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Argentine : Les États-Unis utilisent leur courtoisie diplomatique pour mettre un frein à une centrale nucléaire

24 Mai 2022, 17:49pm

Publié par Bolivar Infos

« Une fois assis, ils sont allé droit au but, c’est typique d’une réunion avec les Étasuniens, »a dit Jose Luis Antunez, président de NA–SA, nucléoelectrica Argentina S.A.

 

« Entre courtoisie et diplomatie exquise, Ann Ganger a dit que c’était une visite de courtoisie, en tant que nation amie et qu’elle était inquiète à cause de la possibilité que le pays achète un réacteur chinois pour sa prochaine centrale nucléaire de grande puissance. »

 

La chef de la mission diplomatique du département d’État était le 6 avril dans l’immeuble de Villa Martelli qui héberge l’entreprise qui opère dans les centrales à énergie nucléaire les plus importantes d’Argentine.

 

Sa tournée, qui s’est déroulée du 4 au 8, a compris des réunions à la Maison Rose avec Juan Manzur, Jorge Taiàna et Daniel Filmus, une réunion avec le secrétaire des affaires stratégiques, Gustavo Beliz , d’autres à la chancellerie et un parcours dans l’immeuble d’Atucha à Buenos Aires et de l’entreprise IMPS à Mendoza pour observer le développement du CAREM, un prototype de réacteur modulaire que développe la commission nationale de l’énergie atomique (CNEA).

 

Devant chacun de ses hôtes, la sous-secrétaire adjointe pour la politique de non prolifération a répété la même chose en compagnie d’un étonnamment expert en renseignement du département d’État, Dominique Casino dont elle a dit : « on l’a volé au FBI. »

 

Le passage de la mission a laissé une tourmente au Gouvernement. Le bloc du Front de Tous du Congrès a convoqué Gustavo Beliz parce qu’il y a plus de 100 jours qu’il retarde les démarches pour activer la dernière étape de l’accord avec la Chine, accord destiné à mettre en marche Atucha III. Des députés et des sénateurs sont aussi en alerte à cause du CAREM.

 

Le pays construit ce prototype depuis 2014. Paralysés par le macrisme, les travaux devraient être finis en 2026 et entrent en compétition avec des travaux similaires des États-Unis. L’Argentine est l’un des 3 seuls pays du monde qui ont un modèle en phase de travaux avec la Corée et la Chine.

 

Totalement fait dans le pays, sa conception a été pensée en vue de l’approvisionnement intérieur mais aussi en vue de l’exportation, un facteur stratégique capable de produire 1000 000 000 de dollars dans chaque partie et qui installe le pays à la table des maîtres du monde.

 

« Si les Chinois entrent à Atucha , alors nous, nous voulons entrer dans le CAREM, » a dit l’ambassade nord-américaine à la chancellerie dans un message qui est arrivé aux oreilles des autorités scientifiques argentines.

 

Thé pour trois

 

Ganzer a grimpé les six étages de l’immeuble de Villa Martelli jusqu’à la salle du directoire. Elle a regardé l’horizon du fleuve à travers les fenêtres. Ils ont servi du café et des petits gâteaux alors que le directoire en session plénière s’installait pour l’écouter. Ils ont fait une traduction pour se parler directement en anglais. Ganzer a pris la parole et l’a ensuite partagée avec l’ancien du FBI, le seul autre interlocuteur de la délégation.

 

« Ils nous ont dit que ce qu’ils allaient dire n’impliquait pas une ingérence indue dans les affaires intérieures de l’Argentine mais était destiné à ce que nous sachions bien ce qui allait arriver au pays si on achetait le réacteur chinois. Ils ont dit que cette technologie était encore immature, qu’elle serait au point vers 2030 et que les réacteurs souffrent de multiples défauts : pannes de combustible, pannes de machine, défauts de conception. »

 

Ensuite, Casino a pris la parole et a distribué des documents confidentiels qu’il a repris ensuite comme dans chaque réunion qu’ils ont eue. C’était des photos satellites du soi-disant effondrement d’une centrale nucléaire chinoise, une alerte pour un éventuel vol d’informations de l’Argentine, des papiers, des articles de journaux sur des failles de sécurité du géant asiatique.

 

« Le dialogue était cordial, nous avons même discuté de sujets très pointus, en particulier dans cette affirmation et dans notre réponse, » a dit Antunez.

