2025, le 5 janvier prochain... 5 ans, du 5 janvier 2021 au 5 janvier 2026, c'est le mandat donné par la Constitution. Ici, les mandats constitutionnels sont de 5 ans pour le Pouvoir Législatif, pas un jour de plus, pas un jour de moins. J'aspire à ce que cette Assemblée Nationale qui s'installe convoque un grand dialogue incluant, inclusif, large, très large... Et je m'offre à participer à ce dialogue comme n'importe qui, assis sur une chaise comme n'importe qui. Je quitte les épaulettes de président et je m’assois là pour participer à cette rencontre et à la réconciliation des Vénézuéliens. Et puisse ce dialogue organisé par l'Assemblée Nationale avoir de bons résultats ! Et qu'elle devienne un épicentre politique de dialogue, de nouvelle rencontre, de réconciliation.

 

Puisse toute l'opposition participer aux élections des gouverneurs que nous avons en 2021 et qui sont très importantes... Ce sont des élections réclamées par la Constitution... Il y a 23 postes de gouverneurs dans le pays.

 

La dernière fois, Ramonet, que nous avons fait un bras de fer avec toute l'opposition unie contre les forces bolivariennes, ça a été lors d’une élection des gouverneurs, le 15 octobre 2017. Et sur les 23 postes, nous, nous en avons gagné 19 à la force du poignet. Nous avons eu 54% des voix de tout le pays. Une formidable victoire. Ça a été la dernière fois où nous avons pu nous mesurer. Et je veux ajouter que nous, nous voulons nous mesurer à toute l'opposition dans tous les états du pays, au bras de fer ou comme ils voudront, au taekwondo, à la boxe... comme ils voudront mais aux élections, aux élections... Puisse-t-il en être ainsi ! Après, en 2022 viennent les élections des maires dans 335 municipalités, très importantes pour le gouvernement local. Et en 2022, je dois rappeler que le 10 janvier 2022, il y aura 3 ans que je suis président...

 

Ignacio Ramonet : On peut vous révoquer...

 

Nicolás Maduro: Oui, c'est le droit au référendum révocatoire. Si quelqu'un de l'opposition veut recueillir des signatures et les recueille en respectant les démarches constitutionnelles et légales, nous, en 2022, nous pourrions avoir un référendum révocatoire, nous nous mesurerions aussi à la force du poignet.

 

Et ensuite, en 2024, qu'il pleuve, qu'il vente ou qu'il neige, au Venezuela, il y aura des élections présidentielles. Alors, nous avons un ordre du jour électoral chargé, un ordre du jour politique et au-delà de l'ordre du jour électoral, au-delà de l'ordre du jour politique, il y a un ordre du jour économique de rétablissement, il y a un ordre du jour social, il y a un ordre du jour moral de lutte contre la corruption. J'aimerais parler de tous ces sujets avec toute l'opposition et pouvoir atteindre des consensus. 

 

Maintenant, je te le dis en toute sincérité, Ramonet, tu es Franco-espagnol, tu connais très bien l'Europe. L'Union Européenne et les Gouvernements européens ont une grande part de responsabilité dans l'extrémisme de l'opposition, dans l'exclusion de l'opposition de la vie politique du pays, dans son abandon de ses espaces naturels et de ses électeurs. Pas seulement Donald Trump, parce que celle qui a soutenu Donald Trump, c'est l'Union Européenne. Elle a soutenu toutes ses politiques de barbarie, d’extrême-droite, toutes les politiques insensées, indéfendables... Le seul endroit du monde où l'Union Européenne soutient ces politiques, c'est le Venezuela. Il faudra voir pourquoi. Une bonne partie de la droite vénézuélienne, l'opposition, entre dans une politique de bon sens, de participation, de dialogue, elle est en relation avec cette Union Européenne qui influence tant les esprits de ces dirigeants politiques de ce secteur de l'opposition. Puisse l'Union Européenne leur parler de dialogue et les aider à réfléchir et à se reprendre !

