Venezuela : TANCOL, xénophobie et OTAN
Par Danna Urdaneta
Dans l’article que j’avais écrit pour le Resumen Latinoamericano le 27 janvier 2022, intitulé « Nouvelles guerres : TANCOL,et opérations de guerre hybride contre le Venezuela, » je faisais des réflexions sur la sécurité, la paix avec la justice sociale, les droits de l’homme et le droit des peuples. Ces réflexions sur le conflit transfrontalier étaient centrées sur la guerre d’Apure qui a indéniablement explosée entre mars et avril de 2021.
Cette nouvelle dimension de la guerre régionale qui a son origine en Colombie mais concerne l’Equateur et encore plus le Venezuela a donné une nouvelle appellation aux groupes armés selon leur nationalité (colombienne mais dans les faits également vénézuélienne). C’est le général en chef commandant du commando stratégique opérationnel de la Force Armée Nationale Bolivarienne (CEOFANB), Domingo Hernández Lárez, qui exécute l’ordre du président Nicolás Maduro d’extirper les Terroristes Armés Trafiquants de Drogues de Colombia (TANCOL) du territoire national grâce à l’opération Bouclier Bolivarien (OEB) «Vuelvan Caras 2022».
Je signalais aussi le caractère de classe que partagent l’OEB (à partir de la création des TANCOL le 30 septembre 2021) et le Commando contre le Trafic d eDrogues et les Menaces Transnationales (CONAT) créé le 17 février 2021. Le CONAT est dirigé par le générale en chef de l’Armée Nationale de Colombie, Eduardo Zapateiro, sous les ordres du président Iván Duque qui a annoncé sa création de la base militaire yankee de Tolemaida, la plus grande base en Colombie, près de laquelle a été trouvée la fosse commune de faux positifs le plus grande du monde, mieux connue sous le nom de fosse de La Macarena.
Il est urgent de désigner les opérations militaires de l’État terroriste de Colombie et l’État vénézuélien à la lumière de la lutte des classes, de la para-politique colombienne et de la narco-politique vénézuélienne et de disséquer de façon théorique, politique et militaire le terme TANCOL face au conflit régional à Arauca et à Apure comme un plan des Etats-Unis pour s’approprier les ressources naturelles de la région.
L’urgence de qualifier le conflit transfrontalier pour obtenir la paix et la justice sociale est mise en évidence dans la protestation du Gouvernement colombien envers Washington pour la confirmation qu’a faite la Maison Blanche de la visite d’une commission yankee à Caracas pour parler de sa « sécurité énergétique » et des prisonniers yankees au Venezuela. Selon le média vénézuélien La Tabla, à cette rencontre ont participé « des membres importants des principales compagnies pétrolières étasuniennes, dont Chevron. » Pacho Santos, ancien ambassadeur des Etats-Unis en Colombie jusqu’en 2021, a qualifié cette rencontre .de « grosse claque pour la Colombie, »
OTAN-Colombie contre Rusia-Venezuela et la paix de la région
Il faut souligner l’existence du CONAT et ses actions au Venezuela (assassinat des insurgés des FARC-EP Seconde Marquetalia Jesús Santrich et apparemment celui d’Edison Romaña) parce qu ela guerre inter-impérialiste entre les Etats-Unis-OTAN et la Russie-Chine met en évidence le fait que le conflit dans les plaines colombo-vénézuéliennes ne va pas cesser tant que la Colombie sera un pays associé extra-continental de l’Alliance Atlantique.
Le 8 décembre 2021, le ministre de Guerre colombien, Diego Molano, a affirmé : « Avec la participation de la Colombie à un programme conjoint avec l’OTAN, nous améliorons notre capacité défensive, nous coordonnons la coopération avec d’autres pays alliés – Centre d’Excellence, il y a 11 lignes de travail – en plus d’élargir la coopération avec l’Union européenne dans la lutte contre les crimes transnationaux, la formation et l’entraînement en matière de cybersécurité. »
Bob Menéndez, sénateur démocrate et président du Comité des affaires étrangères du Sénat des Etats-Unis, a présenté un projet de loi destiné à déclarer la Colombie « allié stratégique n’appartenant pas à l’OTAN, » une figure également connue sous le nom d’« allié principal non membre de l’OTAN. » A ce sujet, il a affirmé : « Maintenant que la Russie lance une attaque en Ukraine contre nos valeurs démocratiques, il est impératif de renforcer nos relations dans la région, en particulier avec de forts alliés comme la Colombie » pour contrecarrer la présence de la Chine en Amérique Latine.
Mais depuis la signature des accords de paix de La Havane, le génocide en Colombie a provoqué, le 7 mars 2022, l’assassinat de 1322 dirigeants sociaux et de 306 signataires des accords de paix. Au temps où Juan Manuel Santos négociait la paix, il se rapprochait de l’OTAN. Aujourd’hui, le fer de lance contre le Venezuela, c’est le CONAT, un corps d’élite des forces armées de Colombie.
