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Colombie : A propos de la grève patronale

12 Septembre 2024, 16:51pm

Publié par Bolivar Infos

 

 

Traduction Françoise Lopez pour Amérique latine–Bolivar infos

 

Même si l'opposition au premier Gouvernement de gauche du pays ne lui a donné aucun répit au cours des deux dernières années, la semaine dernière, la situation a été extrêmement difficile. La droite et ses puissants médias ont intensifié les attaques sur tous les terrains.

 

Plusieurs composantes du coup d’Etat doux qui plane sur le Gouvernement ont semblé être activées.

 

La plus grave a été une grève des transports de marchandises qui a duré quatre jours, provoquant le blocage des principales routes du pays, d'énormes pertes économiques et des troubles sociaux.

 

Voyons un peu le contexte. La Colombie est un pays désarticulé, avec une géographie très difficile, où les glissements de terrain et autres types d'accidents se produisent assez fréquemment.

 

Par conséquent, le déplacement des marchandises destinées au marché intérieur est soumis à de nombreuses vicissitudes, y compris les problèmes d'ordre public. Sans parler du transfert de la cargaison vers les ports d'embarquement des Caraïbes ou du Pacifique.

 

À cela s'ajoute la négligence historique des élites qui, pendant des siècles ont privilégié leurs intérêts paroissiaux immédiats au détriment de la construction d’une infrastructure minimale pour le développement et l'intégration territoriale. Le retard dans la construction de routes est énorme, même par rapport à la région.

 

Cependant, comme dans les pays d'Amérique latine, à partir des années 90, les vents néolibéraux ont ouvert la voie à des concessions de toutes sortes : construction de routes et de ponts, établissement de péages, avec d'énormes avantages pour le secteur privé.

 

L'État a renoncé à toute idée d'aménager des voies ferrées ou de ressusciter la navigation sur notre principale artère fluviale, la rivière Magdalena. Un coup final a ainsi été porté à certains projets ferroviaires régionaux qui ont rempli un rôle important dans le passé. La réactivation des chemins de fer a été précisément l'une des propositions du président Petro. Un projet qui commence à se concrétiser.

 

Aujourd'hui, le commerce fluvial est principalement concentré sur le transport d'hydrocarbures, de pétrole et de charbon, entre les zones de production. Les projets qui ont été promus par les Gouvernements précédents pour développer la navigation intérieure à grande échelle, sous la direction du secteur privé, ont échoué. Le Gouvernement travaille actuellement à la restructuration d'un projet public mais la vérité est que sur le Magdalena, les chaloupes, les pirogues et les radeaux prédominent encore.

 

Pour tout ce qui précède, les décisions prises par l'État pendant des décennies ont fini par privilégier et donner d'énormes privilèges à un secteur puissant qui contrôle le transport de marchandises terrestres.

 

Revenons maintenant à la grève de la semaine dernière. L'augmentation des prix du diesel qui l'a provoquée a été annoncée dès le début du Gouvernement. Au cours de l'année dernière, des négociations ont été convoquées mais n’ont pas abouti.

 

Le Gouvernement a ensuite publié un décret qui a supprimé la subvention et augmenté le prix de l'ACPM. Cette mesure a été prise pour réduire l’énorme trou dans les finances publiques laissé par le Fonds de stabilisation pétrolière (FEP). C'était une décision que l'ancien président Duque a évité de prendre comme il lui revenait de le faire, pour des raisons politiques.

 

Mais cela  a provoqué une augmentation disproportionnée de la dette, en contractant avec le FMI un prêt dont les intérêts léonins doivent être payés à très court terme par le Gouvernement actuel.

 

Qui bénéficie de la subvention sur le carburant ? Les grands entrepreneurs intermédiaires du transport, pas les camionneurs. Des individus comme Henry Cárdenas, président de Fedetranscarga et propriétaire d'une puissante flotte de camions. Aussi bien celui-ci que d'autres de la même trempe sont également de forts opposants au Gouvernement, alignés politiquement sur l'extrême droite qui proclame son intention de renverser celui-ci.

 

La décision de Petro de mettre fin à cette subvention doit également être comprise dans son objectif de renforcement et de réorientation des dépenses publiques destiné à améliorer les conditions de vie des personnes et des territoires qui en ont  le plus besoin.

 

Faire face à la voracité du secteur privé, c’est aussi une condition nécessaire à la paix totale et à la substitution des cultures.

 

Comme le souligne le journaliste Michael Ceaser dans une récente lettre ouverte, la suspension de la subvention est également une mesure de justice sociale et environnementale car ceux qui reçoivent une part disproportionnée de ces subventions sont les propriétaires de véhicules privés haut de gamme, généralement les personnes ayant le plus grand pouvoir d'achat et qui polluent le plus.

 

Finalement, une négociation difficile a eu lieu et le Gouvernement a dû réduire le montant de l'augmentation pour que les blocages soient levés. Mais il y a eu un bénéfice. De nombreux et divers secteurs qui participent à la chaîne du transport de marchandises ont participé aux réunions ouvertes. Le Gouvernement a insisté pour bien les différencier.

 

Ainsi, un engagement a été signé avec les secteurs de base qui, en plus de réduire l'augmentation programmée, comprend 14 points supplémentaires, notamment travailler pour des transformations structurelles dans le secteur et veiller à ce que les grands intermédiaires respectent le paiement du fret dans les règles du travail avec leurs employés, les chauffeurs.

 

L'opposition a rappelé le soutien du président à l'explosion sociale de 2021, qui a créé les conditions de sa victoire aux élections. Mais évidemment, la situation actuelle est très différente. Ce Gouvernement a garanti la protestation et la mobilisation sociale, mais c'est une autre histoire.

« Nous savons parfaitement distinguer ce qu'est une grève patronale qui a toujours des intérêts économiques ou politiques obscurs, d'un mouvement social, comme ce fut le cas avec l'explosion social, lors du Gouvernement précédent », a déclaré Petro dans sa dernière allocution.

 

Pour l’instant, nous, les secteurs progressistes et démocratiques du pays, sommes toujours en alerte pour défendre notre Gouvernement.

 

Source en espagnol :

https://www.telesurtv.net/opinion/a-proposito-del-paro-empresarial-en-colombia/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2024/09/colombie-a-propos-de-la-greve-patronale.html