États-Unis : Lobbies et intérêt derrière Marco Rubio
Traduction Françoise, Lopez pour Amérique latine–Bolivar infos
En 2015, alors que Marco Rubio était encore sénateur et aspirait à la présidence, un auteur du blog de surveillance « Governing Under the Influence » l'a interrogé sur ses liens avec Geo Group, le deuxième plus grand exploitant de prisons à but lucratif aux États-Unis. Le républicain a répondu par une esquive: « Je n'investis pas dans l'ordre du jour des autres, ils investissent dans mon ordre du jour ». cette phrase est plus qu'une justification hautaine, elle révèle comment les véritables intérêts qui animent la politique étasunienne sont maquillés.
Pour atteindre la charge qu’il occupe aujourd'hui en tant que secrétaire d'État, sa capacité technique ou ses diplômes n'ont pas été le plus important : c'est le poids du grand lobby qui le soutient qui a réellement fait pencher la balance.
Les plus importants bailleurs de fonds
- Influence politique de tendance pro-Israël
Lorsque l'on analyse le portefeuille des bailleurs de fonds qui ont alimenté la carrière politique de Rubio, on constate que son plus gros contributeur est le « Pro-Israel America PAC ».
Ce comité d'action politique a été fondé en mars 2019 par Jeff Mendelssohn et Jonathan Missner qui ont tout deux des antécédents dans le puissant lobby pro-Israël American Israel Public Affairs Committee (AIPAC). Sa mission est claire : soutenir les candidats qui mettent en place des politiques favorables à Tel-Aviv, quelque soit leur parti.
Dans la même sphère d'influence, nous trouvons la “Republican Jewish Coalition” (RJC), une organisation politique fondée en 1985 pour renforcer les liens entre la communauté juive–étasunienne et les dirigeants républicains. RJC a été un acteur clé dans la stratégie républicaine destinée à s’assurer la loyauté de l'électorat et le financement de ces secteurs.
Bien que le patronage direct de ces groupes puisse paraître modeste en comparaison, d'autres, dons –109 800 enregistrer dans Open Secrets– son impact ne se situe pas dans la quantité mais dans la stratégie.
Au lieu de soutenir directement les candidats lors des élections générales, ils ont opté pour une tactique chirurgicale : vaincre les candidats démocrates lors des primaires et les empêcher ainsi d’obtenir une victoire sûre dans les circonscriptions majoritairement démocrates.
Dans ce but, le Aipac a conçu deux PAC d'apparence, démocrate : le projet démocratie, unis est majorité démocratique pour Israël, qui, dans la pratique, fonctionnent comme de véritables machines à fric subventionnées par des milliardaires républicains, conçues pour s'assurer qu'aucun démocrate ne remette en cause leur influence au Congrès.
Ajouter à cela, l'argent est réparti dans différentes structures patronales et dans son réseau de donateurs figurent des noms importants comme Bernie Marcus, co-fundateurr de Home Depot et Paul Singer de Elliott Investment Management, qui ont tous deux une longue histoire de soutien à des causes conservatrices et républicaines.
2. Un quartier de Floride.
Un autre pilier financier de la carrière politique de Marco Rubio est « The Village », une communauté planifiée de retraités dans le centre de la Floride, qui héberge plus de 130 000 résidents et est devenu un bastion du conservatisme dur républicain.
Avec une contribution enregistrée de 78 405 $, The Village représente non seulement une source de financement mais aussi une base d'électeurs hautement mobilisés dans cet état du Sud.
Le pouvoir, qui est derrière à un an : Gary Morse, le multimillionnaire, qui a fondé le quartier et dont la fortune a fait de cette enclave l'une des principales sources de soutien républicain aux États-Unis.
Rubio est souvent présent à des évènements organisés par cette communauté, ce met en évidence le niveau d'engagement qu'il a avec ce secteur.
Des groupes pro-Israël aux communautés de retraités conservateurs, son ascension politique a été stimulée par des acteurs aux objectifs bien définis.
Son cas nous rappelle comment l'argent et les lobbies modèlent la politique des États-Unis dans laquelle les décisions répondent aux intérêts de ceux qui patronnent les carrières de ces hommes politiques.
3. L'exploitation des prisons.
Le lobby politique aux États-Unis est un facteur déterminant dans la prise de décisions et la formulation des politiques publiques.
Plusieurs industries sont devenus célèbres à cause des millions qu'elles dépensent pour influer sur les lois et obtenir que des candidats proches d'elles arrivent à occuper des charges publiques. Parmi elles se détachent les grandes compagnies pétrolières, les compagnies pharmaceutiques et le puissant lobby de l'industrie de l'armement, mais il existe une industrie qui, sans attirer beaucoup d'attention, a acquis une influence significative : les prisons privées.
Geo Group, une compagnie pénitentiaire, a contribué de façon significative à la carrière politique du républicain. En 2016, elle a apporté une somme considérable de presque 190 000 $ du moment où il était président de la chambre des représentants de Floride et que l'entreprise a obtenu un important contrat avec cet état, jusqu'à sa campagne présidentielle.
Le véritable bénéfice pour celui qui est actuellement secrétaire d’Etat et pour d'autres législateurs ne se situe pas uniquement dans les contributions à leur campagne mais dans les opportunités économiques et politiques qui surgissent par la suite.
En effet, les revenus que l'entreprise a obtenu en 2018 ont atteint environ 2 330 000 000 de $. Selon le Washington Post, Geo Group et Corrections Corporation of America, une autre compagnie du même secteur, ont dépensé presque 25 000 000 dans des activités de cabale depuis 1989.
