Argentine: L’économie de Milei, une fête pour l’évasion fiscale
Par Alfredo Zaiat
Traduction Françoise Lopez pour Amérique latine–Bolivar infos
Les dollars du FMI ne sont pas suffisants pour éloigner le risque d’une nouvelle dévaluation et du défaut de paiement de la dette. Alors, Caputo a imaginé une amnistie pour les dollars non déclarés.
Il n’a pas mis longtemps à trouver la réponse à la question posée par l’article publié dimanche dernier dans El Destape: « les dollars du FMI sont-ils suffisants? »
Il ne l’a pas dit directement parce que ce serait reconnaître l’échec de sa gestion. Il a simplement mis en évidence le fait qu’ils ne sont pas suffisants tout en montrant son désespoir pour augmenter la quantité de dollars. Il l’a fait en annonçant une amnistie imminente, pas un blanchiment, pour les dollars non déclarés.
La Banque Centrale ne peut augmenter ses réserves
Milei est au pouvoir depuis 17 mois et le gaspillage de dollars est impressionnant en si peu de temps. La Banque Centrale, sans compter le crédit du FMI qui, tôt ou tard s’évaporera, a des réserves internationales en termes négatifs de 5 000 000 000 à 12 000 000 000 de dollars, selon que les critères d’évaluation sont lâches ou stricts.
Le couple Milei-Caputo a claqué l’extraordinaire excédent commercial de l’année dernière, favorisé par la méga-dévaluation de 18 899 000 000 de dollars du 13 décembre 2023.
Il a également dilapidé quelques 23 000 000 000 de dollars dans le schéma du change différentiel selon lequel les exportateurs ont liquidé 80 % sur le marché officiel et 20 % sur la place du dollar comptant avec liquidation (ccl), dénommé dollar "blend".
Il a reçu un apport fabuleux de quelques 23 000 000 000 de dollars du blanchiment, des capitaux déposés dans des banques qui, en grande partie, ont été détournés vers le financement d’entreprises grâce à des obligations négociables pour quelques 10 000 000 000 de dollars. Ces devise sont été liquidées sur le marché du change officiel.
La chute vers l’abîme et le sauvetage du FMI
Bien qu’il jouisse de ce scénario financier de privilège, l’incohérence de base du plan économique de Milei a eu pour dénouement le sauvetage extraordinaire du Fonds Monétaire International. Le prêt total est de 20 000 000 000 de dollars sur lesquels 12 000 000 000 ont déjà été attribués.
Ce montant a été renforcé par 1 500 000 000 de dollars de la Banque Mondiale.
Milei a échoué avec le schéma de change d’origine et avec celui des bandes imposé par le Fonds et il ne peut encore montrer la seule chose qui importe: augmenter le stock de réserves disponibles la Banque Centrale.
Les dollars du FMI ne sont importants que pour gagner du temps mais l’horloge de la crise du change, c’est à dire le danger d’une brusque dévaluation, ne s’est pas arrêtée. Celle du défaut de paiement de la dette non plus.
Comme la possibilité d’accéder au marché de crédit international volontaire, pour l’instant, ne se profile pas à l’horizon, le désespoir pour les dollars devient présent. Dans le meilleur des cas, le Gouvernement pourrait obtenir des dollars par cette voie l’année prochaine.
Les efforts des libéraux et des libertaires pour briser le carrousel
Comme on l’a dit, les dollars du FMI n’étant pas suffisants pour éloigner le risque d’une nouvelle dévaluation et du défaut de paiement de la dette, Caputo a imaginé une amnistie pour les dollars non déclarés.
Il affirme qu’il ne faudra pas enregistrer le revenu ni déclarer au fisc les dollars reçus. Si après le blanchiment réussi de 2024, Milei doit en organiser un autre encore plus souple, la conclusion est que quelque chose ne va pas dans les comptes du Gouvernement.
