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Venezuela : Audition de S.E. M. Hector Michel Mujica Ricardo, ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela au Sénat 

25 Février 2021, 18:15pm

Publié par Bolivar Infos

M. Christian Cambon, président. - Nous recevons aujourd'hui l'ambassadeur Hector Michel Mujica Ricardo, une semaine après avoir entendu M. Juan Guaidó, qui est reconnu par de nombreux États, et notamment par la France, comme « président de transition, en charge de mettre en oeuvre un processus électoral ». Nous sommes, monsieur l'ambassadeur, au lendemain des élections législatives qui ont renouvelé dans votre pays l'Assemblée élue en 2015, élections auxquelles une partie de l'opposition - rassemblée autour de M. Guaidó - a refusé de participer, et qui ont été remportées, sans grande surprise, par la coalition soutenant le président Maduro.

 

Je vous remercie d'avoir accepté l'invitation de notre commission, qui est ouverte au débat et au dialogue. En effet, lorsque des confrontations émergent, nous essayons d'entendre l'ensemble des parties afin de nous faire une idée, même - et surtout - lorsque les points de vue divergent. Nous avons ainsi reçu la semaine dernière l'ambassadrice d'Arménie et l'ambassadeur d'Azerbaïdjan, pour les entendre sur la question du Haut-Karabagh. 

Comme vous le savez, les États-Unis, l'Union européenne et de très nombreux pays sud-américains ont rejeté lundi les résultats des élections législatives au Venezuela. Le chef de la diplomatie américaine, M. Mike Pompeo, a jugé que le scrutin de dimanche était « une farce politique », et il a indiqué que les États-Unis allaient « continuer à reconnaître » l'opposant Juan Guaidó comme « président par intérim » du Venezuela. De plus, le chef de la diplomatie européenne, M. Josep Borrel, a fait cette déclaration : « Le manque de respect du pluralisme politique, la disqualification et la poursuite des dirigeants de l'opposition ne permettent pas à l'Union européenne de reconnaître ce processus électoral comme crédible, inclusif ou transparent, et ses résultats comme représentatifs de la volonté du peuple vénézuélien ». Pour le Royaume-Uni, ces élections sont « profondément entachées d'irrégularités ». Quant au groupe de Lima - alliance de seize pays, dont le Canada, le Brésil, la Colombie, le Chili et le Pérou -, il a appelé à « soutenir les efforts pour le rétablissement de la démocratie au Venezuela », critiquant le manque de « transparence » et l'absence « d'observateurs internationaux ». 

Le prononcé de ces prises de position n'est sans doute pas très agréable pour vous mais, une fois encore, nous sommes là pour vous entendre et pour dialoguer. Le Venezuela est un grand pays, avec lequel nous avons des liens profonds, mais il est frappé par une crise économique et sociale dramatique, 80 % de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté, et n'ayant plus accès aux biens et services essentiels. Quel peut être l'impact de ces élections sur la situation de votre pays, et que vont-elles changer au quotidien des Vénézuéliens ? 

Par ailleurs, comment interprétez-vous l'abstention massive - 69 % - des électeurs à cette occasion ? Comment le pouvoir du président Maduro entend-il réagir face à la consultation populaire menée à partir d'aujourd'hui par l'opposition « non-officielle » emmenée par Juan Guaidó ? 

Les rapports du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme font aussi le constat de graves violations des droits économiques, sociaux, civils, politiques et culturels dans votre pays. Le président Guaidó a chiffré ici même à 382 le nombre de prisonniers politiques ; le gouvernement du président Maduro se porte-t-il garant de la sécurité de celles et ceux qui ne sont plus parlementaires, ayant refusé de participer à ces élections, et qui ne seront plus protégés par leur immunité ? Quel statut a été donné à l'opposition ? J'insiste sur ce point, monsieur l'ambassadeur, car, à chaque fois que des parlementaires sont poursuivis, quels que soient le pays et le camp concernés, nous sommes très attentifs. Les parlementaires ont un droit sacré et cela vaut aussi pour ceux qui ne le sont plus. S'en prendre à eux est pour nous quelque chose de parfaitement insupportable. 

Le président Maduro a affirmé vouloir rétablir « un dialogue décent et suivi » avec la nouvelle administration américaine, qui prendra ses fonctions le 20 janvier prochain. Qu'attend-il précisément de ce dialogue ? Qu'est-il prêt à faire pour le faciliter ? Des contacts ont-ils déjà été établis avec la nouvelle administration ? 

Je vous cède la parole pour une quinzaine de minutes, et mes collègues vous poseront ensuite quelques questions. Je suis conscient que l'exercice n'est pas simple, mais nous mettons un point d'honneur à donner la possibilité à chacun de s'exprimer. Je précise enfin qu'avec votre accord, cette audition est filmée et retransmise en direct sur le site du Sénat. 

