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Amérique latine : La droite et la gauche dans la région

25 Juin 2022, 16:58pm

Publié par Bolivar Infos

 

Le tournant politique qui s’est produit en Colombie avec le nouveau gouvernement de Gustavo Pétro souligne le changement de la carte régionale qui est sujet à des analyses diverses.

 

Cette mosaïque de dénominations politiques dépasse les désignations habituelles de « droite » et « gauche. » Contrairement à ce qu’on appelle le « cycle progressiste de la région » des années précédentes. Quand Hugo Chávez , Fidel Castro, Rafael Correa, Evo Morales, Daniel Ortega, Lula Da Silva et Nestor Kirchner gouvernaient en même temps le schéma de la gauche était plus accentué qu aujourd’hui.

 

Que peut-on attendre de ce cadre régional ? Quelles opportunités s’ouvrent pour les différents acteurs ? Qu’est-ce que cela signifie pour le Venezuela ?

 

Le bloc de l’ALBA-TCP a sa tonalité propre

 

Le Venezuela, Cuba et le Nicaragua sont un facteur de cohérence particulier. Ces trois pays sont les principaux de la « gauche dure », des références anti-hégémoniques sur le continent et c’est pourquoi ils ont la particularité d’être l’objet de mesures coercitives multidimensionnelles de la part des États-Unis et de leurs alliés.

 

Alignés sur l’Alliance Bolivarienne pour les Peuples de Notre Amérique–Traité de Commerce des Peuples (ALBA–T CP) avec la Bolivie, Antigua et Barbuda, la Dominique, la Grenade, Saint Cristobal et Nieves, Saint-Vincent et les Grenadines et Sainte-Lucie, cette coalition composée par des Gouvernements de diverses tonalités qui vont de la social-démocratie à la gauche est un contrepoids politique à l’architecture politique de Washington mais c’est aussi un bloc avec ses facultés propre, une alliance obligatoire entre l’Amérique latine et les Caraïbes, une référence en politique économique et sociale, parce qu’elle propose des relations concrètes et réelles d’intégration.

 

C’est de l’ALBA–TCP qu’a surgi le moteur constructif d’une nouvelle architecture des relations car elle est une référence pour d’autres expériences conjointes avec PETROCARIBE et au-delà, l’Union des Nations Sud-américaines (UNASUR) et la Confédération des Etats Latino-américains et Caribéens (CELAC).

 

Le bloc de la « gauche modérée »

 

Composé par des pays avec des Gouvernements sociaux-démocrates, certains qu’on qualifie de « centristes » dans plusieurs cas formés en coalition avec des partis et des mouvements sociaux de gauche plus durs, il est une référence du progressisme modéré et un groupe de pays qu’il convient d’analyser de manière particulière.

 

Mais, par leurs affinités, le Mexique, l’Argentine, le Chili, le Honduras, le Pérou et maintenant la Colombie (quand Pétro prend les rênes du pays) sont des pays de ce qu’on appelle « le second cycle progressiste latino-américain. » Ce cadre contient une référence implicite, « le cycle » se comprend comme une totalité de virages vers la « gauche modérée » mais résume ce qui est sans doute un affaiblissement du modèle des partis et de la gouvernance des droites conservatrices traditionnelles dans chaque pays.

 

Entouré d’inertie et de pressions dans chaque pays, les Gouvernements ainsi qualifiés font des distinctions entre une politique pleinement soumise à Washington ou « être comme le Venezuela » une expression clairement péjorative.

 

Cette gauche modérée tolérée (dans une plus ou moins grande mesure) par l’establishment économique et politique de leur pays et par le système inter-américain, dans plusieurs cas est plus en accord avec le modèle du parti démocrate étasunien pour la région et ne représente évidemment pas une menace grave pour les États-Unis bien que le poids propre du Mexique et son influence naturelle soient déjà un point de référence comme acteur géopolitique à cause de ses derniers virages.

 

Le cas du Chili est particulier. Le gouvernement de ce pays est plus proche du modèle de progressisme woke créé par le département d’État et gère avec prudence son processus constitutionnel interne, raison pour laquelle Il gère très lentement et de façon tiède ses relations extérieures. Plus encore quand il s’agit d’affaires « épineuses » comme « le Venezuela. »

 

Par contre, le cas du Pérou, vis à vis de l’extérieur a été sans importance car le gouvernement a été consumé par la crise de la gouvernabilité, le harcèlement judiciaire et le choc des pouvoirs. En plus, Pedro Castillo a dit « l’Amérique aux Américains » aux États-Unis et son gouvernement continue à être en suspens.

 

L’Argentine a une politique étrangère hémiplégique, partiellement fermée sur des sujets importants pour la région comme « le Venezuela » ou en votant contre la Russie à l’ONU. Malgré certains gestes, son Gouvernement gère une politique étrangère arbitrée par le Fonds Monétaire International (FMI).

