Argentine: Répression et corruption lors de l’approbation de la loi Bases au Sénat
par Nicolas Hernandez
Traduction Françoise Lopez, pour Amérique latine-Bolivar infos
Dans un contexte de répression, d’arrestation de dizaines de manifestants et de députés gazés, Milei a réussi à faire adopter sa première loi au Congrès.
Il était près de minuit minuit, le 12 juin, lorsque Victoria Villarruel, vice-présidente argentine et défenseur proclamée des génocides, a ouvert le vote nominal pour approuver ou désapprouver le projet d'institutionnalisation des réformes néolibérales du modèle d'extrême droite du président Javier Milei, la "Loi Bases".
Le vote a abouti à un match nul. L'opposition dirigée par Union pour la Patrie a déclaré son rejet avec 33 des 72 sénateurs. Le radical Martin Lousteau et 2 sénateurs provinciaux s'y sont joints. Les 36 voix, en faveur de la proposition avaient été obtenues par des alliances, des négociations et même l'offre d'un poste de représentant auprès de L'UNESCO à la sénatrice Lucía Crexell, qui a été dénoncée pour corruption pour cette situation.
« C'est comme si les extorsions dont de nombreux sénateurs ont été l’objet étaient normales. Ce n'est pas normal! », a déclaré la sénatrice Juliana Di Tullio lors de son discours en évoquant le changement de vote de Crexell.
La décision finale était alors entre les mains de la vice-présidente qui a le pouvoir constitutionnel de résoudre ce genre de problèmes et elle a tranché en faveur de l'approbation. L'initiative a été approuvée globalement. Ensuite, l'article a été discuté, plusieurs points ont été retirés dans le cadre des concessions de l’Exécutif.
« Ce qui s'est passé dans la rue n'est pas non plus normal. Ma solidarité avec les députés qui ont été ouvertement réprimés par la police", a déclaré Di Tullio, qui a également souligné que la famille D’une sénatrice, Natalia Gadano, a été l'objet d'un intimidations. « Nous avons l'impression qu'ils ne nous demandent pas des outils. Ils nous extorquent pour que nous votions des outils pour un président qui veut détruire l'État", a-t-il conclu.
Le parti au Gouvernement a célébré « l'approbation historique » de la loi et a justifié la répression qui a fait des blessés et provoqué des dizaines d'arrestations. Des personnes âgées et des enfants ont reçu du gaz au poivre, des lacrymogènes et du gaz moutarde. Des canons à eau et des balles en caoutchouc ont également été utilisés.
Le Gouvernement a justifié sa décision par une soi-disant tentative de coup d'État de groupes terroristes et le président a félicité la ministre de la sécurité, Patricia Bullrich, pour son travail.
En fait, des images montrent l'infiltration d'individus cagoulés qui ont ensuite été bien accueillis dans les rangs de la police après avoir retourné une voiture et y avoir mis le feu. Ce n'est pas la première fois que l'actuelle ministre de la Sécurité utilise ces méthodes.
Mais en réalité, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté pacifiquement contre la loi qu'elles désignaient comme un moyen de "vendre la patrie". Et après l'approbation de la loi, on a frappé sur des marmites et des casseroles dans tout le pays et des appels spontanés ont été lancés à plusieurs endroits pour condamner le modèle libertaire.
Ce qui a été approuvé
La loi déclare une urgence publique en matière administrative, financière et économique.
Plus précisément, ces urgences permettent au Gouvernement de s’attribuer des attributions qui sont officiellement l’apanage du Congrès dans ces domaines.
La loi autorise la privatisation de la compagnie d’énergie nationale ENARSA et de plusieurs des principaux opérateurs ferroviaires du pays et permet de sous-traiter l'eau de la ville de Buenos Aires. Elle stipulait aussi l'élimination des entités dépendantes de l'État mais cela a été modifié et des entités telles que l'Institut national du cinéma et des arts audiovisuels (INCAA) continueront à fonctionner.
Cette loi avance dans la livraison des ressources naturelles à des multinationales étrangères grâce à des incitations aux gros investissements (RIGI) qui accordent des concessions fiscales et des concessions sur la souveraineté sous prétexte de favoriser les investissements.
Elle introduit aussi des réformes qui assouplissent les droits du travail et une deuxième loi qui a été votée jeudi introduit un paquet fiscal qui ajoute une série d'impôts. Le blanchiment d'argent est également favorisé.
Ce n'est pas encore une loi
Si le parti au Gouvernement a célébré « en fanfare » l'adoption de la loi en général, pour y parvenir, il a dû faire de multiples concessions qu'il avait déclaré ne pas être prêt à faire.
Le projet original présenté à la fin de l'année dernière comprenait 664 articles et après une série d'allers-retours, le gouvernement a décidé de retirer le projet de loi et de le ramener à l'instance précédente.
Quelques mois plus tard, il est revenu dans une version réduite d'un peu plus de 200 articles et, après de multiples modifications, il a été approuvée par la Chambre basse. Lors de son débat au Sénat, de nombreux points du projet ont également été corrigés ou directement supprimés.
Par exemple, sur les 40 entreprises que le Gouvernement avait l'intention de privatiser, avec les changements successifs, il ne pourra en privatiser qu'une, dans sept autres, il pourra permettre une participation privée et la vente des autres devra être soumise au Parlement.
A l'origine, Milei avait exigé que l'urgence soit déclarée dans 11 zones et seulement 4 ont été accordées.
Le projet de loi qui proposait un paquet fiscal pour augmenter les recettes a été réduit sur des aspects comme l'impôt sur les bénéfices et la réforme des retraites.
Désormais, en raison des modifications apportées au Sénat, le texte doit retourner à la Chambre des députés qui peut approuver les modifications apportées, ce qui devrait être fait dans les prochaines semaines.
Source en espagnol :
https://www.telesurtv.net/aprobacion-de-ley-bases-en-argentina-represion-y-denuncias-de-soborno/
URL de cet article :
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