 

M. Hector Michel Mujica Ricardo, ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela auprès de la République française et des Principautés de Monaco et Andorre. - Merci de m'accueillir dans cette enceinte prestigieuse, et de me donner la possibilité de partager avec vous mon analyse sur la situation de mon pays au lendemain des élections. Je suis d'autant plus sensible à votre invitation que les occasions sont rares de pouvoir s'exprimer, notamment en France. Pourtant, la crise vénézuélienne est complexe, s'explique par une multitude de facteurs, internes et externes, et il me semble que l'on doit d'abord rappeler les faits pour procéder à une analyse sérieuse et rigoureuse. 

Tout d'abord, pour mieux comprendre les enjeux de cette élection, je tiens à préciser qu'il s'agit du 25ème scrutin organisé par notre pays depuis le début de la révolution bolivarienne ; rares sont les pays du monde à avoir organisé autant d'élections depuis vingt ans. Par ailleurs, je rappelle qu'à deux reprises au moins, l'exécutif s'est incliné devant le vote populaire : une première fois en 2007, lorsque le peuple vénézuélien a rejeté par referendum une réforme constitutionnelle, et une seconde fois en 2015, lors des précédentes législatives, au cours desquelles l'opposition est devenue majoritaire au Parlement. 

Le Venezuela est une démocratie multipartite, dont le président est élu au suffrage universel, pour un mandat de six ans renouvelables. Son élection s'effectue lors d'un scrutin uninominal majoritaire à un tour et, en 2018, Nicolás Maduro a été réélu avec 67,8 % des voix. Différents candidats s'étaient présentés et son principal adversaire, Henri Falcón, a obtenu 20 % des voix. De nombreux observateurs internationaux - parmi lesquels l'ancien président du Sénat Jean-Pierre Bel ou l'ancien président du gouvernement espagnol, José Luis Rodríguez Zapatero -, ainsi que la plupart des gouvernements étrangers ont reconnu la régularité de ce processus électoral. Je rappelle aussi que la Constitution vénézuélienne prévoit un contrôle du processus électoral, exercé par un Conseil national électoral, indépendant de l'exécutif. Pour mémoire, selon la Fondation Carter, le processus électoral vénézuélien est l'un des meilleurs au monde. 

Après la prise de fonctions officielle de Nicolás Maduro pour son deuxième mandat, en janvier 2019, le député Juan Guaidó est devenu président de l'Assemblée nationale, puis s'est déclaré président de la République par intérim le 23 janvier 2019, comme s'il y avait une quelconque vacance du pouvoir. Cette crise a provoqué manifestations et conflits. 

M. Guaidó a immédiatement été reconnu par l'Assemblée nationale vénézuélienne, contrôlée par l'opposition, et par les États-Unis. En effet, la Maison-Blanche avait soutenu et financé sa campagne, avec des moyens considérables. Dans le sillage des États-Unis, un certain nombre de pays ont à leur tour reconnu M. Guaidó, dont la France et quelques pays de l'Union européenne. Cependant, l'immense majorité des pays d'Afrique, d'Asie, du Proche-Orient, la Russie, la Chine, l'Iran, l'Inde et la moitié des pays d'Amérique latine et des Caraïbes, soit la majorité de la communauté internationale, représentée par l'Organisation des Nations unies (ONU) fondée sur le respect du droit international public, et par la voix de son Secrétaire général António Guterres, ne reconnaissent que le gouvernement légitime et légal du président Nicolás Maduro. 

Je souhaiterais à ce stade compléter vos informations sur la personnalité et la trajectoire de Juan Guaidó, que votre commission a entendu la semaine dernière. Depuis bientôt deux ans, il multiplie les coups de force médiatiques et les opérations factieuses, qui n'ont cependant abouti à rien de concret face au gouvernement vénézuélien, malgré le soutien massif de l'administration Trump. M. Guaidó s'est autoproclamé président sur la base de deux articles de notre Constitution. En effet, il n'avait ni les pouvoirs, ni les moyens, ni la légitimité pour exercer de telles fonctions. Il a prétendu « libérer le pays » via un prétendu corridor humanitaire à la frontière de la Colombie en février 2019, ce qui devait être le prélude de sa prise de pouvoir. Par ailleurs, il souhaitait une intervention militaire états-unienne, sous couvert d'une prétendue crise humanitaire, et l'administration Trump avait indiqué que toutes les options étaient sur la table, sous-entendant la possibilité d'une solution militaire. Rien de tout cela ne s'est produit malgré les prédictions de Juan Guaidó. 