 

« Ils ont soutenu que le réacteur Hualong chinois que l’Argentine est sur le point d’acheter n’a presque pas d’expérience d’utilisation et a été conçu d’une façon que le régulateur occidental n’acceptera pas. En tant que pays ami, ils nous ont suggéré de ne pas l’acheter et de le remplacer par de la technologie occidentale. Ce monsieur a continué à montrer des coupures de journaux, des choses techniques et ainsi s’est achevée leur intervention.»

 

Antunez a remercié, a dit qu’il prenait note et qu’il avait entendu l’exposition sur la mauvaise qualité du produit que le pays était sur le point d’acheter et le fait que l’Occident ne le tolérerait pas mais il a continué :

 

« Le produit chinois a été sélectionné par nous en 2014, il y a huit ans, pour être incorporé à la flotte de réacteurs. Nous l’avons étudié très attentivement, nous avons étudié ses prédécesseurs, le programme et pour nous, c’était la machine indiquée au moment où nous l’avons choisie et elle continue de l’être aujourd’hui. »

 

Il a énuméré ce que la Chine était en train de développer : 4 machines en fonctionnement, 6 en construction et 19 en étapes de conception : « ça ne peut pas réellement être une technologie immature, » a-t-il ajouté.

 

« Comment serait-il possible que les centrales chinoises ne résistent pas à l’analyse d’un régulateur occidental alors qu’il y a quelques jours, les Britanniques ont accepté le réacteur Hualong, celui-là même que l’ Argentine a sélectionné? »

 

Ils disent que Ganzer a été perturbé par la réponse et a cherché à quitter les lieux. « C’est parce que le régulateur anglais n’a pas voulu nous écouter, » a-t-il dit.

 

« Ou ne serait-ce pas parce que c’est un régulateur indépendant ? » a répliqué le président de NA-SA.

 

L’Argentine a l’expérience des fournisseurs occidentaux. Atucha I, Atucha II et Embalse, ses 3 réacteurs nucléaires qui produisent de l’électricité ont été faits avec de la technologie allemande et canadienne. « Des fournisseurs irréprochables, a ajouté l’amphitryon. Malgré cela, les trois machines ont eu des problèmes et de sérieux problèmes. »

 

On n’apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces

 

L’action de la diplomate nord-américaine a été commentée de toute part. Beaucoup de ses paroles ont sonné comme racistes et bananières. « Arrière-cour », a cru entendre l’un de ses interlocuteurs à la Maison Rose. Ce n’était pas le mot exact mais c’est ce qui a été compris.

 

« Nous ne voulons pas que la Chine se mêle de notre arrière cour, » a-t-on entendu Ganzer dire. La fonctionnaire en est venue à dire que si on achetait réellement le produit chinois, l’immeuble de Zarate pourrait exploser. Manzur a sursauté et pas pour l’histoire de l’arrière-cour, et il a hoché la tête.

 

Vendredi 13 mai, un groupe de sénateurs dirigé par Oscar Parilli a parcouru Atucha avec le directoire de NA-SA et de CNEA. Ils en sont ressortis alarmés. Ils ont connu les détails de la tournée, les discussions et les demandes et le retard des projets à cause de démarches retardées au Gouvernement.

 

La mission nord-américaine est venue dans le contexte d’une table de travail permanente entre les États-Unis et l’Argentine intitulée « comité conjoint sur la coopération en énergie nucléaire. »

 

Avec des réunions annuelles entre août et octobre dans l’un où l’ autre pays et des rencontres suspendues pendant la pandémie, cette table travaille sur l’ordre du jour orienté vers le terrorisme nucléaire recherché par les États-Unis mais loin de l’Argentine.

 

Les scientifiques locaux acceptent les règles du jeu bien qu’on discute de la prise d’une décision de politique nucléaire importante pour le pays. C’est pourquoi ils ont critiqué la hâte locale : cette rencontre a eu lieu « de façon anticipée et intempestive » soutient un document interne bien que la CNEA ait demandé de la retarder.

 

Pourquoi cette hâte ? C’était la première rencontre après le Gouvernement de Macri et avec le Gouvernement de Joe Biden juste au moment où le pays s’apprêtait à finir le contrat avec la Chine et alors que les travaux du CAREM, dirigé par Adriana Serkis, étaient relancés .

