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Culture : Rambo ou l’influence de la morale mercenaire

27 Avril 2022, 17:14pm

Publié par Bolivar Infos

Par Fernando Buen Abad Domínguez

 

Sans parler des fusillades, des coups de poing, des cris et des fracas que le cinéma commercial utilise comme « cheval de Troie » stratégique et idéologique, Rambo (tous les Rambo avec leurs étoiles de mercenaires) laisse des cicatrices culturelles dont suppure un pus doctrinaire douloureux et dangereux.

 

Sous l’attirail des musculatures et des uniformes recouverts d’armes de différents calibres, de poignards, de chaînes et de grenades… bout un bouillon idéologique destiné à exciter la libido guerrière de certains (et de certaines) consommateurs de mercenariat fanatique. Ils se battent, chargés de centaines d’armes et le cerveau intoxiqué par la haine.

 

Ici, le nom de Rambo est seulement un « raccourci » pour évoquer un stéréotype que les machines de guerre idéologique déguisent en spectacle d’aventures audiovisuelles de la violence mercenaire. Nous n’avons pas actuellement de typologies ni de taxonomies de « héros » cliché mais disons que les personnages ne font pas preuve de beaucoup d’esprit ni leurs « aventures » de « sauveurs du monde » de beaucoup de clarté. Son royaume est le paradis du simplet où chevauchent à leur aise ces psychopathes exibés comme des « messies » avec des mitraillettes.

 

Cela cause des dommages. De nombreuses générations de toute la planète professent une adoration pour ces idoles des mass média et leurs causes vendeuses. Le nombre d’audiences est le pâle reflet des marées d’émotions qui agitent ses « fans. » Là se mêlent les frustrations, les médiocrités, les solitudes… et les leçons : ils apprennent au « public » à haïr les « différents » qui ont l’habitude d’être les « méchants » et à jouir de leur destruction totale à l’ombre d’un drapeau étoilé. Et de beaucoup d’argent.

 

Tout s’exacerbe et devient hystérique quand les scénarios de guerre se multiplient et qu’on fait abondamment leur publicité. D’où on les attend le moins, apparaissent les hommes de la rue « en uniformes ». Des personnes ordinaires exhument leurs vêtements à la mode de l’« armée » qui sont en permanence dans de nombreux catalogues de « prêt à porter. »

 

Les publicités se multiplient et les offres de bottes, de chaussettes, de sacs, de chapeaux, de chemises et de pantalons “Army Fashion”. Tissus de camouflage, téléphones, lunettes de protection, et certains dispositifs de vision nocturne qui incitent à espionner « les autres » comme ça arrive dans les films d’action militaires et paramilitaires. Certains achètent leur “Jeep” et la camouflent avec réalisme pour se promener dans les quartiers. Un Rambo habite leur tête et leur coeur. Le mal est fait.

 

Cette empathie pseudo-militaire, cultivée sur la base des affects idéologiques, attent « sereinement » son « heure de vérité » alors qu’en marge des exhibitions cinématographiques, apparaît dans une émission d’information, une photo, une conversation… l’occasion d’une « opération d’assaut » dans une subjectivité prête à se solidariser avec le mercenariat destructeur et, au moins, à accepter n’importe quelle monstruosité transformée en une partie de ses propres désirs. Cette identification avec les « commandos d’assaut » a des caméras et des micros imaginaires dans l’intimité du Rambo mental qui fraternise avec les Rambo payés pour le crime. Une fraternité psychologique macabre.

 

Cela se passe aussi bien dans les jeux vidéos qu’au cinéma. Depuis longtemps, la « réception » a des marques de classe même lorsque le récepteur l’ignore. Les degrés de « dommages» sur la « réception » sont de diverses qualités et de diverses quantités qui vont de la sympathie simple à l’assimilation fanatique qui transforme le récepteur en propagandiste de goûts et de valeurs infiltrés par la prolifération du « ‘bon sens » qui affirme la nécessité d’armées de type Rambo, dans tous les ordres sociaux.

 

Et cela comprend les Rambo syndicalistes, les Rambo ecclésiastiques, les Rambo enseignants et les Rambo chefs d’entreprises, parmi beaucoup d’autres, connus dans les situations de lutte des classes. Connus et subis.

 

L’instrument critique démocratisé que devrait fournir l’éducation publique et gratuite brille par son absence ou par sa rareté parce que le mal appelé Rambo a aussi atteint le monde enseignant, les amphithéâtres et les bureaux. Et comme l’instrument critique contre la manipulation symbolique ne prolifère pas, dans le cas concret de la morale mercenaire, l’éducation à la critique scientifique contre l’offensive idéologique bourgeoise tous les fronts agressifs et quotidiens ne prolifère pas non plus. A qui cela est-il dû ? Ou ils sont complices ou ils sont ignorants. Les 2 possibilités sont effroyables.

 

Si le taux moyen de « consommation » des médias a augmenté avec les « réseaux sociaux, » l’absence de l’État pour défendre l’intégrité éducationnelle et culturelle des peuples s’explique moins. C’est un abandon pervers, de quelque façon qu’on le regarde. C’est une omission « contre l’humanité » parce que des secteurs sociaux très fragiles y sont impliqués et qu’ils sont sans défenses. Tous les enfants, par exemple. Qui sont très nombreux.

 

Et tout est pire et empire tous les jours parce qu’en ayant des professionnels de la communication et de la sémiotique, en ayant des institutions et des ressources, nous vivons une guerre médiatique sans précédent… Il semblerait que rien ne se passe et que les Tyriens et les Troyens soient enchantés du formatage des cerveaux de type Rambo, sous toutes ses formes. Inacceptable et impardonnable. Mais personne n’écoute. Personne n’assume la tâche nii les responsabilités.

 

Personne ne prend au sérieux la menace du dommage intellectuel sur les têtes des peuples ni le danger stratégique militaire implicite qui suscite des mentalités complices des invasions mercenaires. Comme si c’était « naturel, » à nous, comme si ça venait de nous. Et c’est exagéré ? Aucune comparaison avec les effets toxiques des modèles impériaux qui se sont mélangés dans nos maisons et dans nos têtes. Ça suffit.

 

Nous avons besoin de plus d’instituts de sémiotique, émancipés et émancipateurs, vaccinés contre la bureaucratie intérieure et extérieure. Une science des apparences prête à élucider la quantité d’aberrations déguisées en « divertissement » qui nous menace. 

 

Des instituts dont les méthodes d’intervention et de transformation culturelle ne contiennenet pas de virus commerciaux et qui contiennent des étapes spécifiques pour leur autocritique comme pour l’administration des budgets. Des instituts pour la défense de l’intégrité et de la diversité des expressions culturelles et pour l’évaluation d’un commun accord et démocratique du discours médiatique délivrée par l’État pour circuler dans la société.

 

Nous avons besoin d’une action scientifique plurielle et démocratique qui place comme valeur suprême l’émancipation de l’intelligence, la dignité humaine et le respect inaliénable pour ne plus être victimes de la manipulation des symboles qu’exercent les puissances économiques et idéologiques aujourd’hui. C’est urgent. 

 

Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos 

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2022/04/26/pensamiento-critico-cuanto-dano-nos-ha-hecho-rambo-influencias-de-la-moral-mercenaria%EF%BF%BC/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2022/04/culture-rambo-ou-l-influence-de-la-morale-mercenaire.html