Equateur : Nous ne nous sommes pas rendus compte du coup d'Etat
Par Pedro Pierre
Dans les nombreux commentaires sur les élections, on a peu parlé d'un coup d'Etat qu'on qualifie de « mou, » c'est à dire doux, parce qu'ils nous ont apprivoisés.
Tellement doux que les auteurs n'apparaissent pas, tellement doux qu'il en nous fait pas encore mal... un « coup d'Etat » qui date d'avant le Gouvernement de Lenin Moreno. Nous avons accepté sa trahison et que ceux que nous avions rejetés aux élections de 2017 nous gouvernent. Maintenant, non seulement nous ne les avons pas rejetés mais nous les avons appelés à grands cris. Ils nous ont convaincu de voter pour Lasso pour en finir une bonne fois pour toutes avec corréisme sans que nous nous rendions compte que le capitalisme allait être pire que ce dont nous avons souffert depuis 4 ans.
Les médias commerciaux nous ont convaincus qu'il fallait haïr l'un et célébrer l'autre. Nous regardons le Honduras, le Paraguay, le Brésil, le Guatemala… et nous sommes pires qu'eux. Ils ne nous parlent pas de l'Argentine ni de la Bolivie qui sont sorties du cauchemar. La Bolivie a supporté 1 an le coup d'Etat et a obligé le parti d'Evo Morales à revenir au pouvoir. Le Brésil a réussi à ce que les sentences contre Lula da Silva soient annulées et nous, après 4 ans, demandons plus que cela... et nous allons l'avoir. Déjà, le nouveau Gouvernement prépare son équipe de ministres et de secrétaires d'Etat et les choisit parmi les plus à droite et les plus fascistes du pays.
« Mains de fer dans des gants de velours » nous allons avoir pendant 4 ans... à la manière de León Febres Cordero, du Parti Social Chrétien (PSC), le président le plus sanguinaire que nous ayons eu pendant ces 50 dernières années. Tout a été très bien organisé en nous maintenant dans l'ignorance, la passivité, l'individualisme, le je-m’en-foutisme. Et pendant 4 ans de plus, ils vont ligoter les structures de l'Etat pour qu'aucun président progressiste en revienne. Les intellectuels de gauche, les indigènes et les organisations syndicales qui ont voté « nul » se sont laissés tromper par les ONG (organisations non gouvernementales) qui les ont aveuglés pour une poignée de dollars. Ne pas parler de l'université qui ne forme pas les étudiants à penser et à innover mais à être de bons employés pour les entreprises équatoriennes et étrangères. Avec le nouveau Gouvernement, le groupe catholique le plus traditionaliste, l'opus dei, a déjà ses entrées au palais Carondelet… Ce qu'a dit León Febres Cordero quand il a gagné la mairie de Guayaquil se répète: « Nous sommes ici pour y rester plus de 30 ans ! »
Que l'ambassade nord-américaine est heureuse ! Avec le président Moreno, elle entrait au Palais du Gouvernement comme dans sa deuxième maison. « Très dociles et obéissants » ont été les Equatoriens pour applaudir le bourreau des pauvres qui ne veut pas leur offrir leurs richesses, leurs matières premières, leurs meilleurs professionnels. Ses fonctionnaires paient très bien leurs employés équatoriens pour que nous applaudissions nous-mêmes nos maîtres et leur demandions de s'asseoir aux premières places. Ne critiquons pas la Colombie qui est devenue une colonie nord-américaines avec 9 bases militaires sur son territoire. Nous, nous sommes pires. « Il n'y apire aveugle que celui qui ne veut pas voir ! »... car nous avons le football, la bière, des romans, des téléphones de dernière génération. Un chat disait : « Ils nous appauvrissent mais nous tenons parce que nous sommes forts... mais qu'ils ne suppriment pas le championnat national ou sud-américain ni les bordels ! »
Le chemin pour revenir sur cette situation catastrophique va être très long... parce que ce sont des experts en « coups d'Etat doux » et que les « gants de velours » sont si doux. Nous avons perdu notre dignité, ils contrôlent bien la jeunesse et les professionnels ne veulent pas perdre leurs emplois précaires. Ils ont réussi à nous monter tous les uns contre les autres. Si nous n'avons pas plus de conscience, nous ne pourrons pas lutter pour nos droits. Si nous continuons à être égoïstes et individualistes, des situations qui nous étoufferons de plus en plus ne cesseront de se présenter. Serons-nous capables également de croître dans une mystique de libération qui suppose « une amitié sociale et un amour politique » centrée sur la construction du royaume de dieu comme nous la présente le pape François ? Que notre dévotion mariale incarne la foi de Marie de Nazareth dans notre vie et dans nos engagements : « Le tout-puissant... a fait un coup d'Etat avec tout son pouvoir : il a défait les arrogants et leurs plans. Il a renversé les puissants de leurs trônes et a exalté les humbles. Il a comblé de biens les affamés et a renvoyé les riches les mains vides. »
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
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