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Equateur : La droite colombienne se mêle des élections

23 Février 2021, 17:59pm

Publié par Bolivar Infos

Par Juan Manuel Boccacci

 

La revue Semana a établi un lien entre le groupe de guérilléros ELN et le corréisme. Les procureurs des 2 pays se sont rapidement agités et une enquête est en marche en Equateur. Arauz dit qu'il s'agit d'une fausse information destinée à empêcher son binôme de se présenter aux élections.

 

7 jours avant le premier tour, la revue colombienne Semana a publié des documents obtenus par le renseignement militaire colombien qui lient le groupe guérilléro Armée de Libération Nationale (ELN) au parti de l'ex-président Rafael Correa. Une fois l'élection passée, avec le candidat Andrés Arauz en ballotage, le procureur général de la Colombie, Francisco Barbosa, s'est rendu à Quito pour apporter des informations à son homologue équatorien, Diana Salazar. Correa et Arauz disent qu'il s'agit d'un nouveau chapitre d'une tentative destinée à proscrire leur force politique du second tour du 11 avril. Déjà en 2008, la Colombie avait fait appel à des archives militaires secrètes pour établir un lien entre le corréisme et les FARC. Pour le sociologue colombien Javier Calderón Castillo, il s'agit d'un “lawfare ressassé” qui, cette fois, a trouvé à l'étranger son débouché médiatique.

 

Coopération internationale

 

Selon Semana, l’information qu'ilsont publiée avait été obtenue par les Forces Armées colombiennes après une opération menée à bien dans la forêt de Chocó, le 25 octobre 2020. Les documents avaient été extraits de dispositifs appartenant au guérilléro Andrés Felipe Vanegas Londoño, alias Uriel, membre de l'ELN abattu. Là, isl avaient trouvé plus de 3 tétra-bytes d'informations digitales dans lesquelles Uriel rendait compte de sa gestion. Parmi ces informations un soi-disant « prêt-apport » à la campagne de l'Union pour l'Espoir (UNES), le parti du candidat Arauz. « Peut-être me parleront-ils du capital remis au binôme par l'homme du papillon du sud MS après le sommet mondial de l'internationale progressiste, » aurait écrit le guérilléro, selon Semana. « Le papillon » renvoie au logo de l'UNES et l'apport aurait été de 80 000 $.

 

Le média colombien a aussi pub lié un enregistrement audio sur lequel ils ont identifié la voie d'Uriel. Le guérilléro commente un dialogue qu'il a eu avec Correa mais il n'y a aucune indication sur les circonstances dans lesquelle sil a eu lieu. L'ex-président lui aurait demandé de rencontrer une personne avec un profil technique précis pour soi-disant la placer dans son Gouvernement. La publication de cette information dans la presse colombienne a suffi pour que le procureur équatorien demande à son homologue une copie de ces archives. Salazar a justifié sa demande par le « financement supposé de la campagne du candidat à la présidence de la République Andrés Arauz par l'ELN. » Le procureur colombien Francisco Barbosa s'est déplacé le 12 pour lui remettre les documents en mains propres.

 

Le bras rapide de la justice

 

Consulté sur ces révélations, Correa a soutenu qu'il ne connaissait pas Uriel et a critiqué la rapidité avec laquelle les procureurs se sont agités. « Quand on assassine 3 journalistes équatoriens en Colombie, on n'agit pas si rapidement (…) Ils continueront leur cirque sur le financement de l'ELN pendantle seocnd tour, » a-t-il écrit sur Twitter.

