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Argentine : Atlas Network, ceux qui donnent des instructions à Milei

20 Janvier 2024, 17:20pm

Publié par Bolivar Infos

 

 

Après chaque victoire électorale, il y a ou un mouvement organisé populaire avec une trajectoire renforcée ou un réseau de groupes de réflexion et de groupes de pouvoir qui tirent les ficelles.

 

Trop souvent, nous avons tendance à penser que les évènements politiques surviennent de façon naturelle, spontanée, sont le fruit de situations déterminées, de circonstances qui provoquent un résultat non prévu ni planifié. Mais, ce qui est normal, c’est que derrière les scénarios politiques, il y est toujours des forces qui gèrent les évènements, contrôlent les résultats et consignent des objectifs.

 

La victoire de Milei en Argentine a été présenté comme l’éclosion subite d’un économiste anarco–libéral fou face à une économie argentine désespérée et à une logique d’indignation des citoyens qui n’ont pas vu d’autre option qu’une rupture brusque avec la situation, d’où qu’elles elle vienne.

 

Rien de semblable à la réalité. Comme dans tellement d’occasions, derrière chaque victoire électorale, il y a un mouvement populaire organisé avec une trajectoire renforcée ou un réseau de groupes de réflexion et de groupes de pouvoir qui tirent les ficelles. Il est évident que dans le cas de Javier Milei et de son parti La Liberté Avance, l’explication est la seconde même si les masses de gens sont en feu dans leurs scénographies et effrayées.

 

Déjà en septembre, dans une certaine presse argentine se détachaient deux entités soutenant Milei : la fondation Atlas pour une Société lLbre et Liberté et Progrès.

 

Dans le conseil académique de la fondation Atlas, on trouve la ministre des affaires étrangères nouvellement nommé Diana Mondino avec un patrimoine de pus de 5000 000 000 de pesos selon sa déclaration sous serment. Une curieuse ministre qui arrive à ce ministère avec un président qui gagne les élections  en criant qu'il va combattre la caste.

 

Eduardo Figueira Lima, cerveau du programme de santé du nouveau président argentin qui finalement n’a pas été ministre malgré les rumeurs qui le désignaient est également membre d’Atlas et de Liberté et Progrès et en 2018, la fondation Atlas a accordé à Javier Milei le « prix de la liberté » , qu’elle a l’habitude de remettre à des dirigeants politiques, à des économistes et à des journalistes.

 

Le lendemain de son investiture en tant que président, Liberté et Progrès a ouvert son site avec un éditorial qui commençait ainsi: « La Fondation Liberté et Progrès félicite Monsieur Javier Milei pour  son investiture en tant que président de la nation. Nous le reconnaissons comme un homme engagé envers les principes de liberté et de progrès qui sont le noyau de notre philosophie. »

 

Le président du conseil académique est Alberto Benegas Lynch (Fils), un économiste libéral que Milei estime et appelle « grand maître ». Dans ce conseil apparaissent à nouveau les gens de Milei : Mondino, Figueira Lima, le conseiller en éducation, Martin Krause et le cerveau du plan de dollarisation, Emilio Ocampo.

Ces deux fondations font partie d’un groupe étasunien d’importance mondiale : Atlas Network.

 

Bien qu’il soit évident que l’argent vient de là , ils ne sont pas très transparents dans leur comptabilité. Le compartiment « financement » du site de la fondation Atlas  résout ce problème de cette façon : « La fondation Atlas n’accepte pas de fonds publics, de fonds de partis politiques et se finance à partir des apports de ses associés qui sont canalisé à travers des cartes de crédit et de débit et de ses donateurs. Aussi bien les quotas sociaux que les donations sont déductibles des impôts sur les bénéfices. La politique de financement large et diverse constitue l’un des piliers de fonctionnement de notre organisation. » Fin de l’information.