L’opération Bouclier Bolivarien et le Commando contre le trafic de drogues et les menaces transnationales
L’une des différences essentielles entre l’opération Bouclier Bolivarien et le CONAT est qu’alors que pour Maduro, les TANCOL (qui composent réellement ce groupe) « ne sont pas des guérilléros ni des paramilitaires » mais des « groupes structurés de délinquance organisée résiduels » (GAOR), un terme que l’État colombien applique à la guérilla communiste de l’Armée de Libération Nationale et aux différentes formes des FARC-EP: le groupe de Gentil Duarte, qui n’a pas signé les accords de paix de La Havane, la Seconde Marquetalia, dirigée par Iván Márquez, un ancien chef de la délégation de paix à Cuba et d’autres unités indépendantes qui se revendiquent également comme FARC-EP autonomes par rapport aux 2 groupes principaux.
Iván Duque appelle toute expression de ces guérillas armées qui agissent sur le fleuve Arauca ou dans la Serranía de Perijá « terroristes et menace transnationale » alors que l’État vénézuélien affirme que ce sont les TANCOL qui déstabilisent le pays et portent atteinte à la paix et à la souveraineté du Venezuela.
L’invention des TANCOL résiste à toute lecture idéologique : la journaliste frontalière Sebastiana Barráez affirme constamment que TANCOL est le nouveau nom que donne le Gouvernement à la guérilla colombienne au Venezuela. D’autre part, Miguel Ángel Pérez Pirela, La Tabla et Mission Vérité, avec peu de nuances entre eux, suivent le discours officiel et affirment que ce sont des trafiquants de drogues, des paramilitaires, des bandes de trafiquants de drogues, des mercenaires, des terroristes-trafiquants de drogues, des paramilitaires-trafiquants de drogues, (un mic-mac sans caractéristiques politiques) envoyés par Iván Duque pour déstabiliser le Venezuela.
Pendant ce temps, on criminalise la pauvreté au détriment des bases populaires avec le stigmate TANCOL sans distinction de nationalités. Le premier cas médiatisé (puisse cela ne pas devenir une politique d’État!) a été l’assassinat du directeur de la station de radio communautaire Frontière 92.5 FM, José Urbina, qui avait dénoncé des menaces de mort de la part du lieutenant colonel de la Garde Nationale Bolivarienne (GNB), Ramón Sánchez. de 27 coups de feu, le 10 janvier 2022 à Puerto Páez, dans l’état d’Apure. Urbina avait dénoncé au milieu d’une protestation contre ce qu’il qualifiait de plus de 20 faux positifs de TANCOL, c’est à dire plus de 20 personnes innocentes qui ont été capturées sur la frontière en tant que TANCOL sans droit à la défense.
L’opération Bouclier Bolivarien comprend-elle la narco-politique vénézuélienne ?
Le Gouvernement vénézuélien dénonce le conflit régional comme importé de Colombie et laisse toute la responsabilité de al guerre à l’ennemi extérieur. Jusqu’à présent, au Venezuela, les centres de recherche, les médias sur le terrain ou les universités ne qualifient pas le conflit transfrontalier et n’en font pas une lecture propre qui organise, discute, interprète et révèle la dialectique de l’affrontement dans le domaine politique, militaire, idéologique, des droits de l’homme et des droits des peuples de façon indépendante et qui dépasse les discours partisans et des Gouvernements de service.
Certains faits et certaines perspectives attirent l’attention sur cette agitation parallèle de l’ opération Bouclier Bolivarien et de l’Opération Main de Fer : les arrestations de maires, de députés, de chefs des ZODI et d’officiers de la FANB lors de l’Opération Main de Fer dirigée par l’intendant national anti-drogues, le major général Richard López Vargas, démontrent que la narco-politique est un phénomène qui possède des racines, des mécanismes et des réseaux propres au Venezuela qui ne dépdnent pas forcément du Palais de Nariño à Bogotá.
A l’époque, j’avis demandé au général Domingo Hernández Lárez sur Twitter si avec cette liste de personnes capturées, ce sont encore les TANCOL qui inondent le pays avec le trafic de drogues et je n’ai pas eu de réponse.
Même si dans le pays, il on ne sait pas encore clairement qui sont les TANCOL et si le CEOFANB dirige la politique contre le trafic de drogues, la politique contre les menées insurrectionnelles, la politique de protection du Système Electrique National (Maduro a affirmé que les TANCOL étaient responsables des attaques du SEN). Ce qui est clair, c’est la politique xénophobe transversale des Gouvernements de Nicolás Maduro à tou sles niveaux : le para-militarisme est colombien, les guérillas sont colombiennes, le trafic de drogues est colombien et même les protestations contre la honteuse paupérisation des services publics comme le gaz, l’eau, le téléphone, car ce sont des organisations qui les organisent de Bogotá et de Madrid pour déstabiliser le pays. C’est pathétique.
Où va le conflit entre Arauca et Apure?
