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International : La pyromanie de Macron laisse la France dans le chaos et sans Gouvernement

7 Décembre 2024, 15:20pm

Publié par Bolivar Infos

 

 

 

Traduction Françoise Lopez pour Amérique latine–Bolivar infos

 

Les motions de censure coïncident, en France, avec les crises du présidentialisme. Le seul précédent de ce qui s'est produit ce mercredi 4 décembre à l'Assemblée nationale avec la destitution du Gouvernement de Michel Barnier par le Parlement remonte à octobre 1962.

 

Alors, le gaulliste, Georges Pompidou avait perdu sa charge, face à la colère des oppositions (communistes, socialistes, etc…) à cause de l'intention de Charles de Gaulle de réformer la Constitution pour y intégrer l'élection du chef de l'État au suffrage universel. Ça a été l'un des moments les plus turbulents dans les années de fondation de la Ve République.

 

Alors, le président fondateur de ce régime politique a réagi habilement face à la réaction du Parlement. Il a convoqué des élections anticipées lors desquelles les forces gaullistes ont obtenu une claire victoire en novembre 1962. Quelques semaines auparavant, le 28 octobre, plus de 60 % des électeurs avaient voté lors d'un référendum en faveur de l'élection du chef de l'État au suffrage universel. Curieusement, le succès de la motion de censure contre Pompidou et par extension contre De Gaulle a fini par être une victoire pour les gaullistes.. Avec cette crise, s'est forgé le modèle plus vertical entre les démocraties de l'Europe occidentale. Cela a été un moment constituant.

 

62 ans plus tard, l'Assemblée nationale a rétabli mercredi la guillotine symbolique de la motion de de destitution censure mais, cette fois, dans une logique de destitution. Ça a été une journée aussi prévisible -le sort en était jeté pour Barnier depuis lundi- qu’historique, en présence d'une multitude de journalistes dans la tribune de presse du Parlement et dans la salle des Quatre Colonnes. Les plus vieux racontaient qu'ils n'avaient jamais vu autant de monde depuis qu'en 2016, les échotiers du cœur avaient débarqué à la Chambre Basse pour couvrir un événement organisé par Pamela Anderson. Au milieu de cette foule de journalistes, de politiciens et d’assistants, on avait le sentiment que le grand protagoniste du jour, le président Emmanuel Macron, était un homme absent.

 

Une catastrophe

 

« Je pense honnêtement que cette situation, à la base, est due à Macron. Sa présidence a été une catastrophe aussi bien au niveau politique qu'économique. Et à cela s'ajoute l'erreur fondamentale de la dissolution de l'assemblée », le 9 juin dernier, explique à CTXT le politologue Christophe Bouillot, professeur à Sciences Po Grenoble. presque six mois, après ce tir dans le pied, Macron a convoqué des élections législatives anticipées  au moment de la plus grande faiblesse de son parti et en pleine ascension de l’extrême droite de Marine Le Pen- le président s’est heurté à la réalité.

 

La bonne campagne de la coalition unitaire de la gauche du Nouveau Front Populaire (NFP) et une mobilisation plus importante des jeunes et des habitants des banlieue ont évité, l'été dernier, la Victoire, que les sondages prévoyait pour le lepénisme. La fragile alliance progressiste est restée la première force dans un Parlement très fragmenté, mais depuis cette même soirée du 7 juillet, alors que des millions de Français respiraient avec soulagement et célébraient un possible Gouvernement progressiste, Macron s'est efforcé d'éviter l'alternance politique. il s'est opposé obstinément à la possibilité d'un Gouvernement en minorité du NFP. Il craignait surtout qu'il abroge son impopulaire réforme des retraites et augmente de manière significative le salaire minimum.