 

Selon la publication argentine El Destape qui lui a demandé « la fondation Atlas d’Argentine a précisé qu’ils ne sont pas une filiale de l’entité étasunienne mais qu’ils ont fait avec elle « des activités conjointes. » Ce sontceux qui ont l’argent, ont-ils ironisé. »

 

De toutes les fondations et les groupes de pression qui ont soutenu Milei, « Atla Network est la plus importante, et nous voyons qu’ils ont été très actifs en Argentine, », a signalé au journal, Jean Carlos Summa, journaliste itallo-brésilien qui a travaillé sur les deux campagnes du président Luiz Inácio Lula Da Silva au Brésil et est actuellement chercheur à l’école des hautes  études en sciences sociales de Paris.

 

« Beaucoup d’argent pour soutenir Atlas Network aux États-Unis vient des frères (Charles et David) Koch : des super riches, patrons de compagnies pétrolières qui ont un ordre du jour rétrograde qui nie le changement climatique. Ils mettent de l’argent dans Atlas pour soutenir des gens comme l’ancien président de droite du Brésil, Jair Bolsonaro et Milei, », a expliqué Summa.

 

Dans l’article du site du groupe de réflexion Network Research publié en 2022, ils parlent de Milei comme  de « la construction d’une nouvelle version de Bolsonaro » et signalent qu’ Atlas Network. « a envoyé environ 7 200 000 $ » pour soutenir des groupes de réflexion en Amérique latine, « entre 2010 et 2018. »

 

Le réseau Atlas network lui-même soutient sur son site qu’il aspire à « un monde libre, prospère et pacifique, dans lequel les principes de liberté individuelle, les droits de propriété, un Gouvernement limité et des marchés libres sont assurés par l'État de droit. » Est-ce que nous rêvons ?

 

Atlas Network, a actuellement des sièges dans une centaine de pays et dans chacun d'entre eux, il a des groupes de réflexion (laboratoires d'idées qui exercent en tant que groupes de pouvoir et influencent, qui parient sur les politiques libérales et sur leurs candidats et génèrent également des idées et des opérations contre l'avancée des Gouvernements progressistes. C'est-à-dire que tout est inventé aux États-Unis.

 

La revue Argentine Zoom expliquait il y a deux ans qu’ « [Atlas Network] s'est installé en Argentine à la demande du banquier Eduardo Maschwitz en 1998, pendant l'apogée des politiques néolibérales qui ont balayé le pays. » Actuellement, Eduardo Maschwitz occupe la charge de président du conseil d'administration de la fondation Atlas pour une Société Libre.

 

Parmi les contributeurs au fonctionnement d'Atlas figure le Jockey Club, un bastion de l'oligarchie dans lequel la perméabilité des classes est presque inattaquable. Selon la revue, pour faire partie de ce « club de cavaliers représentatif de l'activité politique  et économique du pays », il faut apporter 500 000 $. Il est paradoxal que ce soit eux qui aient aidé l'Argentine à avoir un président qui est arrivé au pouvoir en hurlant contre la caste.

 

Le trésorier du jockey Club est l'avocat, Eduardo Antonio Santamarina, membre de l'Opus Dei  et député de la ville de Buenos Aires. Sous son mandat en tant que législateur, Santamarina a été conseiller d'un partenaire de son parti, Federico Alberto Young, un ancien juge civil sous la dictaturei qui a défendu le dictateur Videla dans les procès lors desquelles il a été condamné pour crimes contre l’humanité.

 

C'est que les prémices de la fondation Atlas reposent sur une soi-disant « liberté » qui donne son aval aux dictatures du passé et conspire pour renverser des Gouvernements démocratiques qui ne sont pas de son goût.

 

Atlas Network a été créé en 1981 par l'entrepreneur britannique Anthony Fisher dans une absolue synergie avec le thatchérisme et comme revendication du prix Nobel d'économie autrichien ultra libéral Friedrich Hayed. Atlas est un échafaudage de fédérations de fondations, de centres de réflexion et d'institutions académiques qui se proposent de diffuser les politiques de libre marchés dans toute la planète.

 

« Tapisser le monde avec des groupes de réflexion pro marché libre », a été la mission que lui a assigné Fisher depuis sa naissance. Une enquête de la revue uruguayenne Brecha signale que « la réduction des impôts pour les plus riches, la privatisation des entreprises publiques et du système éducatif, le rétrécissement de l'État, l'attaque du « pouvoir » [démocratique, pas économique] ou de l'influence des syndicats et le démantèlement des systèmes de protection sociale figurent expressément parmi les objectifs de leurs principaux dirigeants. » C'est-à-dire que Milei n'a rien inventé, on lui a tout dicté.

