Mexique : Putschisme ou coopération internationale ? Le rôle polémique de l’USAID
En 2022, l'USAID a fait un don de 1 000 000 de dollars. Pour cette année, il n'y a pas encore d'informations actualisée.
Combattre la corruption, promouvoir la transparence et la reddition de compte et faire valoir l'État de droit sont les objectifs que poursuit USAID dans les pays où on lui permet d'opérer.
C'est pour ces raisons qu'elle finance Mexicains Contre la Corruption et l'Impunité A.C., une organisation qui, parmi ses fonctions, a celle de réaliser des enquêtes qui révèlent des cas de corruption.
Constituée en association civile sans but lucratif en novembre 2015, c'est en juin 2016, qu'elle a reçu l'autorisation du système d'administration fiscale pour recevoir des dons au Mexique et à l’étranger.
Mais le fait que ce n'est qu'à partir de l'année fiscale 2018, c'est-à-dire pendant la première année de gouvernement de López Obrador, que l'organisation a commencé à recevoir des transferts de l’USAID attire l’attention.
L'impartialité de l'organisation, la façon d'agir de ses directeurs, ainsi que des membres de son conseil consultatif qui se sont consacrés ouvertement à faire de la politique contre ce qu'on appelle la « quatrième transformation » a souvent été mise en cause.
Par exemple, avant de renoncer à la présidence de l'organisation, Claudio X. Gonzalez Guajardo a convoqué chez lui, plusieurs fois, les dirigeants des partis du vieux régime pour coordonner un front d’opposition contre le Gouvernement, violant ainsi le principe de ne pas poursuivre de buts politiques ou électoraux.
L'un de ses principaux alliés, Gustavo de Hoyos Walther, ancien président de la Confédération Patronale de la République Mexicaine (COPARMEX), transgresse également ce principe aujourd’hui.
De Hoyos Walther, qui aspire à devenir le candidat de l'opposition aux élections présidentielles de 2024, se consacre à faire campagne contre le Gouvernement fédéral et, sans aucune conséquence, continue à faire partie du Conseil Consultatif de Mexicain contre la Corruption et l’Impunité A. C.
Les expulsions
Pendant les années 2000, plusieurs présidents latino-américains ont rejeté la façon d'agir de l'USAID dans leur pays et, en dernier recours, ont procéder à son expulsion.
À de multiples occasions, l'agence étasunienne a été accusée de mener à bien des opérations secrètes destinées à saper la légitimité de Gouvernements élus démocratiquement.
En 2008, les relations entre Washington et la Bolivie se sont tendues à un niveau sans précédent. Tout d'abord, le président Evo Moralese a expulsé l'ambassadeur des États-Unis, Philip Goldberg, face à une ingérence supposée dans les affaires politiques du pays.
Quelques mois plus tard, Morales a expulsé l'Administration de Contrôle des Drogues (DEA), une agence avec laquelle Lopes Obrador a également eu des problèmes pour ingérence.
Enfin, en mai 2013, Evo Morales a annoncé la fin de la présence en Bolivie de l'USAID, une agence qui, selon lui, agissait non avec des buts sociaux, mais politiques et avait une « mentalité de soumission et de domination. »
Les relations entre l'USAID et l’Equateur
En 2012, le président de l'époque, Rafael Correa, l’a accusée d'ingérence pour avoir financé des groupes qu’il considérait comme d'opposition–certains groupes soi-disant indigènes et environnementalistes–à son Gouvernement. Etant donné qu'on n’a pas pu arriver à un accord pour renouveler l'accord de coopération avec le pays, l'agence étasunienne s'est vu obligée de quitter le territoire équatorien en décembre 2013.
Toutefois, Correa a noté que l'arrêt de la coopération avec l'USAID n'impliquait pas nécessairement une détérioration des relations avec le Gouvernement nord-américain, et encore moins une rupture avec ce dernier.
Le Mexique
Le Gouvernement de López Obrador, pour sa part, s'est limité à lancer des appels au Gouvernement de Joe Biden pour qu'il mette un frein au financement de l'USAID à des organisations qu'il considère « d'opposition ». Mais il n'y a pas de réponse de la part de Washington.
Tout indique que, jusqu'à présent, le président mexicain n'a pas la moindre intention de lancer un ultimatum à l'agence étasunienne ou au moins de soumettre sa présence au respect de certaines règles.
Une alliance stratégique, en vue de se renforcer
Le gouvernement mexicain maintient une étroite coopération avec diverses agences étasuniennes qui se consacrent à la promotion du développement, à la sécurité et aux opérations de renseignements.
Au milieu de l'année 2021, les Gouvernements du Mexique et des États-Unis ont signé un mémorandum d'entente destiné à renforcer les liens entre l'Agence Mexicaine de Coopération Internationale pour le Développement (AMEXCID) et l’USAID.
À contre-courant du récit reproduit à partir du Palais national et qui laisse entrevoir la nécessité d'établir des limites, l'USAID à augmenter le nombre de programmes de coopération aussi bien avec le Gouvernement fédéral qu'avec les Gouvernements des états.
En fait, le financement à des organisations qu'il considère comme « d'opposition » n'a pas été la seule chose qui a gêné le président Lopez Obrador. La signature d’accords entre l’USAID et les représentants des états l’a gêné aussi.
Il suffit de se souvenir qu'en octobre de l'année dernière, le gouverneur de Zacatecas, David Monreal, issue du parti Mouvement Régénération Nationale (MORENA), a reçu une délégation du Gouvernement états-unien dirigée par l’ambassadeur Ken Salazar.
Parmi ceux qui accompagnaient Salazar, il y avait du personnel de l'Administration de Contrôle des Drogues (DEA), du Bureau Fédéral d'Investigation (FBI) et de l'USAID, tous avides de resserrer les liens avec le gouverneur en charge d'une entité clé pour le trafic de drogue.
Et bien que le gouverneur moraniste ait nié avoir signé des documents officiels après la désapprobation du président, ce qui est certain, c'est que le fait que les gouverneurs signent des accords avec le Gouvernement et des agences des Etats-Unis, contrevenant ainsi à l'article 117 de la Constitution, est devenu une pratique courante.
L’USAID opère au niveau local à travers différents programmes. Parmi eux, Projusticia, qui apporte une assistance technique en matière de justice dans 12 entités et Surges, destiné à créer des emplois et à garantir la soutenabilité à Campeche, au Chiapas, à Oaxaca, à Quintana Roo, à Tabasco, au Yucatán et à Veracruz.
Elle participe aussi à « en semant des opportunités », un cadre de coopération bilatérale annoncé en décembre 2021 qui propose de faire face à la migration illégale en provenance d'Amérique centrale grâce à des initiatives de développement agricole et à des emplois pour les jeunes.
Dans le document « stratégie de coopération pour le développement du pays », publié par l'USAID et actualisé en juin de l'année dernière après un contrôle des risques et des défis au niveau stratégique, il est dit que dans les prochaines années, on continuera à renforcer la relation stratégique avec le Mexique.
Pour y parvenir, l’USAID propose de coordonner les efforts avec les autorités fédérales dans le travail avec les gouverneurs des états et les gouverneurs locaux. Sur ce plan, le Gouvernement mexicain n'a pas fait d’objection.
Ainsi, bien que dans son discours, le président López Obrador réprouve la façon d'agir de l'USAID, dans les faits, son Gouvernement n'a rien fait d'autre que d’intensifier la coopération.
Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos
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