Cela peut-être par fondamentalisme idéologique, par entêtement pour montrer qu’il fait mieux que tous les autres économistes ou par simple ignorance de la façon dont fonctionne l’économie argentine mais ce qui est sûr, c’est que Milei a des problèmes quand il refuse d’accumuler des réserves internationales à la Banque Centrale.
Ces trois raisons pour essayer d’expliquer l’action de l’équipe économique pour briser le carrousel ont été exposées dans des déclarations du directeur de la Banque Centrale, Federico Furiase. Mardi, lors d’un événement organisé par le groupe financier Adcap, il a affirmé: « On n’a pas besoin d’aller sur le marché » pour payer les échéances de la dette en juillet parce qu’ils le sont déjà en grande partie. En juillet, 4 500 000 000 de dollars arrivent à échéance pour les détenteurs de bons.
Furiase a signalé que la Banque Centrale achètera des réserves lorsque le dollar touchera le plancher de la fourchette à 1000 pesos, et que « l'accumulation des réserves se fera au niveau du plancher de la fourchette ».
Deux blanchiments en moins de 12 mois
Il n’y a pas de précédant international à deux blanchiments de capitaux en moins de 12 mois. L’Argentine occupait déjà une place de choix dans le classement des blanchiments parce que chaque Gouvernement a eu le sien mais aucun, jusqu’à présent, n’en avait lancé plus d’un pendant sa période de gestion.
L’Argentine de Milei est une terre prospère pour le blanchiment d’argent des organisations délictueuses (trafic de personnes, trafic de drogues, commerce illégal des armes, entre autres) créées par le Gouvernement lui-même.
La version officielle concernant l’amnistie pour les dollars est qu’elle est destinée à stimuler l’achat de biens avec ces fonds non déclarés sans qu’il y ait de sanction pour ne pas avoir payé d’imposte sur ces revenus qui ont été destinés à l’achat de dollars. Comme c’étaient des revenus non enregistrés, les dollars n’ont pas non plus été déclarés.
L’amnistie de de Milei-Caputo pour les dollars est une sorte de blanchiment caché car il donne son aval à l’achat de biens et même d’actions et de titres public s sans que les contrôles de l’ARCA (ex AFIP) n’interfèrent. Le maximum serait de 100 000 dollars bien que l’équipe économique ne l’ait pas encore confirmé. C’est le même montant plafond qui avait été autorisé dans le blanchiment de l’année dernière, sans payer d’impôts ni avoir de pénalités. Ma intentant, Caputo cherche à assouplir les restrictions réglementaires sans envoyer un projet de loi au Congrès.
De l’eau jusqu’au cou
Le modèle économique de mIlei n’est pas destiné à accumuler des dollars à la Banque Centrale. Les dollars du FMI ne sont pas suffisants pour alléger les pressions sur le change ou l’incertitude concernant le paiement des échéances de paiement du capital ou des intérêts de la dette. La hausse du niveau d’activité de ces pois-ci est à peine un rebond statistique après k’effondrement de l’année dernière. Le taux d’inflation mensuel reste élevé bien qu’en-dessous de celui de la dernière année du Gouvernement d’Alberto Fernández. Le revenu disponible de la majorité de la population est en moyenne de 10% en-dessous de celui de novembre 2023, avant le début de la politique d’ajustements de Milei.
Dans ce con texte économique et social difficile, Milei insiste pour maintenir le type de change plus près du plancher que du plafond de la bande pour qu’il agisse comme une ancre anti-inflation.
C’est une stratégie qui a pour but électoral d’arriver en octobre prochain avec un taux d’inflation de 1% par mois et un marché du change stable. Il cherche aussi à stimuler la consommation des ménages avec l’amnistie pour les dollars.
Il y a là un facteur que Milei minimise : les mesures désespérées, comme le jubilé du dollar, ou les sauvetages financiers extraordinaires comme celui effectué par le Fonds Monétaire International ne font qu'accroître la méfiance à l'égard de la solvabilité du programme économique, en ouvrant le jeu de la spéculation concernant le moment où il explosera.
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