 

Ignacio Ramonet : Précisément, maintenant, nous allons parler économie. Je voudrais vous demander : Depuis 1 an, votre Gouvernement a choisi de permettre une dollarisation partielle de l'économie et plus encore du commerce. Pourriez-vous faire un bilan de cette dollarisation ? Pourquoi avez-vous pris cette mesure ? Quels bénéfices a-t-elle apportée ? Quels inconvénients ? Jusqu'à quand va-t-elle être maintenue ? Et une autre question que certains analystes se posent : Révolution et dollarisation, n'y a-t-il pas contradiction ? 

 

Nicolás Maduro: Bon, d'abord, le Venezuela vit une situation très particulière. Ils persécutent toutes nos sources de financement. Je pourrais te dire, Ramonet, que pratiquement, l'empire étasunien a interdit à l'Etat vénézuélien d'utiliser le dollar... Pour que tu voies... Je raccourcis en te disant cette grande vérité : le Venezuela n'a pas le droit de vendre du pétrole au monde et d'être payé en dollars. Le Venezuela n'a pas le droit, en tant qu'Etat, de gérer des comptes pour payer des médicaments, des aliments, dans le monde... Il n'a pas le droit.

 

Nous, nous avons notre façon à nous de manier nos ressources mais elles doivent toutes être atypiques, parallèles au monde du dollar. Tout cela montre comment le dollar, comment le système bancaire étasunien sont utilisés pour essayer d'imposer un modèle économique, un modèle politique, un changement de régime au Venezuela. C'est la vérité vraie.

 

Nous sommes dans une économie de résistance, une économie de guerre. Nous, nous sommes passés de 56 000 000 000 de $ de revenus en 2013, à moins de 500 000 000 de $ de revenus pétroliers pendant cette année 2020. Que chacun tire ses conclusions. Et malgré cela, nous avons maintenu l'Etat de bien-être social conformément à notre Constitution. Ici, l'éducation publique gratuite et de qualité a été totalement maintenue pour notre peuple. Ici, on a maintenu et amélioré la santé publique gratuite et de qualité. Ici, on a maintenu le droit au logement... Nous avons le record mondial de construction et de remise de logements... Nous avons remis le 3 400 000ème logement. Nous construisons 1 095 logements sociaux par jour... Un record, un véritable record mondial. Et ici, on a maintenu le niveau des emplois.

 

Qu'est-ce qui a été détruit ? Le revenu national et le revenu des travailleurs. Le revenu des travailleurs a été atteint par les conséquences des préjudices portés à 99% du revenu national en devises.

 

Et dans tout cela, que s'est-il passé ? Une économie auparavant sournoise est apparue à présent au grand jour, publiquement, dans laquelle on utilise le dollar, surtout dans le commerce. J'ai des chiffres que je vais donner officiellement pour la première fois. Au niveau du commerce et de certaines activités, le dollar a fonctionné comme une soupape de sécurité pour le revenu, pour le commerce et pour la satisfaction des besoins de nombreux secteurs de la vie vénézuélienne... Ça a été une soupape de sécurité.

 

Mais je peux te donner des chiffres pour cette année 2020. Toute l'activité commerciale est contenue dans ces chiffres. En 2020, je peux te dire, en particulier pendant les 2 derniers mois, novembre et décembre, l'activité commerciale a quintuplé dans le pays par rapport à l'année dernière. Quintuplé en bolivars et en dollars. 

 

Maintenant, je peux te dire que, en dollars – ces données sont toutes fraîches – l'importance relative des dépenses des foyers, selon le moyen de paiement utilisé, je peux te dire que 77,3% des transactions commerciales du pays, en 2020, ont été faites en bolivars par des moyens de paiement digitaux. Pour que tu voies bien le poids que la monnaie nationale a encore et nous allons la rétablir. Seulement 18,6% ont été faits en devises convertibles liquides, essentiellement en dollars... Tu peux voir là, par exemple, qu'au mois de juin, de juillet, les paiements en devises ont augmenté de plus de 20% et quelques mais le résultat annuel reste à 18,6% de paiements en dollars en liquide dans beaucoup d'activités de centres commerciaux, même dans le commerce de rue, le commerce non officiel... Et 3,4% en bolivars physiques. Tu sais qu'ils nous font une guerre contre la monnaie physique. Nous, nous allons, pendant cette année 2021, vers une économie digitale plus profonde, plus en expansion... J'ai fixé l'objectif : 100% d’économie digitale, que tout le monde ait ses moyens de paiement par carte de débit, de crédit...