 

Le président a justifié ce claquement de porte au nez de la gauche par l'argument de la « stabilité des institutions. » il a défendu l'idée qu'un Gouvernement progressiste tomberait en quelques semaines ou en quelques mois à cause d'une motion de censure que voteraient l’extrême-droite, les macronistes et la droite traditionnelle des Républicains (LR). Mais cette excuse était un véritable prétexte et cela s'est reflété cette semaine.

 

Enfin, la chute prématurée que Macron prédisait au Gouvernement progressiste, c'est le Gouvernement conservateur, une coalition composée par les deux partis qui ont eu les pires résultats aux élections : la coalition présidentielles et LR, comme partenaire minoritaire, qui l'a subie. Et Barnier, 73 ans, ancien négociateur du Brexit, pour l'Union européenne, est devenu le premier ministre dont le mandat a été le plus court dans l'histoire de la Ve République : moins de trois mois. La motion de censure  de la gauche a reçu le soutien d'une majorité absolue des députés, parmi lesquels ceux d’extrême-droite.

 

L'impopularité de l’austérité

 

« Dans le fond, cette motion va entraîner votre Gouvernement dans sa chute parce que vous n'avez pas su vous débarrasser de la malédiction de celui qui est le vrai responsable de cette situation, Emmanuel Macron. Cette malédiction est due à un manque de légitimité », a déclaré dans l’hémicycle Éric Coquerel, le député chargé de défendre la motion de la France Insoumise. « Arrêtez de dire qu'après vous viendra le déluge. Le chaos est déjà là, politiquement, économiquement et socialement », a insisté ce proche collaborateur de Jean-Luc Mélenchon.

 

Barnier a en fait été victime du penchant obstiné du macronisme pour le néolibéralisme à la française et les politiques de réduction d'impôts pour les entreprises et les plus riches. Le premier ministre a pris possession de sa charge avec un héritage économique empoisonné : une croissance rachitique (à peine 1 % du PIB), un déficit public de plus de 6 % et une dette publique extravagante. À peine trois semaines après avoir nommé ses ministres, il a présenté une loi budgétaire avec les coupes les plus dures depuis 2017 : une réduction des dépenses publiques de quelques 40 000 000 000 d’euros. Cela lui a porté une estocade mortelle. Depuis lors, dans l'opinion publique, le souhait majoritaire d'une censure ne s’est pas arrêté.

 

De plus, le premier ministre a subi les pièges de ses soi-disant alliés, surtout les macronistes, qui ne lui ont pas pardonné de vouloir réduire les aides de l'État aux entreprises et l'ont obligé à faire une rectification en ce sens. Cela a ralentit ses négociations ratées avec l'opposition, en particulier avec l'extrême droite. « Le plus surprenant dans cet épilogue, c'est la surprise du premier ministre, » a rappelé pendant le débat avec une certaine malice Le Pen après ces derniers jours de conversations in extremis pendant lesquels la dirigeante d’extrême-droite s'est consacrée à se moquer de Barnier.

 

L'une des clés de cette crise se trouve dans l'évolution récente de la position de la dirigeante du RN. Pendant le débat d'une motion de censure précédente de la gauche, le 8 octobre, Le Pen avait promis qu'elle allait « exercer une opposition constructive. » Malgré son expérience politique (ministre, commissaire européen, etc…), Bernier a cru avec une naïveté surprenante que cette attitude pouvait durer jusqu'à l'été prochain quand de nouvelles élections pourraient être organisées.

 

Comment pouvait le prévoir, Le Pen a abandonné son déguisement d'agneau au moment où elle l’a considéré comme le plus opportun. Ce durcissement a coïncidé avec la demande du procureur de la disqualifier pendant cinq ans avec effet immédiat dans le procès concernant un réseau de faux assistants au Parlement européen, d’où l'extrême droite a détourné 4 000 000 d’euros. « en France, les procureurs dépendent hiérarchiquement du ministère de la justice et peut-être la dirigeante du RN s'attendait-elle à une demande de peine moins dure, », explique Bouillot. Avant une probable condamnation le 30 mars, « Le Pen pense que son intérêt est qu’il y ait des présidentielles anticipées, » ajoute-t-il.