 

En résumé, la meilleure explication de ce spectre de Gouvernements consiste à dire que la « fin » du premier cycle progressiste » et le rebond de la droite traditionnelle dans la région ont été la conséquence dans une grande mesure du discrédit ou de l’envasement des directions, certainement aussi des erreurs de leurs dirigeants et des trahisons (le cas de Lénin Moreno en Equateur), des harcèlements judiciaires (Brésil) et de coups d’Etat (Honduras et Paraguay).

 

Il n’y a pas eu d’épuisement de « l’idée » et la nécessité intrinsèque dans les pays de produire un virage en aiguisant les contradictions avec le modèle de gouvernement néolibéral, plutocrate, des partis classiques de droite n’a pas changé.

 

Ceci est un trait particulier dans chaque pays mais persiste dans la région après une accumulation de cycles de crises économiques, de mauvaises façons de gouverner, une accumulation d’inégalités structurelles, de corruption institutionnalisée et maintenant avec la crise multifactorielle post-pandémie et la nouvelle crise qui débute dans le commerce international causée par les mesures coercitives contre la Russie.

 

Les pays du « centre » et de droite

 

Certains pays comme la République Dominicaine, le Costa Rica et le Panama se déclarent ouvertement dans l’orbite « centriste » mais politiquement parlant, on peut les considérer comme de droite modérée.

Par contre le Brésil, l’Uruguay, le Paraguay et le Guatemala ont toujours des Gouvernements de droite Traditionnel qui n’ont encore été détruits ni par l’épuisement ni par des électiorns. C’est pourquoi il est important de regarder le Brésil pour 2023 et le très probable, pour l’instant, retour de Lula Da Silva au pouvoir.

 

Le Salvador est un cas particulier. « Ni de gauche ni de droite » dans le discours mais de droite dans les faits. Cependant Nayib Bukele est une figure atypique en particulier depuis son virage dans les relations avec les États-Unis qui a ouvert les portes de son pays à la Chine. Bukele est véritablement un dirigeant dans le spectre d’une droite en contradiction avec le pays hégémonique et qui développe une politique intérieure hors des latéralisés traditionnelles dans son pays. Sui generis, sur toute la ligne.

 

Opportunités et défis

 

Dans la région, les conditions pour un réajustement de l’architecture politique du continent sont réunies. Il y a un espace pour oser désactiver des instruments obsolètes comme l’Organisation des Etats Américains (OEA) mais on sait Il n’y a pas eu de consensus parmi tous les pays de la « gauche modéré » pour ce faire. Mais il y a des possibilités de renforcer la CELAC. Tout consiste à produire là de nouveaux dynamismes.

 

Ce cadre régional suppose (lisez bien : suppose) une bouffée d’oxygène pour le Venezuela, Cuba et le Nicaragua à cause de la possible désescalade de la tention dans la région. 

 

Mais il est probable que certains pays de la « gauche modérée » en échange d’une possibilité de gouverner négociée avec des acteurs intérieurs et en particulier extérieurs (les États-Unis) préféreront laisser de côté ces trois pays par des pratiques isolationnistes modérées d’un nouveau type, caché sous des divergences idéologiques internes aux progressistes.

 

Les risques de ce scénario, de « l’indifférence » et de la « distance » résident dans le fait qu’il ne perturbe pas le cadre des années précédentes et qu’ainsi ont été détruites les facultés de la politique régionale confinée dans une anémie prolongée. C’est-à-dire, produire un continent également divisée.

 

Ce n’est pas rien, s’agissant du Venezuela, qu’en 2019, le Gouvernement Trump ait imposé au pied de la lettre un modèle de relations extérieures qui n’a pas été dépassé : reconnaître ou non le Gouvernement de Juan Guaido imposé et inexistant, avoir ou non des relations avec le Gouvernement légitime du président Nicolas Maduro. Tout cela a gravement divisé la diplomatie du continent. Le piège de la narration et de la politique persiste et certains pays n’arrivent pas à le dépasser, à se définir ou à développer leur position bien que cet ordre du jour ait été de fait réduit à néant et démantelé par Caracas.

 

Les pays de la « gauche modérée » ne sont pas en train de générer ou d’accélérer des processus à grande échelle. On perd un temps précieux. Il n’y a pas de visions concrètes , ni d’avancées bien que le Mexique insiste pour renforcer la CELAC.

 

Le dernier instrument d’intégration régionale réellement vivant et décideur politique est l’ALBA–TCP qui a organisé un sommet à La Havane quelques jours avant le neuvième sommet des Amériques raté. L’ALBA est le seul « point fermé » infranchissable qui a su susciter une activité politique fluide parmi ses membres à partir d’une orientation souverainiste.

Il y a plusieurs périodes de politiques simultanées dans la région et pour évoquer la nouvelle « avancée progressiste », il est évident que tout cela doit être vu. Peut-être comme jamais est-il important que « les gauches » dépassent les logiques de la division en faisant de la politique avec créativité et pragmatisme.

 

Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos 

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2022/06/23/nuestramerica-otro-ciclo-como-se-distribuyen-las-derechas-e-izquierdas-en-la-region/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2022/06/amerique-latine-la-droite-et-la-gauche-dans-la-region.html