Uruguay : Majorité partielle au Parlement, engagement sur la sécurité sociale, etc…
Par Agustín Zabala
Traduction Françoise Lopez pour Amérique latine–Bolivar infos
Pour la politologue Camila Zeballos, la sécurité publique, l'une des principales préoccupations des citoyens, impliquera de prendre des mesures immédiates comme d'annoncer l’équipe.
La victoire du Front Large (FA) au second tour de ce dimanche ouvre un nouveau scénario pour les cinq prochaines années dans le pays et une série de défis et d'opportunités pour le Gouvernement dirigé par Yamandù Orsi qui sera investi le 1er mars 2025.
Le Front Large a obtenu la majorité au Sénat au premier tour d'octobre, mais pas à la chambre des députés, ce qui l‘obligera à négocier avec l'opposition pour que ses projets de loi clés soient approuvés.
Après la défaite au plébiscite sur la sécurité sociale, le 27 octobre, avec 39 % des voix, et comme l'avait promis la force politique dans son programme de gouvernement, le dialogue sur la sécurité sociale sera un autre des défis du Gouvernement élu. Étant donné que c'est l'une des principales préoccupations des citoyens, selon les sondages, l'insécurité sera aussi un problème dans lequel le futur Gouvernement devra investir son énergie et, selon le Front Large, la pauvreté et surtout la pauvreté des enfants seront parmi ses priorités.
Selon les politologues Camila Zeballos et Micaela Gorriti, le défi de négocier au Parlement avec une majorité partielle est « gérable » et se fera « loi par loi ». Gorriti a souligné que le FA essaierait de négocier avec le Cabildo Abierto (CA), tandis que Mme Zeballos a estimé que le Front Large « pourrait se rapprocher » d'Identité Souveraine de Gustavo Salle dans certains domaines tels que la sécurité sociale. « La négociation sera marquée par le type de politique qui sera promu, a-t-elle déclaré.
Un autre élément déterminant pour la négociation est le fait de savoir si la coalition reste en l'état. Par conséquent le dirigeant de CA, Guido Manini Rios a exprimé publiquement ses doutes sur l’objectif de maintenir l'alliance au cas où il perdrait le Gouvernement.
Dans cette direction, les deux politologues sont d'accord sur le fait que le Gouvernement du Front Large aura les moyens de faire avancer cette négociation. Zeballos estime que Orsi lui-même a un profil « capable de négocier avec des acteurs très divers, qui dépassent l'axe droite–gauche » alors que Gorriti note la possibilité que les sénateurs élus puissent stimuler les négociations à la chambre basse. C'est pourquoi elle dit qu’elle voit le sénateur Alejandro Sanchez du Mouvement de Participation Populaire (MPP) comme un coordinateur.
« Je ne pense pas qu'il y ait de problème pour gouverner, nous allons voir certains acteurs clés comme des sénateur qui pourraient participer indirectement, en tant que médiateurs, comme Pacha [Sánchez], Mario Bergara ou Alfredo Fratti. J'imagine Sanchez comme le grand coordinateur du groupe du Front populaire et qu’il pourrait jouer le rôle que jouait Lucia Topolanski, » a dit Gorriti. Pour Zeballos, le groupe du MPP, « est un grand soutien pour Orsi, parce qu'il protégera les politiques du président et lui facilitera beaucoup les choses. »
La sécurité sociale : Orsi s’y est engagé et devra la mettre en place
Sur le défi d'engager le dialogue sur la sécurité sociale et d'arriver à la mettre en place, Gorriti déclare que l'expérience montre que les dialogues sociaux finissent souvent par être « ad hoc », c'est pourquoi le moment et la façon dont il sera mené seront important et aussi si c'est « seulement un dialogue délibératif ou consultatif. » je pense que cela va être une source de conflit » a déclaré la politologue alors que Zeballos déclare qu'Orsi « s’y est engagé » et qu'il devra « la mettre en place. »
« Le dilemme qui se présente est que 60 % de la population a dit non à la réforme proposée par le PIT–CNT, alors il sera important de voir comment va être le message politique et s'il est suffisamment clair pour les deux publics. C'est un grand défi et je pense qu'il faudra beaucoup plus que le soutien du groupe du MPP, mais de tout le Front Large et qu'il faudra voir aussi quelle sorte de coordination avec d'autres acteurs sociaux comme les syndicats et les chambres du commerce il peut y avoir. » Dans cette optique, elle a estimé que dans ce processus, Orsi « devra prouver qu'il a l'esprit de dialogue ».
Pendant la campagne électorale, Oria a présenté dans le département de Colonia, quelques 48 mesures prioritaires de son programme de gouvernement. Ses propositions se structurent en trois axes : développement économique, sécurité et protection sociale. Pendant la campagne, en outre, le président élu a focalisé ses initiatives sur la nécessité que le pays ait une croissance économique qui lui permettent d'améliorer la distribution.