De février à mars 2019, accompagné par un sous-secrétaire d'État de l'administration Trump, Juan Guaidó a effectué une tournée en Amérique latine. Il n'a jamais expliqué ni justifié l'origine des fonds considérables qui ont été nécessaires à l'organisation de ses 91 voyages hors du territoire national. Il a également été à l'origine d'une tentative de soulèvement militaire le 30 avril 2019, qui s'est soldée par un nouvel échec et sa convocation par la justice vénézuélienne, pour des accusations de tentative de putsch et tentative d'assassinat contre le président Maduro. En janvier 2020, il a essayé de se faire réélire à la tête de l'Assemblée nationale, mais son concurrent Luis Parra est devenu président à sa place. De plus, M. Guaidó a été associé à une tentative avortée de débarquement de mercenaires américains sur les côtes vénézuéliennes en mai 2020, tentative soutenue par la CIA, dans le but d'assassiner le président Maduro et ses principaux collaborateurs. Selon certaines preuves, cette opération a été réalisée sur la base d'un contrat, signé par Juan Guaidó, ordonnant l'invasion du Venezuela par la mer, dans le cadre d'une opération appelée « Gedeon ». Par ailleurs, la tête de Nicolás Maduro, principale cible de cette opération, a été mise à prix par Washington pour un montant de 15 millions de dollars. Enfin, Juan Guaidó est visé pour diverses affaires de corruption. Neuf députés de l'opposition font aussi l'objet de poursuites judiciaires, visés par une enquête du Parquet vénézuélien pour sabotage, à la suite d'une panne électrique dont le pays a été victime. Il a également été vu en compagnie d'un groupe de narcotrafiquants et de paramilitaires colombiens, comme vous pouvez le voir sur ces images (M. l'ambassadeur fait projeter des photographies.) L'homme qui accompagne ici M. Guaidó contrôle le trafic de cocaïne au nord de Santander, en Colombie. 

Les États-Unis s'appuient sur une petite frange de l'opposition représentée par Juan Guaidó. Contestant le suffrage universel, ces opposants extrémistes n'essaieront jamais de conquérir le pouvoir par les urnes. Mais ce qui est vraiment en jeu, c'est la profonde volonté d'indépendance du peuple vénézuélien, qui rejette la doctrine Monroe de 1823, réécrite sous la présidence de Donald Trump. Néanmoins, le Venezuela attire les convoitises, en raison de ses réserves pétrolières, supérieures à celles de l'Arabie saoudite.

Sous les administrations Bush, Obama et Trump, les agressions contre notre pays ont été multiformes. Des sanctions ont été prises, notamment contre la compagnie nationale Petróleos de Venezuela SA (PDVSA), sachant que les revenus de l'État et du peuple vénézuéliens proviennent à 90 % de cette compagnie. D'ailleurs, le Trésor américain a interdit à PDVSA de commercer avec des entités américaines, et a gelé ses avoirs à l'étranger. Surtout, les raffineries de Citgo, filière de PDVSA aux États-Unis qui alimente la plupart des stations-service de ce pays depuis une trentaine d'années, ont été volées. Enfin, plus de 1,7 milliard de dollars sont bloqués au Portugal par la Novo Banco, contrôlée par des capitaux financiers américains. Il s'agit d'une prise de contrôle progressive et ordonnée des actifs du Venezuela, en tant qu'État indépendant. C'est le cas pour le pétrole, mais aussi pour une partie des réserves en or détenues par la banque d'Angleterre. 

L'organisation des élections de dimanche dernier a fait l'objet d'un dialogue national, associant les partis soutenant le Gouvernement et une bonne partie de l'opposition qui accepte le jeu démocratique. Ce dialogue a notamment permis d'introduire une part de proportionnelle, et de faire passer de 167 à 277 le nombre de sièges à pourvoir. De très nombreux partis politiques étaient représentés, à travers plus de 14 000 candidats, et des machines à voter ont été utilisées. Ce scrutin s'est déroulé en présence de nombreux observateurs internationaux, venus de tous les pays. Notre système électoral est impeccable, et il est contrôlé par le Conseil national électoral, dans lequel siègent deux membres de l'opposition, trois membres soutenant le Gouvernement, et dont la présidente est indépendante. 

J'ignore comment on peut accuser mon pays d'être une dictature. Comment on peut accuser le président Nicolás Maduro, un homme qui a toujours été prêt au dialogue, d'être un terrible dictateur. Quelles seraient les conséquences si un homme politique s'autoproclamait président par intérim dans un pays de l'Union européenne ? Cette action n'a aucune légitimité. Cependant, le dialogue et la communication sont essentiels. Comme l'a rappelé le président Cambon, nous avons des idéologies opposées, mais cela ne doit pas nous empêcher de communiquer. Et, dans les moments les plus difficiles, la politique et la diplomatie doivent nous permettre de discuter et de trouver des solutions. Et, à ce titre, la déclaration du chef de la diplomatie européenne, qui tente à tout prix de rendre le dialogue impossible, me semble abominable. Dans n'importe quel pays, des actions telles que celles qu'a menées Juan Guaidó auraient conduit leur auteur en prison depuis bien longtemps. 

