Bolivie : Colonialisme et politique
Par Camilo Katari
Rafael Puente, Alejandro Almaraz, Raúl Prada, sont d'anciens ministres d'Evo Morales, tous, aujourd'hui, ennemis déclarés du MAS et d'Evo Morales. A cette liste, on peut ajouter d'autres hommes et femmes qui assumaient une fonction publique et militednt aujourd'hui à droite.
Comment expliquer ce changement idéologique ? Une réponse facile et conventionnelle est de dire qu'ils ont changé quand ils ont quitté leur fonction. Mais il faut voir un peu plus loin pour expliquer ce phénomène traditionnellement connu en Bolivie sous le nom de « caméléonisme » politique.
L'explication se trouve dans la base de la structure coloniale de notre société et d enotre Etat. Ces structures ont créé une société que certains appellent « pigmentocratique » et les raisons ne manquent pas, seulement en analysant la féroce attaque de Belzu au siglo IX ème siècle ou la soumission que Juan Lechín a imposée à Genaro Flores quand il lui a ordonné « d'acheter des cigarettes » au XX ème siècle ou les humiliations des quechuas dans la ville de Sucre le 24 mai 2008, en plein XXI ème siècle, sont l'expression d'une société clairement coloniale dans laquelle ce qu'on appelle la gauche se trouve sur le même trottoir que la droite quand il s'agit d'Indiens.
La suprématie du prolétariat sur toutes les classes a été et est toujours le dogme du marxisme orthodoxe qui ne comprend pas que la force motrice de ce qu'on appelle « l'instrument politique » a été l'identité culturelle des peuples originaires, assumée dans la sémiologie de Tupak Katari, Bartolina Sisa et de la Wiphala.
Le prolétariat était considéré comme le messie de la libération nationale, les théoriciens qui utilisaient cet argument ont trouvé une limite à leur pensée quand le pouvoir des peuples originaires a émergé du plus profond de notre histoire. A ce moment-là, des profondeurs du subconscient colonial a surgi l'élan viscéral du racisme, une caractéristique que les marxistes orthodoxes partagent avec la « droite, » ce qui explique que les massacres d'aymaras, de quechuas ou de guaraniés aient été ignorés au moment des « pactes » de « gouvernabilité » ou de « pacification » lors desquels se répétaient la pacification coloniale entre almagristas et pizarristas.
Les “ch’ampa guerras” dans lesquelles se sont vus entraînés les Quechuas à Cochabamba ou dans le Nord de Potosi ont eu lieu à cause de luttes internes du MNR, les morts ont toujours été des paysans et les « vivants » les dirigeants petits blancs du parti. Le « frère paysan » mettait les morts et les votes mais jamais les candidats.
Cette façon d'être coloniale a brisé l'idéologie marxiste, socialiste, communiste de ces individus qui aujourd'hui revêtent la couleur noire du fascisme.
Alors, le tournant vers la droite des nombreux militants autrefois de gauche au sein du MAS ne doit pas surprendre parce qu'en définitive, ce qui définit leur condition sociale et politique, c'est le colonialisme qui les habite.
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos
Source en espagnol :
https://www.resumenlatinoamericano.org/2021/09/24/bolivia-colonialidad-y-politica/
URL de cet article :
http://bolivarinfos.over-blog.com/2021/09/bolivie-colonialisme-et-politique.html