 

Le réseau Atlas subventionne des groupes de réflexion, finance des bourses, donne et organise des cours, des réunions et des séminaires et organise des concours. « C'est un projet de persuasion », disait un document élaboré début 2020 par ses dirigeants. En Amérique latine, nous savons déjà comment fonctionnent les persuasion néolibérales qui sont créés aux États-Unis. Le directeur exécutif, Brad Lips, a dit en janvier 2020 que le budget annuel ajouté du réseau Atlas tournait autour de 909 000 000 de dollars.

 

La revue uruguayenne Brecha signale que pendant longtemps, le réseau Atlas est resté dans l'ombre mais qu’à la mi 2017, le jeune journaliste étasunien Lee Fang a publié dans la revue digitale The Intercept une enquête détaillée qui a commencé à révéler ses origines, son financement, sa structure, ses définitions, ses liens et sa croissance exponentielle, surtout en Amérique latine.

 

En mars 2017, le journaliste a couvert le Forum pour la Liberté en Amérique latine, une réunion fastueuse organisée par le réseau Atlas, à l'hôtel Brick de Buenos Aires, à laquelle ont participé des conférenciers de la nouvelle droite politique, sociale et patronale de la région. Le forum a eu trois invités spéciaux : le président argentin de l'époque Mauricio Macri, l'écrivain péruvien, président de la Fondation Internationale pour la Liberté, Mario Vargas Llosa et l'ancien ministre des finances de la dictature chilienne d'Augusto Pinochet, Hernan Buchi.

 

Fang explique que « les groupes de réflexion associés à Atlas reçoivent un financement également discret du Département d'État et de la National Endowment for Democracy (Fondation Nationale pour la Démocratie, NED), un bras essentiel du « pouvoir doux » des États-Unis. » Il signale aussi qu'il y a « des enquêtes récentes sur le rôle de certains multimillionnaires conservateurs comme les frères Koch dans la diffusion d'une version business–friendly de la pensée libertaire. » Tout cela pour qu’ensuite Milei le vende comme une croisade contre la caste.

 

The Intercept montrait qu’Atlas a eu des liens étroits avec des groupes de réflexion et des organisations en relation avec le coup d'Etat au Honduras, au Venezuela et au Brésil, et également avec le fujimorisme au Pérou et est lié charnellement à la Fondation Equateur Libre, au macrisme en  Argentine et au trumpisme aux états-Unis.

 

Dans le long reportage de la revue Zoom, le journaliste Eduardo Silveyra signale que « l'Argentin Alejandro Chafuen qui a été président de celle-ci au niveau mondial a participé activement aux manifestations destinées à destituer Dilma Rousseff au Brésil, et a protégé l'arrivée de Jair Bolsonaro au gouvernement grâce à la fondation et à des organisations proches d'elle. » Chafuen, rappelle-t-on dans la revue argentine Pagina12, a une un long passé dans le monde économique et financier des États-Unis, mais il a aussi laissé son empreinte en Argentine dans la liquidation de la société financière Coimpro et a été condamné en 2005 par la Chambre nationale du contentieux administratif (Cámara Nacional en lo Contencioso Administrativo).

 

Le réseau a le soutien financier de grande corporations parmi lesquelles se détachent Exxon Mobil, Philip Morris, Pfizer, Shell et Procter et Gamble mais aussi de grands multimillionnaires comme les frères Charles et David Koch, membres de la liste des 10 familles les plus riches du monde. En 1985, peu de temps avant d'être mis en fonctionnement, le réseau Atlas comptait déjà 27 institutions associées dans 17 pays. Actuellement, il en a plus de 500 dans presque 100 pays. Selon son site, en 2022, 76 autres groupes de réflexion ont rejoint le réseau.