J'étais petit en 1964, quand le président de Gaulle est venu au Venezuela, mais j'en garde encore l'image. Mon père était francophile, je suis né en France en 1949, mon père était communiste et gaulliste à la fois, écrivain, directeur et fondateur de l'école de journalisme du Venezuela. Dans son bureau, il avait affiché deux grands posters : un de Lénine, et un de Charles de Gaulle. Les camarades lui demandaient tous comment c'était possible, mais c'est en fait assez simple. Charles de Gaulle était un grand patriote. Lors de votre audition de la semaine dernière, vous avez fait référence à cette célèbre tournée du général de Gaulle en Amérique latine. Et vous avez noté que le Venezuela de 2020 n'est plus celui de 1964. Vous avez raison, mais permettez-moi de vous dire que la France de 2020 n'est plus celle de 1964. Lors de cette magnifique tournée de trois semaines, le général de Gaulle a prononcé de très beaux discours, que j'ai relus, et dans lesquels il définissait les grands principes de la politique française en Amérique latine : défense inébranlable des indépendances nationales, respect des souverainetés nationales, non-ingérence dans les affaires intérieures, refus de la double hégémonie des États-Unis et de l'Union soviétique. C'est un fait : la France de 2020 n'est plus celle de 1964. Et si je devais comparer une personnalité vénézuélienne au général de Gaulle, puisque l'un de vos sénateurs s'est avancé sur ce terrain lors de votre précédente audition, le choix du commandant Hugo Chávez me semblerait le plus pertinent. Militaires tous les deux, officiers rebelles avant d'accéder au pouvoir, fondateurs des Cinquièmes Républiques française et vénézuélienne, catholiques fervents, adeptes des liens directs avec le peuple et partisans du referendum, sans être toujours suivis. Je vous remercie pour votre accueil et suis prêt à répondre à vos questions. 

 

M. Christian Cambon, président. - Merci, monsieur l'ambassadeur, du courage dont vous faites preuve en exposant vos positions. Je vous rassure, toutes les sensibilités sont présentes autour de cette table, la commission n'ayant pas d'orientation particulière et représentant les diverses sensibilités de cette maison, ce qui nous honore. Je souhaiterais commencer par vous poser une courte question : des pourparlers ont eu lieu, à Oslo d'abord, puis aux Antilles ; y a-t-il encore des discussions en cours entre les deux parties ? 

 

Héctor Michel Mujica Ricardo. - Le dialogue continue, et pas seulement à Oslo ou en Martinique. Nous essayons même de discuter avec certaines personnalités de l'administration Trump. Le dialogue est primordial, car nous sommes sous la pression continue des États-Unis qui, en détruisant l'économie vénézuélienne, souhaitent avant tout détériorer au maximum les conditions de vie de la population. L'ancien ambassadeur des États-Unis au Venezuela, William Brownfield, a déclaré qu'il fallait anéantir l'économie vénézuélienne par tous les moyens et, quand le journaliste qui l'interviewait lui a fait remarquer que ces propos étaient un peu durs pour la population, l'ambassadeur a répondu qu'il fallait éradiquer le chavisme à tout prix. 

 

Il ne faut pas réduire le chavisme au président Maduro ou à Diosdado Cabello, car il est avant tout l'expression d'une manifestation populaire, de valeurs républicaines, de la pensée de Simon Bolivar, et d'un imaginaire populaire internalisé par Hugo Chavez. C'est le peuple démuni, le même peuple que le peuple argentin rassemblé autour de Juan Perón, que le peuple péruvien rassemblé autour du général Alvarado, le peuple chilien autour de Salvador Allende. Et on ne peut pas anéantir un peuple. 

 

Mme Vivette Lopez. - Monsieur l'ambassadeur, merci pour vos explications. Je voudrais vous parler des Vénézuéliens, qui sont 5 millions à avoir quitté leur pays depuis 2013. Parmi eux, 80 % ont été accueillis dans les pays voisins d'Amérique latine et dans les Caraïbes, dont 1,8 million en Colombie et 1 million au Pérou. Or, la crise de la Covid a bouleversé les équilibres économiques déjà fragiles de ces pays. Les difficultés sanitaires et la crise économique qui en résulte ont généré des réactions hostiles vis-à-vis de migrants. Alors que les frontières étaient fermées, des couloirs humanitaires ont été mis en place pour les Vénézuéliens ayant les moyens de s'offrir le trajet de retour vers leur pays, via les postes-frontières de Cúcuta et d'Arauca. Quelle est l'ampleur de ce phénomène de retour ? Le Gouvernement souhaite-t-il développer une politique spécifique d'accueil vis-à-vis de Vénézuéliens rentrant déjà dans une situation très difficile ? Pouvez-vous nous éclairer sur le protocole d'accueil et de suivi médical pour ces personnes ? Sur le volet social et économique, le Gouvernement mettra-t-il en place un dispositif pour permettre à ces Vénézuéliens de l'étranger, qui ont tout perdu, d'être accueillis dans des conditions décentes ? Enfin, comment les choses vont-elles se passer avec la présidence de Joe Biden ? 