C'est pourquoi Gorriti signale que l'une des clés du prochain gouvernement sera la « réhabilitation du rôle social de l'État » : « Il me semble qu'il va faire un effort, surtout dans la formation d'un Etat de bien-être. » Et elle ajoute qu'une autre clé sera la stimulation des accords nationaux parmi lesquels certains seront plus facile à concrétiser, comme celui qui concerne la petite enfance, la création du ministère de la justice et la proposition de retirer l'institut national de réhabilitation du ministère de l'intérieur. « Si on y arrive, cela peut créer un précédent intéressant pour générer des accords dans d'autres domaines »
Il existe d'autres problèmes, a dit Gorirti, dans lesquels il sera plus difficile de générer des accords inter départies comme l'éducation : « S'il obtient d'autres accords, il peut commencer à discuter d'autres sujets comme l'éducation, mais en ce qui concerne le type d'acteurs et le système politique, même à l'intérieur du Front Large, je ne sais pas s’il pourra générer des accords nationaux. »
Les relations avec les ministres et les éventuelles tensions internes
Aussi bien Zeballos que Gorriti ont déclaré que le Gouvernement actuel a eu un fonctionnement « radial », par conséquent, le président, Luis Lacalle Pou a eu des relations « un par un » avec ses ministres et n'a pas généré d'environnement collectif de négociations dans le cabinet. Les analystes disent que le profil d’Orci fait penser à un retour de la mise en place des conseils des ministres périodiques.
« Lorsqu'il était au pouvoir, c'était son outil pour la conception, la mise en œuvre et l'exécution des politiques. Bien qu'il ait le soutien des législateurs, la voie de négociation interne est le Conseil des ministres. Ce sera très différent de l'exercice du pouvoir par Lacalle Pou », a déclaré Zeballos.
« J'imagine une dynamique collégiale, avec beaucoup de guillemets. Il est tout à fait possible que les Conseils des ministres reprennent. Orsi a mis l'accent sur le travail d'équipe, la collaboration institutionnelle. Il me semble qu'il peut faire avancer quelque chose de plus collaboratif », a déclaré Gorriti.
En ce qui concerne la formation du cabinet Cabinet, l'administration, des tensions entre le Gouvernement national et la force politique, Zeballos prévois que cela va être les tensions qui ont toujours existé » dans les gouvernements, mais elle note que dans ce cas, elles seront « traverser » par le dialogue sur la sécurité sociale. La poly signal aussi qu'il pourrait aussi y avoir des discussions pour la formation du pouvoir exécutif, une composition qui sera déterminée en partie par le vote de chaque secteur.
Pour Gorriti, le « principal foyer de tension » interne va être la gestion du ministre, de l'économie, Gabriel Oddone, qui, dès le premier jour, a provoqué des résistances à l'intérieur du parti : « Orsi a déjà annoncé qu'il ne ferait pas de changements drastiques (par rapport au précédent Gouvernement) et il peut exister une frustration dans les attentes comme au Parti Communiste d'Uruguay et au Parti Socialiste. Cela va être un foyer de conflit interne, le même pour la sécurité sociale et la réforme de l'éducation. » Et elle a ajouté : « S’il n'y a pas de changement notable dans ces domaines, il va y avoir des conflits internes. Concernant le problème de la sécurité et des prisons, si on continue à viser la punition et si on ne renforce pas le travail sur les causes, cela peut finir par être un autre foyer (de tension).
Précisément, la sécurité publique en tant que défi « imminent » pour le Gouvernement, implique de prendre des mesures immédiates : « le Gouvernement devra nommer l'équipe trois jours après le résultat, » a déclaré Zeballos.
Politique étrangère : aussi va donner plus d'importance au MERCOSUR
En ce qui concerne les relations internationales, la politologue Gorriti imagine un scénario dans lequel le président élu, aura un rôle de « médiateur » entre le président du Brésil, Lula, Da Silva, et celui de l’Argentine, Javier Milei.
« Même s'il ne recueille pas de voix, le lendemain de l'élection, c'est déjà une question importante. Avec [Donald] Trump à l'horizon, le MERCOSUR doit être modernisé. Il faut faire quelque chose pendant que Lula est ici », a déclaré Gorriti.
Pour la politologue, le MERCOSUR est « le principal problème dans ce domaine et l'accord avec l'Union européenne « résoudrait beaucoup de problèmes », s'ils se concrétisait : « Je pense que l'Uruguay, sous le gouvernement d'Orsi, va donner plus d’importance au MERCOSUR pour générer plus d'accords. Il me semble que l'accord avec la Chine n'est plus viable. De plus, il devra se placer comme médiateur entre Lula et Milei, il va devoir déployer ses talents de négociateur. »
Gorriti signale aussi que Orsi à une « perspective pro-mondialisation et organismes internationaux. » « Il va devoir découvrir comment gérer dans un monde où Trump sera de nouveau là, Trump qui pense « vous êtes avec moi ou sans moi » et je pense que l'Uruguay va essayer de ne pas s'aligner autant sur les États-Unis que Lacalle Pou. Il va chercher plus d’autonomie, éviter de s'aligner et chercher un équilibre. »
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