En tant que fonctionnaire élu, Rubio a pris des décisions qui favorisent directement les prisons à but lucratif. Un exemple en est le contrat d'État de 110 000 000 de dollars que Geo Group a obtenu quand le Cubano-étasunien présidait la chambre des représentants de Floride.
« Dans un système où les bénéfices augmentent avec le nombre de personnes privées de liberté, la seule raison pour intriguer est qu'ils espèrent un retour financier, », prévient Paul Kruger, directeur exécutif du chapitre pour la Floride de “Citizens United for Rehabilitation of Errants”, une organisation qui lutte pour la réforme pénitentiaire.
Le secteur des prisons privées représente environ 3 milliards de dollars par an aux États-Unis. GEO Group, basé à Boca Raton, domine le secteur dans le sud-est du pays, et d'autres données indiquent que depuis 2009, il a ajouté 7 600 nouveaux lits de prison, soit une croissance de 10 %.
En élargissant la portée de l’entreprise liée à Rubio, on rencontre diverses plaintes et controverses. Parmi les faits les plus marquants, on peut citer :
- 2010 : Rubio et d'autres législateur républicains ont été signalé dans de nombreuses enquêtes d'État et enquête fédérale pour l'utilisation un du de cartes de crédit du parti républicain de Floride, évasion fiscale et assignation budgétaire indus. Un cas emblématique et l'assignation pour la construction de Blackwater River Correctional Facility, effectuer par Geo Group.
- 2017 : une plainte collective a été présentée contre Geo Group pour violation des lois fédérales contre l’esclavage: ce groupe obligerait des émigrés emprisonnés à travailler gratuitement ou pour seulement un dollar par jour.
- 2018 : il a voté contre la Loi First Step centrée sur la réforme pénitentiaire fédérale et l'amélioration des conditions de réhabilitation. Ce vote protège indirectement les intérêts des prisons privées.
- 2021 : un jury fédéral a condamné Geo Group à payer 17 300 000 de $ à des émigrés emprisonnés pour conditions de travail abusives dans son centre de détention à but lucratif à Washington.
Mais au-delà de ces affaires, l'influence de Geo Group a atteint son apogée sous la présidence de Donald Trump. Pendant son premier mandat, Trump a abrogé l'ordre exécutif de Joe Biden qui interdisait les contrats entre le département de la justice et les centres de détention privés.
Face à cela, Lauren-Brooke Eisen, directrice du programme de justice du Brenan Center for Justice, a expliqué que beaucoup de prisons fédérales affrontaient une détérioration de leurs infrastructures et n'avaient pas les fonds suffisant pour les réparer.
À cause de cela, une partie de la population pénitentiaire pourrait être déplacée dans des installations privées, une décision qui profite à des entreprises comme Geo Group car actuellement, près de la moitié des étrangers emprisonnés aux États-Unis se trouve dans des prisons privées. En novembre 2017, 71 % des émigrés arrêtés étaient confiné dans ces centres.
Traditionnellement, les prisons à but, lucratif logent des émigrés sans-papier condamnés pour des délits fédéraux, un groupe qui va augmenter avec les nouvelles politiques migratoires.
Il faut rappeler qu'en novembre novembre 2024, quand Trump a gagné les élections, Geo Group et CoreCivic ont exprimé ouvertement leur optimisme concernant le nouveau Gouvernement et ont prédit une augmentation du financement des contrats privés par le Gouvernement.
On s'attend à une augmentation dans des domaines comme la détention d’émigrés, les dispositifs de suivi électronique et le transport des détenus à l'intérieur et à l'extérieur des États-Unis.
La croissance de ces entreprises ne se limite pas au bureau des prisons. Leur plus importante source de revenus provient du service de l'immigration et du contrôle des douanes (ICE). En 2023, 43 % des revenus de Geo Group provenait des contrats avec l’ICE, ce qui souligne la relation étroite entre la politique migratoire des États-Unis et l'industrie des prisons privées.
D'autre part, la représentante Alexandria Ocasio-Cortez a dénoncé récemment le rôle du lobby des prisons dans l'approbation des lois anti-migrants. La loi Laken Riley, récemment promulguée, profitera directement aux prisons privées en augmentant les arrestations d'immigrés, a expliqué la congressiste.
« Nous assistons à une érosion fondamentale des droits civiques dans ce projet de loi. Si une personne est accusée d’un délit, si quelqu’un veut montrer du doigt et accuser quelqu’un de voler dans un magasin, cette personne sera arrêtée, envoyée dans un camp de détention privé et déportée sans avoir à comparaître devant un tribunal, sans un moment pour faire valoir le privilège d’être innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit prouvée », a déclaré Ocasio-Cortez.
Elle a également avertie que certains législateurs républicains reçoivent des incitations financières pour soutenir ce projet de loi étant donné la propagande intense de cette industrie à Washington.
L'ascension de Rubio n'est pas simplement le résultat de son habilité politique ou de sa rhétorique stridente, c'est un témoignage du pouvoir des lobbies dans la machinerie politique des États-Unis. Des intérêts pro-Israël aux prisons privées, l'actuel secrétaire a tissé un réseau de soutien financier qui ne soutient pas seulement sa carrière, mais dicte aussi son ordre du jour.
Il est l’incarnation du pragmatisme cynique à Washington : un homme dont le programme, comme il l’admet lui-même avec une arrogance presque poétique, ne se finance pas tout seul parce que les contributions de campagne sont la seule monnaie d’échange qui compte.
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