 

M. Jacques Le Nay. - Je m'exprime ici au nom de mon collègue Olivier Cadic, sénateur des Français de l'étranger, qui m'a chargé de vous poser une question dont je ne changerai pas un mot : « Monsieur l'ambassadeur, vous représentez un régime dont la principale figure, Nicolás Maduro, et 52 de ses hauts fonctionnaires apparaissent dans le rapport de la mission d'enquête de l'ONU en tant que responsables de crimes contre l'humanité et d'atrocités commises à l'encontre du peuple vénézuélien, telles que des détentions arbitraires, des emprisonnements, des tortures, des meurtres, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des viols et d'autres formes de violence sexuelle. Ce régime a également conduit le pays à la pire crise humanitaire de l'histoire de la région, entraînant l'exode de plus de 5 millions de personnes et plongeant 96 % des citoyens dans la pauvreté. Après avoir empêché l'alternance législative en 2015 et n'ayant pas permis à l'Assemblée législative de légiférer pendant cinq ans, Nicolás Maduro a été reconduit à la présidence en 2018, au terme d'une élection frauduleuse. Seule l'Assemblée élue en 2015 est reconnue par les démocraties, et son président Juan Guaidó est reconnu comme président du Venezuela par intérim. La France est le seul pays européen présent sur le continent latino-américain, son territoire étant situé à une heure d'avion du Venezuela. Accepteriez-vous que la France lance une initiative de médiation entre MM. Guaidó et Maduro, afin de faciliter la tenue en 2021 d'un scrutin démocratique, présidentiel et législatif, qui puisse être reconnu internationalement ? ». 

 

M. Christian Cambon, président. - Je précise que les opinions n'engagent que ceux qui les formulent, et Jacques le Nay a bien précisé qu'il avait donné lecture intégrale du message qui lui avait été confié. 

 

M. Guillaume Gontard. - Monsieur l'ambassadeur, vous avez rappelé la situation particulièrement complexe de votre pays. La semaine dernière, nous avons reçu Juan Guaidó, président par intérim autoproclamé de la République vénézuélienne, et le point de vue que vous exprimez aujourd'hui est donc particulièrement important. M. Guaidó, comme le reste de l'opposition, a appelé au boycott des élections du 6 décembre dernier. Par ailleurs, le scrutin a été contrôlé par des observateurs russes, chinois ou iraniens, les observateurs de l'Union européenne ou de l'ONU ayant refusé de participer, estimant que les conditions nécessaires n'étaient pas réunies. Ce ne sont pas là des preuves très convaincantes de démocratie... Par conséquent, les résultats de ces élections ont-ils pour vous une réelle signification démocratique ? De plus, comment pensez-vous reconstruire la confiance ? Les relations entre le président Trump - clairement pro-Guaidó - et M. Maduro ont été particulièrement tendues ces dernières années ; avec l'arrivée à la Maison-Blanche de M. Biden, à quoi le Venezuela est-il prêt pour détendre les relations et permettre une levée de l'embargo ? Êtes-vous prêts, notamment, à mettre en oeuvre les conditions d'une élection démocratique et libre, en donnant des gages à l'opposition ? Il me semble que c'est une solution indispensable pour que votre pays retrouve pacifiquement le chemin de la démocratie. 

 

M. Pierre Laurent. - Monsieur l'ambassadeur, j'avais souhaité que le Sénat équilibre ses auditions en vous recevant, je ne peux donc que me féliciter de votre présence. 

Nous sommes nombreux à souhaiter que la tenue des élections législatives qui ont eu lieu dimanche dernier aide à ouvrir une nouvelle étape, mais aussi permette de construire une sortie pérenne à la crise politique que le Venezuela a traversée ces dernières années. 

Je sais que la situation reste difficile. D'ailleurs, le taux de participation aux élections exprime cette situation de crise, à laquelle s'est ajoutée la pandémie de covid 19. Mais je souhaite que ces élections soient le début d'un processus utile au peuple vénézuélien. 

