Pérou : Pedro Castillo et la doctrine Monroe, une référence regrettable
Par Martín Guerra
Notre opinion au sujet du discours du président Pedro Castillo au IXème sommet des Amériques de presque 6 minutes en 6 points et une réflexion :
1. Il a blindé l’accord avec le Québec et la charte interaméricaine, c’est-à-dire qu’il a été institutionnaliste, pas alternatif.
2. Il a revendiqué la lettre contre le terrorisme qui est absolument manichéenne interventionniste, c’est-à-dire qu’il n’a pas attqué le néocolonialisme.
3. Il s’est joint au mandat de la BID en matière économique, c’est-à-dire qu’il n’a pas été anti-impérialiste.
4. Il a célébré les États-Unis de diverses façons et même 3 fois inutilement étant donné l’exclusion de Cuba, du Venezuela et de Nicaragua de ce sommet et les réponses courageuses d’Andres Manuel Lopez Obrador du Mexique, de Xiomara Castro du Honduras et de Louis Arce de Bolivie.
5. Il a plus mis en avant les patrons que les peuples dans le bilan, dans le domaine symbolique, son adhésion est allé vers ceux d’en haut.
6. Il a terminé par une phrase malheureuse, la plus malheureuse qu’aucun président péruvien n’ait prononcé dans une rencontre de cette catégorie : l’Amérique aux Américains ! c’est-à-dire qu’il a relancé la vieille « doctrine Monroe » ethnocide et impérialiste. La même doctrine soutenue par le président James Monroe.
Maintenant, rafraîchissons quelques souvenirs historiques au sujet de ce slogan : « l’Amérique aux Américains!» extrait de cette doctrine et à propos de son auteur.
James Monroe était le cinquième président des États-Unis (1817–1825) mais auparavant, il a été le douzième gouverneur de Virginie (1799–1802), l’état esclavagiste par excellence, le centre des activités du tabac, du café et du coton où c’est forgée à son corps défendant la culture afro-américaine sous lefouet en chantant des negro spirituals et des blues.
Monroe a réprimé avec une extrême cruauté la rébellion noire dirigée par l’esclave prédicateur Nat Turner (1800), une répression qui a inclus le dépeçage, la décapitation et le démembrement de ce dirigeant. L’échec de la rébellion afro-américaine la plus importante a aggravé les mauvais traitements contre les esclaves lorsque Monroe était gouverneur.
Ensuite, en tant que président, entre 1817 et 1818, auprès d’Andrew Jackson (septième le président des États-Unis, ennemi féroce des peuples indigènes qu’il appelait des « chiens sauvages », il s’est battu contre les muscoguis (creeks) et les Ikaniuksalgi (seminolas, anciennement muscoguis) entre autres nations et il a commandé de dépecer les vaincus après leur avoir coupé le nez entre autres atrocités. Il a fait tout cela grâce à la génocide « loi sur le déplacement forcé » de 1830, a annexé la Floride en détruisant sur son passage les nations indigènes.
En 1820, il devient abolitionnistes par convenance économique, encourage l’industrie et pour y arriver fixe avec ce qu’on appelle l’engagement du Missouri la ligne de partage entre le sud esclavagiste et le nord industriel. Cela a aggravé l’intensité de l’esclavage et de ses formes dans le sud et la croissance incontrôlée d’une classe ouvrière très pauvre qui a été rapidement réprimée.
En 1823, il soutient la « doctrine » élaboré par son secrétaire d’État John Quincey Adams (sixième président des États-Unis), il poursuit le déplacement vers l’ouest en poussant de plus en plus les Indigènes vers la réduction et l’anéantissement en leur volant un territoire équivalent à presque deux fois à la surface de l’Inde, près de 600 000 000 d’hectares, 6 000 000 de kilomètres carrés, plus de 60 % du territoire actuel des États-Unis, presque deux fois et demie la superficie du Pérou) qui porte son nom « doctrine Monroe » qui soutenait que l’Europe devait quitter le continent américain mais qui en réalité préfigurait le traitement de l’Amérique non étasunienne située sous le Rio Bravo comme arrière-cour des États-Unis.
