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Colombie : La paix totale n'est pas possible tant que le nouveau para-militarisme est actif

21 Octobre 2022, 16:59pm

Publié par Bolivar Infos

Par Horacio Duque,

 

La « paix totale » comme stratégie du gouvernement pour éradiquer définitivement la violence dans la société colombienne est une grande solution du président Gustavo Pétro.

 

Elle a montré peu à peu chacune de ses composantes pour aborder les manifestations spécifiques et régionales du conflit social armé avec ses différents acteurs comme expression des divers phénomènes sociaux, politiques, idéologiques, historiques, territoriaux, ethniques et criminels.

 

Les réformes de la loi 418 de 1997 qui ont été réalisées en urgence au Congrès de la République avec d’importantes avancées seront sans doute une plate-forme institutionnelle adéquate en tant que cadre légal de référence des dialogues et des accords obtenus avec les guérilla révolutionnaire (Farc EP, ELN, Nouvelle Marquetalia et EPL) marxistes, léninistes, camillistes et maoïstes présentes sur le territoire et sur les frontières.

 

Une nouvelle loi pénale prétend fixer les règles de soumission des structures criminelles (Urabeños, Rastrojos, Pachencas, Zotas, Espartanos, Milagrosa, Caparros, Flacos, Palustres et autres liées au trafic international de drogue et au micro trafic national, à la corruption et au déplacement de paysans pour les déloger de leur terre.

 

Mais il y a un problème très grave qui continuera à gêner les avancées de la paix totale. Je parle du nouveau para-militarisme différencié comme fait politique et militaire associé au pouvoir des forces armées et des élites oligarchiques qui l’utilisent pour soutenir grâce à la violence les privilèges et les structures de domination sur la société et sur l'État comme le démontre clairement Samuel Huntington dans son ouvrage classique «The Soldier and the State» que je recommande pour l'actualité de ces considérations analytiques.

 

Com on le sait, les paramilitaire ont surgi en Colombie en février 1962 après une visite dans le pays du Général  William P. Yarborough, (1962), directeur des investigations du centre de guerre spéciale de Fort Bragg Caroline-du-Nord aux USA) chargé de réévaluer la stratégie militaire des États-Unis au Vietnam, en Algérie et à Cuba, qui a rédigé un supplément secret au rapport sur sa visite qui se réfère à la création d'organisations de « type anti-terroriste » destinés à la « lutte anti-communiste » dans les termes suivants : « on doit créer maintenant même une équipe dans le pays pour sélectionner du personnel civil et militaire en vue d'un entraînement clandestin pour des opérations de répression si on en a besoin ensuite. »

 

Dans le cadre de cette stratégie anti-insurrection et soutenu par la doctrine de la sécurité nationale, le 27 décembre 1965, le Gouvernement du président Valencia a émis le décret 3398 (devenu ensuite la loi 48 de 1968 sous le gouvernement de  Lleras Restrepo) qui permet aux forces armées d'organiser la « défense nationale » et la « défense civile », d'entraîner et de doter d'armes à usage privé des habitants des zones de résistance à la guérilla et d'organiser des groupes armés d'autodéfense coordonnés par l'armée nationale pour les impliquer directement dans l'affrontement et les soutenir dans la lutte anti-insurrectionnelle. Ces normes ont été la base légale de la promotion et de l'organisation des « autodéfense » ou paramilitaires. Des règles qui ont été déclarées inapplicables ou anticonstitutionnelles par la cour suprême de justice le 25 mai 1989. Depuis 1969, une série de manuels et de règlements contre la guérilla qui ont prouvé que des groupes paramilitaires avaient été créés avec l'approbation du Gouvernement colombien dans la perspective analytique de  Huntington  ont été émis par l'armée colombienne.

 

Ensuite, ces autodéfense comme celle du Magdalena Medio, d’Urabá, de Córdoba, des Llanos, de Cundinamarca et de  Valle del Cauca sont devenues Convivir, créées sous le gouvernement d’Ernesto Samper (1995) qui ensuite ont ouvert la voie à la massification des groupes paramilitaires dirigés par les frères Castaño et accompagnés par les factions d’extrême-droite impliquées dans les mafias du trafic de drogue comme celles liées à l'uribisme et au Centre Démocratique.