Je souhaite également que la France et l'Union européenne ne renouvellent pas l'erreur qu'elles ont commise en reconnaissant la victoire de Juan Guaidó, et qu'elles ne s'enfoncent pas dans la voie de la non-reconnaissance des résultats ou, pire, dans celle de la reconnaissance de ceux qui ont appelé au boycott de ces élections et qui ne proposent qu'une seule alternative, celle de la confrontation, y compris violente. 

J'adresserai d'ailleurs une remarque, non pas à vous, mais plutôt à mes collègues. Si la France appliquait à tous les pays du monde la règle qu'elle applique en ce moment au Venezuela - que je considère être une règle d'exception, dans la foulée des exigences américaines -, nous déboucherions assez vite sur un grand chaos diplomatique. Il s'agirait d'une position difficile à tenir pour un pays qui, comme la France, joue le rôle qu'il joue à l'Organisation des Nations unies (ONU). 

Monsieur l'ambassadeur, pouvez-vous nous dire plus sur les conséquences de l'embargo sur la population vénézuélienne et sur l'urgence qu'il y a, à vos yeux, de le lever ? 

Ma seconde question concerne l'avenir. Au cours de la campagne électorale, Nicolás Maduro a déclaré que le Venezuela devait, à l'issue de ces élections, travailler au changement de son modèle économique, afin de mieux répondre à la situation. Pouvez-vous revenir à la fois sur la nécessité d'un tel changement et sur la direction qu'il pourrait prendre ? 

 

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - Monsieur l'ambassadeur, vous avez indiqué, dans votre propos liminaire, que la France n'était plus celle de 1964, que, comme le Venezuela, elle avait changé. 

Il existe tout de même une différence fondamentale entre nos deux pays. Des millions de personnes ne quittent pas la France parce qu'elles sont pauvres, parce qu'elles n'arrivent pas à survivre et qu'elles ont un besoin énorme de liberté - la première des valeurs, pour vivre en paix et heureux. 

Nous sommes bien évidemment attachés au principe de souveraineté, monsieur l'ambassadeur, mais encore davantage aux droits de l'homme. 

Je connais bien le Venezuela et j'ai rencontré de nombreux Vénézuéliens, dans et hors du pays. J'ai assisté à la dégradation terrible des conditions de vie et de travail, des conditions de sécurité de ce peuple. Il est très douloureux d'assister à la dégradation d'un pays que nous aimons. Le Venezuela était un pays riche, avec son pétrole, mais aussi un pays extrêmement cultivé, raffiné, éduqué. Or, malheureusement, ce n'est plus le cas. 

J'ai étudié dans des pays totalitaires, en Europe de l'Est, je connais donc bien les dégâts qui sont causés par ces régimes. 

J'ai envie de m'adresser à vous, non pas en tant qu'ambassadeur, mais en tant qu'homme et citoyen vénézuélien, héritier de ce pays magnifique : comment pourriez-vous aider ce pays ? Comment pourrions-nous vous aider, même si, encore une fois, je suis convaincue de l'importance du principe de souveraineté ? Comment pourrions-nous faire évoluer la situation ? 

Le rapport élaboré par Michelle Bachelet pour l'ONU fait état de 674 réfugiés politiques au Panama, qui auraient été torturés. C'est inadmissible, terrible. Je suis sûr que vous-même, en votre for intérieur, vous ne pouvez pas l'accepter. 

Vous savez qu'une solution doit être trouvée pour votre pays, pour votre peuple. Nous aimerions vous aider, monsieur l'ambassadeur. 

 

M. Christian Cambon, président. - Je remercie Joëlle Garriaud-Maylam pour cette intervention, car il est vrai que nous nous demandons tous comment un pays riche peut en arriver à cette situation. 

 

M. Gilbert Roger. - Monsieur l'ambassadeur, je connais également bien le Venezuela, celui du président Chavez. Aujourd'hui, nous assistons à une rapide dégradation de la situation économique, de la santé des citoyens, alors que des efforts importants avaient été réalisés. Nous constatons aussi des manquements aux droits de l'homme, des disparitions d'argent lié à la production de pétrole - qu'il est certainement possible de retrouver sur des comptes offshores. 

Si vous ne faites confiance ni à l'Union européenne ni aux Américains, pensez-vous qu'il soit possible que le Venezuela, avec cette nouvelle législature, demande de l'aide aux pays latino-américains et à des organisations latino-américaines pour organiser une élection qui apparaîtra aux yeux du monde comme libre ? 

Pensez-vous, par ailleurs, qu'il soit possible de donner un signe fort, en libérant immédiatement tous les prisonniers politiques ? 

 

M. Héctor Michel Mujica Ricardo. - Jusqu'en 2015, le Venezuela, qui est un pays de migrants, possédait un bilan migratoire positif. Durant la guerre civile colombienne, le Venezuela a accueilli près de 4 millions de Colombiens. En outre, sous la IVe République, avant l'arrivée d'Hugo Chávez, un demi-million de Vénézuéliens résidaient aux États-Unis -, des entrepreneurs, des techniciens, des ingénieurs, etc. 