 

Ignacio Ramonet : L'argent physique disparaît , alors, dans une certaine mesure...

 

Nicolás Maduro: Il disparaît. Pour le Venezuela c'est un gros avantage. Nous allons même créer des formats de paiement en monnaie digitale avec un compte d'épargne en devises à la Banque vénézuélienne. Les comptes d'épargne et les comptes courants en devises sont autorisés et les gens pourront payer en bolivars sur le marché général du pays. Je veux dire que le dollar est une soupape de sécurité. On ne peut pas dire que le Venezuela est, comme l'Equateur, par exemple, une économie dollarisée. Elle ne dépend pas du Département du Trésor étasunien comme Panamá. Non. Le Venezuela a sa propre monnaie, le bolivar et nous allons la défendre en 2021 en augmentant les rentrées. Nous devons améliorer la qualité de la monnaie vénézuélienne. Nous devons continuer à faire baisser l'inflation qui reste très élevée bien que nous soyons arrivés à la contrôler peu à peu... mais c'est difficile à cause de toute la situation de nos rentrées d'argent... Ainsi, nous ne pouvons pas parler de dollarisation de toute l'économie. C'est pourquoi à la question : « Y a-t-il contradiction entre dollarisation et révolution ? » la réponse est non. Il y a plus complémentarité.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, le Venezuela a été victime d'un spectaculaire vol de ses actifs à l'étranger. On lui a arraché, en particulier, l'entreprise CITGO aux Etats-Unis et les réserves d'or déposées à Londres. Quelles initiatives a pris votre Gouvernement pour récupérer ces actifs ? Quelle est la situation, actuellement ? Quel espoir avez-vous de réussir à les récupérer ?

 

Nicolás Maduro: Nous avons toujours espoir parce que nous avons raison juridiquement, nous avons la raison nationale, républicaine. Il s'agit d'actifs de la République. L'or de Londres appartient à la République, il est administré par la Banque Centrale du Venezuela. Les comptes bancaires gelés au Portugal, en Espagne, en Italie, au Royaume Uni, en France, aux Etats-Unis, sont des comptes bancaires de presque 30 000 000 000 de $ qui, si on s'active et si on les récupère, constitueront une injection immédiate de revenus qui permettra de rétablir l'économie du Venezuela et de la faire renaître, juste en récupérant cet argent.

 

On nous a volé l'entreprise CITGO, une entreprise qui compte 8 000 stations services aux Etats-Unis... Elle est gelée, volée par le clan Trump, le clan Trump nous l'a volée, il a lorgné dessus dès que Donald Trump est arrivé à la présidence avec son groupe d'affaires pour nous voler CITGO... Avec la complicité de ces bandits de pacotille, ces voleurs de l'extrême-droite vénézuélienne dirigée par Juan Guaidó...Ils ont volé CITGO. Nous avons espoir de la récupérer.

 

Nous avons eu des difficultés pour défendre le Venezuela et ses intérêts parce qu'on nous empêche même de payer des cabinets d'avocats internationaux. Parce que, je le répète, on nous a gelé et volé nos comptes.

 

Mais bon, au Venezuela, nous avons toujours trouvé des moyens pour avoir de bons cabinets d'avocats, des avocats courageux, qui connaissent bien leur métier, capables... Et pour défendre nos intérêts, une nouvelle Assemblée Nationale arrive maintenant... Et l'Assemblée Nationale qui a été l'épicentre du pillage, du dépouillement, du vol du Venezuela s'en va... Cela va beaucoup changer la situation parce qu'une Assemblée Nationale avec les pleins pouvoirs législatifs arrive et je pense que cela va nous aider à avancer pour récupérer ce qui appartient à la République. Ça n'appartient pas à Maduro, non, ça n'appartient pas à un groupe, c'est le patrimoine de la République, c'est l'argent et le patrimoine de tous les Vénézuéliens.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, dans la situation économique vénézuélienne et internationale difficile actuelle, marquée par les conséquences, comme vous le dites, à la fois du blocus et de la pandémie, quels seraient les principaux problèmes à résoudre pour stimuler la croissance économique de votre pays ? Dans quelle mesure le vote récent d'une loi « anti-blocus » peut-il y contribuer ? 