Malgré ses déclarations, l’Europe a continué à intervenir, par exemple : l’Angleterre dans les Caraïbes et en Argentine, la France (et indirectement l’Autriche) au Mexique, l’Allemagne et l’Italie au Venezuela et même le Danemark au Groenland entre autres cas qui démontrent l’échec des soi-disant prétentions de la « doctrine » et son hypocrisie.
Mais le pire pour les indigènes est venu des États-Unis. La « doctrine Monroe » a enflammé de pseudo-patriotisme des conservateurs blancs et les territoires encore conservés par les peuples indigènes ont été rasés au nom de l’agriculture intensive et de l’industrialisation des ressources naturelles. L’une des nations les plus frappées a été le peuple Cherokee qu’ils ont obligé à un rude exil qui les a presque tous exterminés.
En plus de ça, notez qu’au nom de la doctrine, on a justifié des centaines d’interventions armées, de conspirations destinées à déposer des Gouvernements et d’assassinats même de chefs d’État par le Gouvernement des États-Unis, par son armée, ses services de renseignement et sa diplomatie.
Il est triste, terrible et offensant qu’un président péruvien né dans les Andes termine un discours devant les Amériques en revendiquant un assassin d’indigènes et de noirs, un exploiteur de la classe ouvrière et un envahisseur colonial et si ça ne suffisait pas, antisémite car quand James Monroe était secrétaire d’État, il s’est opposé à ce que le premier diplomate étasunien d’origine juive, Mordecai Manuel Noah soit nommé ambassadeur. Cette décision arbitraire a été condamnée même par les non juifs.
Pedro Castillo et ses conseillers savent-ils que ce qu’on appelle les peuples natifs nord-américains ont encore les indicateurs les plus faibles en matière de santé, d’éducation et de travail, que leur accès à l’eau potable, aux transports publics, aux réseaux sociaux et à l’électricité est très bas ? Savent-ils que la plupart vit dans des conditions de pauvreté et que c’est la communauté qui a le plus important indice de viol de femmes et qui souffre d’abus policiers ? Sont-ils avertis que la mortalité infantile est deux fois supérieure à celle des Étasuniens de descendance européenne et que leur espérance de vie est plus faible de presque six ans que celle du reste du monde ? Savent-ils qu’environ 30 % n’a pas de logement digne et qu’ils n’ont ni hôpitaux ni collège convenables et suffisants ? (« promesses non tenues. Un rapport de la commission des droits civiques du Congrès des États-Unis », 2018). En plus de l’usufruit de leur territoire et de leurs ressources ce qui est advenu, c’est la contamination et l’appauvrissement de la qualité du sol et des eaux. Avec la pandémie, cela s’est dramatiquement aggravé et les conséquences ont été dévastatrices pour les nations les plus frappées, les Navajos. Et il vaut mieux que nous ne fassions pas une liste de la situation des peuples originaires du reste du continent y compris du Pérou.
La conclusion du président Pedro Castillo ne sort pas de rien, c’est le corollaire d’un discours de rapprochement vers l’impérialisme qui cherche désespérément la corrélation des forces sur le plan international –lisez pression, l’intervention– pour que les politiciens de droite natifs, hommes de paille des Yankees, cipayes du néolibéralisme, laqués du grand capital transnational ne le chassent passe du pouvoir. On recourt à l’intervention diplomatique au lieu de l’autonomie, de la politique et de la lutte de classe. Le maître de Chota couronne ainsi sa recherche de sauvetage de la stabilité de son mandat dans la stratosphère alors qu’il devrait chercher le soutien du peuple, de ceux d’en bas, des descendants des esclaves et des peuples originaires, de la majorité et des minorités exclues. Regrettable, à la Pyrrhus, indigne.
Évidemment, cette critique ne s’ajoute pas au cri du conservatisme archaïque et apatride de la droite péruvienne qui joue la déstabilisation et pratique le putschisme. Non, notre critique vient des peuples et nos idées répondent même aux suggestions idiotes que nous font de côté et de profil certains dogmatiques et mécanistes qui voient dans l’actuel Gouvernement une expression de plus de cette droite traditionnelle.
Le président Castillo rectifiera-t-il ? Qui sait !
Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos
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