Le 15 février, William Parra a interviewé pour la première fois Carlos Villarreal, chef du Front de Guerre Oriental Manuel Vázquez Castaño à Arauca, interview lors de laquelle, pour la première fois, un chef de l’ELN en territoire colombien prenait position sur le conflit dans les plaines colombo-vénézuéliennes. Villarreal dénonçait une guerre de terre brûlée de l’État colombien et des Etats-Unis dans le département d’ Arauca et qualifiait le processus bolivarien au Venezuela de « légitime, » officialisait la guerre de l’ELN contre le Dixième Front, précisait que la population civile n’est pas un objectif militaire, démentait envisager uen quelconque action contre les élections du 13 mars en Colombe.
Le 27 février, le ministre de la guerre, Diego Molano, annonçait 27 morts et 5 arrestations à Arauca dans des affrontements entre des mercenaires du Dixième Front et l’ELN sans montrer aucune preuve qu’il y ait eu des cadavres comme ils ont l’habitude de la faire. Parmi les morts se trouverait Arturo Paz, dont il a dit qu’il se trouverait à La Havane et aurait trahi l’accord.
Le site vénézuélien La Tabla a démenti le bombardement des enfants Diego Molano grâce à un fil sur lequel il compile les preuves qui démontrent que Arturo Paz n’est jamais allé à La Havane et qu’en 2009, il avait fait appel à Justice et Paix, le tribunal du para-militarisme, dont il est sorti libre en 2017. De sorte que ce secret de Polichinelle que le gouvernement colombien a caché dans sa guerre à mort contre le Venezuela a été révélé : le chef du Dixième Front n’est pas un guérilléro mais un paramilitaire. Malgré cela, la caste dirigeante continue de les qualifier de « dissidents des FARC. »
Pendant que les conservateurs pourris des médias colombiens et leurs alliés au Venezuela sont utilisés pour des opérations digitales de faux drapeau, du côté vénézuélien, ils sont démasqués et il est clair que c’est cette unité et ses alliés qui ont attaqué l’armée vénézuélienne, ce qui a débouché sur une guerre à Apure qu fait aujourd’hui que le CEOFANB désactive des laboratoires de cocaïne, des explosifs artisanaux et des voitures piégées qu’ils ont laissées sur leur sillage.
Politiques xénophobes contre les migrants colombiens et vénézuéliens
De la même façon que l’État vénézuélien renforce la stigmatisation du trafic de drogues et du terrorisme contre la Colombie, nos migrants dans le monde connaissent sans cesse la xénophobie à plusieurs dimensions et structurelle : la moirt de citoyens vénézuéliens dans le désert d’Iquique au nord du Chili, la chasse aux sorcières de Vénézuéliens pauvres à Ibarra, au nord de l’Equateur, l’exploitation sexuelle et l’assassinat de femmes vénézuéliennes migrantes, l’hypocrisie internationale anti-vénézuélienne qui impose de plus en plus de restrictions à la mobilité et aux déclarations des présidents, des gouverneurs et des maires dans divers pays qui affirment que la délinquance dans leur juridiction est el fait des migrants vénézuéliens (comme la dictature bolivienne et la mairie de Bogotá). Ces mêmes faits envers les Colombiens au Venezuela peuvent avoir les mêmes conséquences que subissent nos familles à l’étranger.
En Espagne, en 2020, il y a eu 28 365 000 demandes de protection internationale de la part du Venezuela et 27 576 000 de la part de la Colombie. En 2021, il y a eu 15 995 demandes de protection internationale de la part du Venezuela et 11 567 de la part de la Colombie. La petite différence, c’est que la plupart des Vénézuéliens à l’étranger ont émigré pour des raisons économiques alors que les Colombiens ont émigé à cause de la guerre.
N’y a-t-il pas eu contre Nicolás Maduro une campagne de l’opposition qui l’accusait d’être Colombien parce que soi-disant, sa mère est Colombienne et qu’il est né sur la frontière ? La xénophobie est une ressource à laquelle font appel tou sles partis.
Face à cela, toute ressemblance dans la logique sous-jacente de l’ennemi étranger du « castro-chavisme terroriste transnational » sous les Gouvernements de droite dans la région avec la logique sous-jacente et grise de l’invention des TANCOL n’est pas non plus un hasard. La différence est que le CONAT opère contre les guérillas colombiennes sur la bande binationale et le OEB contre les Colombiens et certains Vénézuéliens sur la ligne frontière.
Le communicant populaire José Urbina a protesté et dénoncé des faux positifs à Puerto Páez, dans l’état d’Apure, et cela évoque un conflit social propre, pas exporté. Les opérations militaires de l’État colombien, des Etats-Unis et de l’État vénézuélien contre les guérillas communistes sous la quatrième république sont une coordination idéologique et opérationnelle de vieille date. Penser que c’est un conflit exporté, c’est nier la lutte des classes. Sans une qualification du conflit, il n’y aura pas d’issue vers lapaix et la justice sociale.
traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos.
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