 

Nicolás Maduro: Bon, nous, nous sommes entraînés à affronter les difficultés. Le Libérateur s'appelait lui-même « l'homme des difficultés. » Et nous, nous appelons notre peuple « le peuple des difficultés. » Nous avons déjà envisagé et mis en marche un plan de rétablissement qui a eu pour axe, cette semaine, la loi anti-blocus.

 

La loi anti-blocus joue le rôle d'un grand axe modèle dans le processus destiné à récupérer les revenus du pays. Et avec la récupération des revenus du pays, nous devons rétablir les facteurs et les équilibres de la macroéconomie, rétablir les revenus des travailleurs et maintenir un processus de rétablissement du marché intérieur du pays. 

 

Je peux t'indiquer une donnée importante : 2020 a été une année lors de laquelle nous avons avancé dans ce processus d'installation d'une économie alternative, d'une économie post-rentiste, une économie de production... Nous avons augmenté la production d'aliments à 400 000 tonnes, par exemple, et nous avons dépassé les niveaux de pénurie des produits et des aliments qu'il y a eu il y a 3, 4 ou 5 ans. Avec la production nationale.

 

Je veux féliciter les patrons et les producteurs, l'industrie agroalimentaire... Nous, en ce moment, nous sommes en train de mettre au point un plan pour les CLAP 2021... Aujourd'hui, j'ai approuvé le plan pour les CLAP 2021, je veux dire le marché de la nourriture mensuelle pour 7 000 000 de foyers...

 

Pour que tu nous comprennes : les CLAP, ce sont les Comités Locaux d'Approvisionnement et de Production. Ils sont un instrument essentiel du marché de la nourriture, un instrument qu'il faut sans doute améliorer, augmenter... Et nous allons en parler en janvier, le ministère de l'Alimentation, la vice-présidente exécutive... Moi, j'ai déjà approuvé les lignes de travail pour la production nationale de tous les CLAP, de tous les aliments distribués aux 7 000 000 de foyers du pays. Auparavant, nous importions 60% ou 70% de ces aliments... Alors, en 2021, avec la loi anti-blocus, nous allons rétablir le revenu national, rétablir l'équilibre macroéconomique, contenir l'inflation encore plus l'année prochaine et rétablir la croissance économique réelle, de l'économie réelle.

 

2021 marque le démarrage d'une nouvelle croissance progressive, soutenue, véritable, je te le dis, de l'économie réelle, de l'économie de production. Pas de l'économie des papiers, de la spéculation, du mensonge, de la farce, non, c'est la croissance de l'économie qui produit des céréales, du lait, de la viande, du maïs, des galettes de maïs, des vêtements, du pétrole, de l'or, etc... De l'économie réelle.

 

Je pense que toute cette cruauté qui a été appliquée au Venezuela nous a appris de grandes leçons et nous sommes montés dans les wagons du développement d'une économie propre, véritable, qui va être plus forte, plus puissante, tu verras, et en plus, nous donnons l'exemple au monde. S'ils peuvent nous interdire le dollar, s'ils peuvent nous interdire le financement et le refinancement dans le système bancaire occidental, s'ils peuvent nous persécuter et nous enlever nos comptes, cela ne nous a jamais arrêtés et ne nous arrêtera jamais. Et ce qui naît ici va montrer au monde qu'un autre monde est possible, que le chantage du dollar et du système financier du Fonds Monétaire International, ça suffit ! Au Venezuela, nous sommes en train de prouver, dans la résistance, dans une résistance très dure, qu'un autre monde est possible. Nous allons avancer, vous allez voir.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, nous allons parler maintenant de politique internationale et nous allons commencer par parler de l'Amérique Latine. Quelque chose est en train de changer en Amérique Latine. Aux Gouvernements progressistes du Mexique et de l'Argentine sont venus s'ajouter la récente victoire du MAS en Bolivie, le succès du plébiscite au Chili, la défaite de Bolsonaro aux municipales, au Brésil, la révolte populaire au Pérou, les protestations au Guatemala et en Colombie, les perspectives de victoire raisonnables du candidat Araúz aux prochaines présidentielles en Equateur et l’écrasante victoire du chavisme aux élections législatives du 6 décembre au Venezuela... Tout cela crée une atmosphère très différente de celle qui existait il y a peu quand certains parlaient de « fin du cycle progressiste. »... Comment voyez-vous la situation géopolitique de l'Amérique Latine en cette année 2021 qui débute ?