 

Les pressions sur le président augmentent

 

« Pour sortir de l’impasse, nous demandons que Macron s'en aille, » a déclaré, après le succès de la censure, une Mathilde Panot, (porte-parole des insoumis à la chambre basse) euphorique. Depuis l'été dernier- alors, cela semblait quelque chose d’exagéré- la gauche, mélenchoniste demande la démission du chef de l'État et une anticipation des élections présidentielles de 2027 à 2025, comme seule issue à ce bourbier. Cette exigence a gagné des adeptes, même parmi certains représentant du centre (Charles de Courson) et de la droite républicaine (l'ancien ministre Jean-François Copé ou David Lisnard, le maire de Cannes).

 

« Je ne pense pas qu'il démissionne. Si il le faisait, ils serait considéré comme l'un des pires dirigeants de l'histoire du pays au niveau de Charles X, », affirme Bouillaud en évoquant le dernier Bourbon français, qui a illustré l'échec de la restauration au début du XIXe siècle. À la différence de l'Espagne, en France, le succès d'une motion de censure ne suppose pas l'investiture d'un Gouvernement alternatif formé par ceux qui la présentent. Le modèle présidentiel de la Ve République offre à Macron une large marge de manœuvre au moment de choisir le prochain premier ministre.

 

Les noms qui circulent le plus dans la presse comme candidats possibles à Matignon indiquent une option de continuité qui ne commette pas la même erreur que Barnier - qui a essayé de prendre ses distances avec certains des totems présidentiels tels que la politique de l'offre et les réductions d'impôts pour les entreprises. On parle de l'éternel centriste François Bayrou, des conservateurs François Baroin ou Jean-Louis Borloo, du ministre de l'intérieur Bruno Retailleau, qui incarne une droite plus dure que celle de Barnier, ou encore du ministre de la défense Sébastien Lecornu, très proche de Macron et soi-disant bien connecté à Le Pen, avec qui il a dîné en secret au printemps dernier.

 

Cote en baisse pour un virage à gauche

 

Les haut dignitaires de l'Élysée ont aussi apprécié l'option d'un Gouvernement technique - dans le plus style de Mario Draghi, en Italie- destiné à faire approuver le budget avec de dures coupes. François Villeroy, actuel président de la Banque de France, pourrait le diriger. « Le président doit nommer un premier ministre le plus rapidement possible en tenant compte du fait que bientôt nous affronterons la pression des marchés, » a dit un député macroniste dans les couloirs de l'assemblé à CTXT.

 

Dans une coalition présidentielle qui penche de plus en plus à droite, peu de ses représentants mentionnent la possibilité de nommer un premier ministre de centre-gauche. C'est que cette option pourrait servir à diviser le Front Populaire, composé des insoumis, des socialistes, des verts et des communistes. « Il ne le fera pas. Le problème de Macron est que jamais il ne met en doute sa politique économique et sociale favorable au monde de la finance. Même un premier ministre de centre-gauche, ce serait trop pour lui, », soutient Coquerel.

 

Bien que l'actuel président soit présenté en 2017, comme un fan de De Gaulle et en régénérateur de la Ve République, on a du mal à imaginer qu'il ait la même capacité que le général à transformer ce revers parlementaire en point d'inflexion en sa faveur. Bien au contraire. Voir le talent inné dont a fait preuve Macron pour agir comme un pompier pyromane et conduire son pays dans une impasse dont on ne voit pas la sortie donne le vertige.

 

Source en espagnol :

http://www.cubadebate.cu/especiales/2024/12/06/la-piromania-de-macron-deja-a-francia-en-el-caos-y-sin-gobierno/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2024/12/international-la-pyromanie-de-macron-laisse-la-france-dans-le-chaos-et-sans-gouvernement.html