 

Le contrat de 2014 avec la Chine, de pays à pays, était encadré par une loi. Le macrisme ne l’avait pas annulé bien qu’il n’ait pas non plus avancé et Alberto Fernandez a ordonné l’année dernière de l’accélérer. En décembre, NA-SA a terminé le projet technique et commercial et le 1er février a remis les papiers au Gouvernement. Il ne manque plus que le dernier pas : terminer élégamment la lettre sur le financement et exécuter les travaux.

 

« Là a surgi notre inquiétude pour ce retard, » a dit Antunez , la même chose qu’il a dite aux sénateurs. Et il a rendu responsable les affaires stratégiques, économiques et la chancellerie. « Il s’est passé plus de 100 jours sur le délai de 170 que nous avons fixé pour la signature du contrat et nous ne savons encore rien. »

 

« Donner la priorité au projet dépend du secrétariat des affaires stratégiques, proposer aux Chinois les conditions financières revient à l’économie et au moment où on aura besoin de plus de financement qu’en 2014, quand l’Argentine n’était plus endettée. De la chancellerie dépend d’engager la proposition au sein du traité. »

 

Depuis le mois de mars, quand le sujet a fait son apparition dans les premières lignes de l’ordre du jour, on a eu des indices concernant l’intérêt nord-américain pour le CAREM.

 

« Ce que nous voyons là, c’est que le projet CAREM est au centre de l’intérêt de la délégation étasunienne, » a déclaré Diego Hurtado, vice président de la CNEA.

 

« Ils veulent aller voir le vase de pression à Mendoza, ils veulent visiter Atucha et la vérité, c’est que le CAREM est en train d’être stimulé. La CNEA a réussi à le faire avancer après la paralysie du macrisme et maintenant, il existe une politique de nombreux efforts pour le faire bouger. »

 

Les États-Unis développent aussi ce modèle mais ce n’est pas leur seul intérêt : Ganzer a dit à la presse qu’ils voulaient s’associer avec l’ Argentine pour le faire.

 

De quoi s’agit-il ?

 

« On peut le déduire de ce qui s’est passé avec l’Arsat III sous le Gouvernement de Macri, » dit Diego Hurtado.

 

« L’Argentine a mis en orbite l’Arsat I et II en 2014 et 2015, un défi qu’elle s’était fixé en 2006. Des satellites. Un succès éblouissant. Le Congrès a approuvé une loi en 2015. En 2018, le Gouvernement de Macri a abandonné la loi de promotion de l’industrie des satellites et cherché à créer une entreprise avec 51 % de l’entreprise nord-américaine Hugues et 49 % de l’entreprise argentine pour le développement d’Arsat III.

 

Cherche-t-on la même chose maintenant ? Est-ce une collaboration entre les États ? Pourquoi l’Argentine devrais-t-elle partager une technologie développée à 100 % par son secteur nucléaire ? Pourquoi devrions-nous l’accepter si nous pouvons être compétitifs dans le segment du marché international de haute technologie ? Un réacteur de puissance pour produire une électricité 100 % argentine est le but que nous devons atteindre. Et nous ne parlons pas de soja. »

 

Le monde secoué pour la fourniture de l’énergie joue le remplacement technologique pour 2050 quand ils devront remplacer le charbon et le gaz par des mécanismes propres pour la production d’énergie. 2050, c’est à seulement dans 28 ans, a dit Antunez . Et l’énergie nucléaire est une énergie de substitution juste au moment où les États-Unis cherchent à déconnecter la Chine de l’Amérique latine.

 

Tout cela est-il une surprise ?

 

« Nous, les plus vieux, savons que les États-Unis ne sympathisent pas avec le programme nucléaire argentin depuis les années 50, ce n’est pas d’hier, » dit Antunez.

 

« Et, en général, toutes les visites officielles sont destinées à ce que nous, nous n’avancions pas dans notre programme nucléaire. Alors, pour moi, il n’y a aucune surprise. Nous ne savions pas sur quoi porterait la réunion mais nous suspections qu’il se passa quelque chose parce qu’on a publié beaucoup d’articles disant que l’Argentine ne devrait pas acheter le réacteur chinois. »

 

Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos

 

Source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/especiales/2022/05/23/estados-unidos-utiliza-su-cortesia-diplomatica-para-frenar-una-central-nuclear-en-argentina/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2022/05/argentine-les-etats-unis-utilisent-leur-courtoisie-diplomatique-pour-mettre-un-frein-a-une-centrale-nucleaire.html