 

Nicolás Maduro: Bon, je peux dire que nous, les mouvements populaires radicaux de lutte, ce qu'on appelle les mouvements progressistes, les mouvements de gauche, les mouvements révolutionnaires, nous sommes une réalité en Amérique Latine et dans les Caraïbes. Nous sommes l'alternative de nos peuples, chacun avec son profil, ses caractéristiques, son discours, sa direction... On ne peut pas, par exemple, comparer la direction des mouvements populaires en Colombie avec celle de l'Equateur, du Venezuela, ou du Brésil... Chacune a son profil, sa texture, sa stratégie, son discours, son courage, ses opportunités mais, sans aucun doute, du Mexique à la Patagonie et dans toutes les Caraïbes, il existe un puissant mouvement populaire contestataire rebelle radical. Il existe un puissant mouvement progressiste et un puissant mouvement de gauche. Il existe un puissant mouvement révolutionnaire. A l'avant-garde, il y a l'ALBA, l'Alliance Bolivarienne pour les Peuples de Notre Amérique. La victoire en Bolivie a été une grande victoire de l'ALBA et bon, ce qui a été une grande alliance pour la paix, le développement social, la vie de nos peuples, va se recomposer. Ils sont à l'avant-garde, sans aucun doute : Cuba, le Nicaragua, le Venezuela, la Bolivie, les Caraïbes avec les dirigeants de Saint Vincent et les Grenadines, d'Antigua et Barbuda, de la Dominique, de la Grenade... La grande alliance profonde, véritable, qui s'est maintenue face aux menaces, en toutes les circonstances.

 

L'ALBA est toujours restée debout. L'ALBA s'est levée suite à la première vague qu'a dirigée Chávez pendant cette ère, la première vague qui a conduit à la rencontre historique de Chávez et de Fidel qui a amené le retour du sandinisme au pouvoir, qui a conduit à la victoire d'Evo, de Correa, qui a amené la victoire de Kirchner... Bon, de cette première vague est née l'ALBA et elle est là, ferme, forte... Et maintenant, sans aucun doute, je vois venir une seconde vague. La seconde vague de Gouvernements progressistes, populaires, nationalistes, latino-américanistes... Une seconde vague arrive, en plein développement. Pourquoi cette seconde vague arrive-t-elle ? Parce que le capitalisme néolibéral s'est épuisé... Le capitalisme néolibéral, ce qu'il provoque, c'est la pauvreté, l'exclusion, la répression... Nous le voyons au Chili, au Pérou, en Equateur, en Colombie, toute l'aile du Pacifique : répression, misère, chômage... En Colombie, cette année, plus de 90 massacres... Plus de 250 ex-combattants des FARC assassinés... Et que disent les médias ? Que dit le monde ? Ils se taisent... Donc, le modèle répressif, anti-populaire, excluant et générateur de misère, le capitalisme néolibéral n'a pas de réponse pour les peuples... C'est un épuisement très profond et ce qui est naturel, c'est que de nouvelles directions qui surprendront non seulement l'Amérique Latine et les Caraïbes mais le monde entier surgissent.

 

Nous allons vers une seconde vague, je ne le dis pas simplement par optimisme mais parce que j'y crois. Je suis un homme optimiste, un homme de foi, de foi dans les peuples, de foi dans la lutte, de foi dans l'histoire de nos pays. Je le dis parce que j'ai observé directement la réalité et à cause des données que toi aussi, tu as apportées dans ta question.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, pendant ces dernières années, à mesure que l'hostilité de Washington et de nombreuses capitales européennes envers le Venezuela s'accentuait, votre Gouvernement a resserré les liens avec certaines puissances comme la Chine, la Russie, l’Iran, la Turquie, l'Inde et d'autres qui ont défendu la souveraineté du Venezuela. Pourriez-vous nous dire quelles sont les perspectives de coopération et les projets de développement avec ces puissances ?