Arauz a dit qu'il s'agissait d'une fausse infirmation : « Tout ce bobard n'a qu'une seule intention : empêcher que le binôme Arauz-Rabascall participe au second tour. »

 

Pour le sociologue Javier Calderón ces éléments permettent d'ajouter un nouveau facteur à la théorie du lawfare: m'orchestration directe par l'intermédiaire d'un média étranger. « On n'a engagé une procédure judiciaire contre personne à l'intérieur du corréisme en Colombie. C'est un docuement révélé et nous ne savons pas s'il a été conçu par le renseignement militaire colombien pour se mêler des élections en Equateur, » a-t-il déclaré et il a ajouté que la f-gestion de l'information par des militaires ne procure aucune sécurité concernant la chaîne de protection que doivent suivre ces archives : « Ils utilisent cette sorte de matériel pour construire de « faux positifs » judiciaires et dans ce cas, pour poursuivre la guerre judiciaire contre le corréisme. »

 

Calderón souligna aussi que Semana a effectué un tournant éditorial depuis que la famille Gilinski est devenue actionnaire majoritaire de la revue : « Ils possèdent le second groupe économique le plus important du pays. Ils sont liés au système financier, ils sont les patrons de banques et de corporations internationales, ils ont des affaires et des relations avec Guillermo Lasso, » indique le sociologue. Lasso, le patron historique de la Banque de Guayaquil, est le candidat du front CREO qui affrontera Arauz au second tour. La croissance des Gilinksi à Semana a amené la démission de plus d'une dizaine de journalistes qui travaillaient à ce média depuis longtemps : « La revue a été mise en pièces. Elle n'était pas progressiste mais très plurielle. Aujourd'hui, elle reste dans les mains d'un groupe de droite, » indique le sociologue. 

 

Un nouveau scénario

 

En 2008 aussi, les Forces Armées colombiennes avaient signalé des liens entre le corréisme et un groupe insurgé. Cette fois, il s'agissait d'informations trouvées dans des ordinateurs de l'un des dirigeants des FARC, Raúl Reyes, «également abattu au cours d'une opération. Ce fait avait eu une large répercussion puisque le Gouvernement de Correa avait dénoncé le fait que les militaires colombiens étaient entrés en territoire équatorien pour mener à bien cette opération. Cela n'a pas empêché le président de l'époque, Álvaro Uribe, d'utiliser ces archives pour dénoncer les liens entre les politiciens et le groupe armé. Parmi les politiciens, Correa. En fait, on a dit que la guérilla avait fait un apport à sa campagne électorale. Ensuite, la Cour Suprême de Justice de la Colombie a invalidé l'utilisation de cette information. Pour elle, celle-ci avait été obtenue illégalement et elle avait aussi remis en question la gestion des archives par le renseignement colombien. 

 

Des documents diplomatiques des Etats-Unis révélés en 2010 par WikiLeaks ont fait connaître ce que le Gouvernement d'Uribe envisageait de faire avec cette information avant qu'elle sore au grand jour. Un câble de l'ambassade de mai 2008 rend compte des conversations qu'ont eues Juan Manuel Santos, alors ministre de la Défense et l'ambassadeur des Etats-Unis. Santos raconte que le Gouvernement colombien avait planifié de distribuer les archives de Reyes à certains médias pour les utiliser contre l'Equateur et Cuba.

 

En 2018 l'actuel président de l'Equateur, Lenín Moreno, avait demandé de rouvrir l'affaire contre Correa concernant le soi-disant financement des FARC. Cette fois, il s'est basé sur une vidéo qui mettait soi-disant en évidence la collaboration. Interrogé par Página/12, l'avocat Fausto Jarrín qui assurant la défense de l'ex-président de l'Equateur dans plusieurs affaires, a déclaré qu'aucune de ces procédures n'a réussi à dépasser les enquêtes préliminaires : « C'étaient des affaires provoquées pour essayer d'inonder de peur l'opinion publique. C'est ce que fait la droite. »

 

Dans les semaines qui ont précédé les élections de cette année, il y a eu une avalanche de fausses informations contre le candidat corréiste. Par exemple, le journal Clarín a publié un article qui parlait d'une fausse vidéo qui circulait sur les réseaux sociaux. C'est dans ce cadre qu'est apparue la publication de Semana. Il faudra attendre pour voir si un nouvel élément surgit au moment du second tour. Ce qui est sûr, c'est que nous sommes face aux des élections les plus hasardeuses qu'ait vécu l'Equateur depuis longtemps.

 

traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2021/02/22/colombia-la-derecha-se-mete-de-lleno-en-las-elecciones-de-ecuador/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2021/02/equateur-la-droite-colombienne-se-mele-des-elections.html