 

Ces groupes paramilitaires et leurs blocs ont été apparemment démobilisés en 2005 et soumis à la loi sur la justice et la paix (ou loi 975) qui accorde des avantages judiciaires aux groupes impliqués dans des massacres, des déplacements, des vols de terre et dans des violations des droits de l’homme.

 

Mais un phénomène similaire est réapparu pendant les années suivantes (2006–2022), phénomène qui a été appelé « nouveau para-militarisme » et dans lequel se sont impliqués des centaines de paramilitaires, de militaires, de personnalités politiques et d'autres fonctionnaires publics. Le nouveau para-militarisme anti-insurrection continue à être le bras armé et violent des élites régionales (politiques, patronales et militaires) pour conserver leurs privilèges dans tous les ordres sociaux.

 

Les groupes de nouveau paramilitaire sont : les Urabeños, les Rastrojos, les Paisas, les Caparros, les Pachencas, les Puntilleros, les Cuchillitos, les Centauros, les Carranceros, les Pradas, les Flacos, la Oficina de Envigado, la Cordillera et d'autres qui sont activement encouragés par des bataillons, des brigades et des membres de l'armée malgré les changements limités survenu récemment dans les forces armées après l'investiture du président Gustavo Pétro, le 7 août dernier.

 

Les chefs de ce nouveau para-militarisme sont connus: Siopas, Chiquito Malo, Gonzalito, Palustre, alias el Mono, Coronel Mira (Cartago), Toto (Quindío), Jorge 40, los Prada (Aguachica), Don Antonio, Diego Vecino, Ramon Quintero RQ, Rodrigo Flechas, Macaco et son frère, Juan Sin Miedo (GZuluaga), Jorge 40, les fils de Ramon Isaza, Jorge Pirata (Pacho, Cundinamarca), AGasca, Nebio Echeverry (Guayabero), el Gurre (Granada, Meta), Don Antonio (Barranquilla), Juancho Dique, Ismael (San Andresito de Bogotá en la Jiménez con 20) et d'autres qui sont sortis au grand jour et qui, de pair avec le l’uribisme, sont en train de réorganiser à Antioquia, Urabá et el Meta de nouveaux réseaux du nouveaux para-militarisme.

 

Malheureusement, les dirigeants actuels qui veulent la paix totale ignorent ce grave problème qui affectera certainement les dialogues  et les négociations en cours avec les différents groupes de guérilla parce que s'ils décident une trêve bilatérale ou multilatérale, l'armée continue ses opérations et ses offensives en manipulant ce néfaste nouveau para -militarisme qui cause déjà des ravages sur les territoires du Cauca, de Nariño, de Caquetá, de Guaviare, de Meta, d’Arauca, de Catatumbo, de Córdoba, de Choco, d’Antioquia  et sur la frontière avec le Venezuela en provoquant des incidents qui font des morts parmi les soldats comme celui qui s'est déroulé il y a quelques jours à Argelia Cauca. 

 

Si on n’éradique pas ce nouveau para-militarisme, les avancées de la paix totale se compliquent et sont retardées.

 

Note.

 

Certainement, les tables de dialogue et de négociation qui se forment avec les guérillas de l’ELN, des FARC-EP, de la Nouvelle Marquetalia et de l’EPL vont avoir besoin de nouvelles études du phénomène de la violence qui, puissent-elles en pas répéter les documents de ceux qu’on appelle les « violentologues » et reprendre la ligne des travaux de monseigneur Guzmán, de Umaña y de Fals Borda (1960), soutenus aujourd’hui dans les épistémologies du sud, dans les études complexes sur la pauvreté, dans les analyses philosophiques trans-disciplinaires et dans les savoirs des communautés locales. Les « études locales » devraient être la voie à couvre dans ces cas pour éviter les documents d’experts de Bogota déconnectés des territoires et pleins de théories qui sont le résultat de travaux hors contexte.

 

Traduction Françoise Lopez pour Bolivar Infos

 

Source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2022/10/20/colombia-no-es-posible-la-paz-total-con-el-neoparamilitarismo-activo/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2022/10/colombie-la-paix-totale-n-est-pas-possible-tant-que-le-nouveau-para-militarisme-est-actif.html