 

Nicolás Maduro: Nous, nous sommes ouverts au monde. Sans aucun doute, nous avons des relations particulières avec la Fédération de Russie, avec la République Populaire de Chine, avec la République Islamique d’Iran, avec Cuba... Nous avons aussi des relations particulières avec l'Inde. On connaît ma grande identité avec l'Inde, avec sa spiritualité, avec son peuple... Et avec beaucoup d'autres pays. Avec la Turquie, avec mon frère, le président Erdogan... Et avec l’Afrique, nous avons de grandes et d'excellentes relations avec de nombreux pays du monde.

 

 

 

 

Nous, nous voulons que ces relations se renforcent, nous allons continuer à y travailler. Grâce à la loi anti-blocus, on a déjà avancé de façon spectaculaire dans de nouvelles alliances dans divers domaines de l'investissement dans l'économie... Je ne peux pas dire grand-chose, c'est ce qui caractérise la loi anti-blocus, faire sans dire et dire quand ça a déjà été fait. C'est le principe : faire, faire, faire, avancer sans rien dire pour échapper à la guerre impérialiste, la neutraliser et dire ensuite, quand tout a déjà été consommé et fait, quand ici, on a en mains la réussite. Maintenant, sur cette même ligne de la loi anti-blocus, j'invite les investisseurs d'Amérique Latine, du Mexique, de Panamá, nos frères investisseurs de Colombie, du Brésil, de l'Argentine, de toute l'Amérique Latine et des Caraïbes, des Etats-Unis : venez, ici, il y a un monde pour investir dans des conditions particulières... Si quelqu'un a causé du tort à certains investisseurs, aux détenteurs de dettes des Etats-Unis, si quelqu'un leur a fait du tort, c'est Donald Trump et sa politique aveugle et extrémiste contre le Venezuela.

 

Parce que les portes sont ouvertes aux investisseurs des Etats-Unis pour qu'ils investissent dans le pétrole, dans le gaz, dans la pétrochimie, dans les télécommunications, dans le tourisme, dans les finances, dans tout ce qu'ils veulent. Trump a causé un grand tort aux détenteurs de dettes... Et je peux te dire aussi, en exclusivité, que nous, aux détenteurs de dettes, grâce à un engagement de la République, nous leur avons payé plus de 76 000 000 000 de $ pour la période 2014-17. Et avec le commandant Chávez, dans la période 2010-2013, nous sommes arrivés à payer jusqu'à 56 000 000 000 de $... Fais le compte, comme dit l'un de mes amis, fais le compte : 76 000 000 000+ 56 000 000 000, ce sont 132 000 000 000 de $ que nous avons payés de 2010 à 2017 jusqu'à l'arrivée de Trump...

 

C'étaient les bénéfices des investisseurs financiers... Les détenteurs de dettes ont tout perdu quand ils nous ont gelé nos comptes, quand ils ont attaqué nos revenus du pétrole... Je leur ai réaffirmé, à tous les détenteurs de dettes, à tous les investisseurs étasuniens, que nous étions prêts à négocier et à renégocier et à respecter tous nos engagements d'avance. Arriver à des accords... nous avons les meilleures relations... Ils savent que nous, nous sommes de bons payeurs, que nous sommes des gens de parole, fiables pour l'activité financière, économique, ils le savent et ils savent que Trump a causé un grand tort à leurs investissements, ils le savent parfaitement.

 

Il y a des investisseurs, Ramonet, qui représentent même des groupes, des syndicats de retraités étasuniens, des groupes sociaux des Etats-Unis qui ont acheté, à cause de leur fiabilité, des bons de la dette vénézuélienne et maintenant, regarde, Trump les a brisés, Trump les a détruits. Un autre monde est possible même dans ce domaine.

 

Alors, je leur envoie un message, je profite de ta question pour envoyer un message à tous les investisseurs du monde : nous sommes prêts, préparés, nous avons la loi anti-blocus, une nouvelle Assemblée Nationale qui va mettre en place un ensemble de lois destiné à assouplir tout ce qui concerne l'investissement dans l'activité économique vénézuélienne. Le Venezuela est ouvert au monde pour l'investissement.