 

Parmi ceux-ci se détache Cedice Libertad au Venezuela, le principal groupe de réflexion d'Atlas à Caracas. Lee Fang révèle dans son enquête dans The Intercept que déjà en 1998, il recevait un financement continu du Center fort International Private Enterprise (Centre pour l'entreprise privée internationale).  Dans une lettre de recueil de fonds, la NED signale que l'aide à Cedice est destiné à « un changement de gouvernement. » Le directeur de Cedice faisait partie des signataires du « décret Carmona » qui soutenait le bref coup d'Etat militaire contre Chavez en 2002. Un câble de 2006 révèle aussi la stratégie de l'ambassadeur des États-Unis, William Brownfield pour financer des organisations politiques au Venezuela : 1) renforcer les institutions démocratiques, 2)  infiltrer la base politique de Chavez, 3)  diviser le chavisme, 4) protéger les affaires, étasuniennes et 5) isoler Chavez au niveau international. »

 

Cedice organise depuis des années les protestations contre le président Nicolas Maduro et a des relations étroites avec l'opposante Maria Corina Machado qui a reconnu publiquement le travail d'Atlas sur une vidéo envoyée au groupe en 2014 sur laquelle elle apparaît en train de dire : « merci à Atlas Network, à tous les combattants pour la liberté. »

 

Il est évident que les ressources ne manquent pas à Atlas Network pour créer des candidats politiques qui vocifèrent  qu'ils n'appartiennent pas à la classe politique et se vendent comme des dirigeants spontanés comme Javier Milei en Argentine ou le banquier Guillermo Lasso, ancien président de l'Équateur.

La fondation a aussi des relations de collaboration étroites avec Sebastián Piñera au Chili, Bolsonaro au Brésil, et Lacalle Pou en Uruguay. Tous, évidemment, des dirigeants populaires spontanés.

 

Atlas a aussi des hommes de main en Espagne. Dans son réseau se trouve l'institut Atlantique de gouvernement dans lequel apparaissent des politiciens ultra conservateurs comme José Maria Aznar ou Isabel Diaz Ayuso, tout de membres du secteur le plus à l'extrême droite du Parti Populaire espagnol.

 

Il y a deux ans, le scandale des « papiers de Pandore » a frappé de plein fouet certains des principaux visages d'Atlas Network. Comme on s'en souvient, on appelait les « papiers de pandore » les millions de documents révélés par le consortium international de journalistes d'investigation qui montraient des comptes secrets dans des paradis fiscaux appartenant à des personnalités et des politiciens, comptes dans lesquels ils cachaient de l'argent provenant de la corruption ou de l'évasion fiscale. Par exemple, l'écrivain Mario Vargas Llosa, président de la fondation internationale pour la liberté (FIL), membre du réseau Atlas Network, figurait dans ces documents comme titulaire de la société offshore Melek Investing entre 2015 et 2017.

 

En juillet 2021, Vargas Llosa a fait partie du même panel que deux dirigeants de la droite latino-américaine qui apparaissent aussi sur les listes de « Pandore » pour leurs liens avec des réseaux de sociétés offshore : le président de l’Équateur Guillermo Lasso et le président  chilien Sebastián Piñera. A cette réunion patronnée par le réseau ultra capitaliste a participé également l'ancien président argentin Mauricio Macri dont l'entourage est également impliqué dans le scandale des « papier de Pandore. »

 

L'expert en réseaux Julian Macias signalait alors dans le journal espagnol Publico:  « Il y a de plus en plus de preuves du niveau antidémocratique de ce réseau international qui soutient des coups d'Etat, contrôle et manipule des médias en plus de défendre l'idée que les impôts n'existent pas, qui agit en sautant par-dessus la loi pour s'enrichir et éviter les impôts que les pauvres payent. »

 

Et tout cela autour d'un concept emblématique pour Atlas network et tous ses hommes de main : la liberté. Mais nous n'oublions pas que, dans le capitalisme, la liberté, c'est tout ce que vous pouvez faire avec l'argent que vous avez dans votre bourse ou sur votre compte en banque. Regardez combien vous avez et vous saurez quelle liberté vous accorde Atlas Network.

 

Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos

 

Source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/opinion/2024/01/16/network-atlas-los-que-dan-las-instrucciones-a-milei/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2024/01/argentine-atlas-network-ceux-qui-donnent-des-instructions-a-milei.html