À quel moment le bilan migratoire est-il devenu négatif ? Au moment des mesures financières prises contre le Venezuela et des sanctions imposées par les États-Unis. Avec le décret Obama, le processus qui a débuté avec George W. Bush se radicalise. 

Je ne sais pas si 4 ou 5 millions de personnes ont fui le pays, d'autant que l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) dispose de chiffres différents, mais il s'agit d'un problème majeur que le Venezuela doit affronter. Je rappelle qu'en 2008, 21 % des Portugais avaient quitté leur pays. 

La pandémie étant bien contrôlée au Venezuela, certains de nos citoyens qui vivaient en Colombie, en Équateur, au Pérou et au Chili, commencent à rentrer. Ces Vénézuéliens ont choisi le retour car ils ont été les victimes, notamment en Colombie, d'actes xénophobes - des compatriotes ont même été assassinés. Ces faits n'ont pas été relayés par la presse. 

Le gouvernement vénézuélien doit faire face à un défi. Il doit mener une politique migratoire à long terme, avec l'aide d'organismes internationaux fiables. 

Quand commence la débâcle économique au Venezuela ? Après la mort du commandant Chávez, depuis les sanctions économiques et les mesures financières prises en particulier par les États-Unis. Personne ne la nomme, mais il s'agit d'une guerre. Le président n'est pas l'auteur de cette crise économique. S'il a pu se tromper en prenant quelques mesures économiques qui se sont révélées mauvaises, il n'est pas responsable de cette terrible crise économique. 

La projection estimée de la perte totale de l'économie vénézuélienne, entre 2015 et 2019, en raison du blocus et des sanctions, s'élève à 130 milliards de dollars. Ce chiffre représente deux fois le produit intérieur brut (PIB) de l'Uruguay et du Costa Rica, et la moitié du PIB du Portugal. Il représente 70 % du PIB de la Hongrie et quatre fois le PIB de la Lettonie. 

Les médias français parlent très peu des sanctions. Mais chaque institution, chaque organisation doit avoir le droit d'être prise en compte. 

Notre mission diplomatique est reconnue par la France, et je suis reconnu comme ambassadeur sur la liste diplomatique du Quai d'Orsay. Pourtant, nous avons passé dix-sept mois sans compte bancaire en France. Imaginez-vous les conséquences ! Et cela, simplement parce que le département du Trésor des États-Unis donnait des instructions visant à empêcher les diplomates d'exercer les missions qui leur incombent, selon la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques. 

La France a pourtant été capable d'exercer un rôle de médiateur sous le gouvernement du président Hollande, parfois même au travers de déclarations importantes. Lorsque l'ex-secrétaire général de l'Union des nations américaines (Unasur - Unión de Naciones Suramericanas) s'est rendu en France, le président avait en effet prôné le dialogue. 

Pourtant, au mois d'août 2018, lorsque le président Maduro a été visé par des attaques de drones, j'ai été surpris qu'aucun pays de l'Union européenne ne publie de communiqué condamnant ces agissements. Et que je sais parfaitement que dans d'autres pays, il y a des milliers de prisonniers politiques, et pourtant, personne ne dit mot. Il y a donc une politique de « deux poids, deux mesures » à l'encontre de mon pays ! C'est inacceptable en diplomatie. 

Nous sommes ouverts au dialogue à propos d'élections, mais pas sur des dates qui nous renverraient à 2021 : cela doit se faire dans le respect des dates qui sont inscrites dans la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela. J'ajoute que lors des élections législatives, les observateurs internationaux en présence n'étaient pas seulement russes ou chinois, mais aussi français, belges, portugais, espagnols... L'ex-président espagnol José Luis Rodríguez Zapatero en faisait d'ailleurs partie. Allez-vous me dire que c'est un dictateur ? Croit-il que notre système électoral soit suspect ? Qu'il prête à soupçons ? Non ! Mesdames et messieurs les sénateurs, observez comment fonctionne notre système électoral. À l'époque de la réforme constitutionnelle menée par le président Chávez, en 2007, l'écart entre les perdants et les gagnants du référendum était de 0,17 %. Pourtant, en moins d'une heure, le président avait a reconnu la défaite. Lors du coup d'État du 11 avril 2002, il a reconnu qu'il fallait libérer tous les putschistes, se conformant ainsi à la décision du Tribunal suprême de justice. Par ailleurs, c'est une erreur de croire qu'un homme comme Juan Guaido représente la démocratie au Venezuela. Il ne représente ni l'opposition démocratique vénézuélienne, ni le peuple vénézuélien, car il est perçu comme un traître qui réclame des sanctions contre notre pays, et qui organise des opérations militaires pour déstabiliser le régime. Il ne s'agit pas seulement de fragiliser le régime de Nicolás Maduro Moros, mais plutôt la nation toute entière. Il veut détruire la souveraineté nationale. 