 

Ignacio Ramonet : Monsieur le Président, précisément, la récente défaite électorale de Donald Trump aux Etats-Unis et l'arrivée imminente du nouveau Gouvernement démocrate du président Joe Biden constituent un moment particulier de changement dans la vie politique internationale. Qu'attendez-vous de ce nouveau Gouvernement étasunien ? Quel message de bienvenue envoyez-vous à Joe Biden ?

 

Nicolás Maduro: A ce sujet, je suis obligé d'être prudent... Je ne veux pas dire que je n'aie pas une pensée claire, je l'ai, à propos des changements aux Etats-Unis, à propos de la défaite écrasante de Donald Trump. Trump s'en va… Nous allons voir si avec le départ de Trump ses politiques nocives et extrêmes contre le Venezuela s'en vont aussi... Nous allons voir... Il y a beaucoup de lobbies. J'ai eu une information hier, à propos de ce voleur et de cet assassin qui s'appelle Leopoldo López: il est en train d'engager, à Washington, 2 entreprises de lobbying proches du parti démocrate pour qu'elles commencent à faire du lobbying en faveur de l'extrême-droite vénézuélienne auprès du nouveau Gouvernement de Biden. Tu sais que la politique des Etats-Unis se fait sur la base du lobbying. C'est même légal... Maintenant, ils engagent de nouveaux lobbyistes liés à Biden, liés au nouveau secrétaire d'Etat [Anthony Blinken] désigné par Biden, et bon, nous allons attendre le 20 janvier, que le président Joe Biden prête serment et nous, nous suivons notre route.

 

Je l'ai toujours dit : puissent ses politiques extrémistes, cruelles, contre le Venezuela partir avec Trump ! Puisse-t-il en être ainsi et que le dialogue avec Biden et avec les Etats-Unis se rétablisse en fonction d'un ordre du jour constructif. Pendant ce temps, nous espérons , dans les mains de dieu, nous dépendons de nos propres efforts... Je l'ai toujours dit aux Vénézuéliens et aux gens du monde : nous ne dépendons de personne, nous dépendons toujours de nos propres efforts, nous dépendons de notre propre pensée, de nos propres paroles, le reste, c'est en plus, comme dit notre peuple. Puisse-t-il être pour le bien, le changement aux Etats-Unis, pour l'humanité, et puisse-t-il être aussi pour le bien du Venezuela! C'est ce que je souhaite.

 

Ignacio Ramonet : Merci, Monsieur le Président, nous sommes arrivés à la fin de cette interview. Il ne me reste qu'à vous souhaiter une bonne année à vous, à votre famille et, évidemment, au Venezuela et à toute sa population.

 

Nicolás Maduro: Bon, merci beaucoup pour cette opportunité face à l'avalanche de mensonges, de manipulations, d'attaques dans la presse mondiale... Moi, je vois tout le temps, dans la presse et à la télévision de Madrid, des attaques et des attaques... Madrid est devenu l'épicentre de l'attaque d'extrême-droite contre le Venezuela, on lit le "New York Times", le "Miami Herald", la presse colombienne et la presse dans le monde en général : des attaques impitoyables, incessantes, cruelles... Mais bon, notre vérité est là et nous donnons notre vie pour notre vérité et avec notre vérité, nous allons par les chemins vers l'avenir.

 

2021, va être le bicentenaire de la bataille de Carabobo , va être une année symbolique. Le commandant Chávez lui-même disait: "En 2021, 200 ans après Carabobo, nous devons être libres, indépendants et souverains. » Et nous y arrivons libres, indépendants et souverains, en résistance mais toujours dans la victoire. Bonne année.

 

Ignacio Ramonet : Merci, Monsieur le Président, nous nous donnons rendez-vous le 1er janvier 2022.

 

Nicolás Maduro: Prêt, d'accord.

 

(Caracas, 30 de diciembre de 2020.)

 

(Diffusée par VTV et Telesur le soir du 1er janvier 2021. Transcription de l'interview télévisée pour Cubadebate et Le Monde Diplomatique)

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/especiales/2021/01/02/entrevista-al-presidente-nicolas-maduro-aspiro-a-la-reconciliacion-de-los-venezolanos/

URL de cet article:

http://bolivarinfos.over-blog.com/2021/01/venezuela-interview-du-president-nicolas-maduro-j-aspire-a-la-reconciliation-des-venezueliens.html