Nous avons beaucoup souffert, et nous devons à tout prix éviter de fouler aux pieds un peuple comme les Vénézuéliens. Au dix-neuvième siècle, nous avons mené toute une série de guerres d'indépendances dans le monde, auxquelles des Français ont d'ailleurs participé. De grandes figures vénézuéliennes ont aussi activement pris part à la révolution contre la monarchie absolue en France, à l'image de Francisco de Miranda, maréchal de camp à la bataille de Valmy. 

Ce que nous voulons, c'est la communication et le dialogue. Levez les sanctions ! Laissez s'exprimer le peuple vénézuélien ! S'il décide, lors des prochaines élections, d'élire de nouveaux gouverneurs, de nouveaux maires, ou un nouveau président, nous l'accepterons. Mais je crois que le président Maduro est le seul homme politique qui serait à même d'accepter une victoire ou une défaite. 

On parle souvent des droits de l'homme pour justifier les atteintes à la souveraineté. Pourtant, après la première visite de l'ancienne présidente Bachelet au Venezuela en tant que Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, nous avons établi un bureau des droits de l'homme. Celui-ci rend compte directement de la situation du pays à Mme Bachelet. Nous essayons à tout prix d'effectuer une surveillance des éventuelles violations de ces droits. Mais ce que nous n'accepterons jamais, c'est la destruction d'une nation en vertu de la « responsabilité de protéger ». Lorsqu'on détruit la souveraineté, on détruit toute une nation et tout un peuple. C'est le problème fondamental. 

Nous sommes prêts à nous ouvrir à la discussion, même auprès de n'importe qui. Même le diable ! Mais levez les sanctions en retour, qui sont énormes. Une bonne partie de l'économie vénézuélienne est aujourd'hui paralysée. Les revenus dérivés du pétrole étaient d'environ 100 milliards de dollars par an en 2012-2013. Aujourd'hui, ils ne dépassent pas les 500 millions de dollars, en raison des sanctions financières imposées par les États-Unis. Comment peut-on tenir une situation économique sous ces conditions ? J'insiste, le plus important est la communication. Si le gouvernement français souhaite engager le dialogue, nous l'accueillerons à bras ouverts. 

Le Venezuela subit la réunion de quatre facteurs négatifs, avec d'abord la crise économique mondiale, mais aussi la crise du modèle économique vénézuélien. Nous ne pouvons pas continuer sur le modèle rentier pétrolier. C'est impossible. Pourtant, celui-ci tient depuis cent ans, c'est-à-dire depuis le début de l'exploitation des puits. Les autres facteurs concernent les sanctions et les mesures coercitives unilatérales. Même en période de pandémie mondiale, et alors que même le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, avait voulu prendre en compte ce contexte, les États-Unis ont refusé de relâcher la pression. Je suis donc très reconnaissant envers le président Cambon de m'avoir laissé exprimer mon point de vue. 

 

M. Christian Cambon, président. - Je vous remercie pour cet entretien, qui a permis d'éclairer le sujet. Nos pensées vont surtout à la population vénézuélienne, qui souffre énormément. Je forme au nom de tous des voeux pour que le dialogue s'instaure et que cette crise s'apaise. Le Sénat est un lieu qui peut permettre les rencontres, ce qui a parfois eu lieu dans d'autres circonstances. Merci de vous être exprimé avec liberté. C'est la marque du Sénat. 

 

La réunion est close à 17 h 45. 

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat. 

Source : http://videos.senat.fr/video.1882692_5fd0dd3111311.audition-de-m-hector-michel-mujica-ricardo-ambassadeur-du-venezuela-a-paris,

COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES, DE LA DEFENSE ET DES FORCES ARMEES 

 

Mercredi 9 décembre 2020

Situation du Venezuela - Audition de S.E. M. Hector Michel Mujica Ricardo, ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela auprès de la République française et des Principautés de Monaco et Andorre 

 

• Situation du Venezuela - Audition de S.E. M. Hector Michel Mujica Ricardo, ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela auprès de la République française et des Principautés de Monaco et Andorre 

o Christian CAMBON 

o MUJICA RICARDO Hector Michel 

o Vivette LOPEZ 

o Jacques LE NAY 

o Guillaume GONTARD 

o Pierre LAURENT 

o Joëlle GARRIAUD-MAYLAM 

o Gilbert ROGER 

o MUJICA RICARDO Hector Michel 

o Christian CAMBON 

 

source : ambassade de la République Bolivarienne du Venezuela en France

 

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