Venezuela : La guerre de l’ombre derrière la prime de 50 000 000 contre Maduro
Favio Figueroa, Investig’Action,1er septembre 2025
Le jeudi 8 août 2025, la ministre de la Justice des États-Unis annonce une récompense allant jusqu’à 50 millions de dollars pour toute information permettant « l’arrestation ou la condamnation » du président Nicolás Maduro. Motif officiel : « narcoterrorisme ». Un chiffre spectaculaire, un langage de western… mais surtout une manœuvre politique évidente : criminaliser un chef d’État en exercice, lui retirer toute légitimité internationale et préparer le terrain à ce que Washington appelle pudiquement des « opérations spéciales ».
Pour comprendre cette annonce, il faut remonter plus d’une décennie d’attaques contre le chavisme : des soupçons d’empoisonnement visant Hugo Chávez aux drones explosifs visant Maduro lors d’une cérémonie militaire en 2018, qui ont blessé sept militaires. Les enquêtes ont pointé des réseaux mêlant opposants réfugiés en Colombie, financiers à Miami et contractants liés à la société militaire privée américaine Silvercorp.
Les autres figures du chavisme dans le viseur:
Citons-en quelques unes :
- Diosdado Cabello, président de l’Assemblée nationale constituante, échappe à un empoisonnement en 2014 et à un plan d’assassinat en 2020.
- Jorge Rodríguez, vice-président, survit à un attentat à la voiture piégée en 2018.
- Tareck El Aissami, visé par un drone armé en 2017 et un tir de sniper en 2022.
- Cilia Flores, épouse de Maduro, échappe à un attentat en 2016.
- Vladimir Padrino López, ministre de la Défense, évite de justesse un empoisonnement en 2019 et un attentat en 2024.
Ces attaques suivent un schéma récurrent : recours à des mercenaires étrangers, implication de groupes paramilitaires colombiens et technologies sophistiquées (drones, cyberattaques, toxines).
Un précédent historique : Fidel Castro
Le Venezuela n’est pas un cas isolé. Fidel Castro a survécu à 634 tentatives d’assassinat recensées par La Havane : empoisonnements, attaques armées et opérations secrètes avec la mafia. Une illustration de la continuité d’une politique américaine où l’élimination physique des dirigeants peut être envisagée comme un outil diplomatique.
La guerre hybride derrière les gros titres
Les médias occidentaux reprennent souvent la version américaine, qui nie toute implication directe. Pourtant, Wikileaks, des enquêtes journalistiques et certains rapports de l’ONU confirment l’usage de mercenaires et d’actions clandestines contre le Venezuela. La prime de 50 millions contre Maduro apparaît moins comme une mesure judiciaire qu’un outil de décapitation politique, visant à affaiblir le chavisme pour des objectifs géopolitiques et économiques.
Pourquoi Washington veut éliminer Maduro
Tout d’abord, il faut rappeler que la plupart des guerres US des 30 dernières années avaient pour principal enjeu : le pétrole. Les USA sont enragés d’avoir perdu le contrôle des ressources énergétiques du Venezuela qui possède les plus grandes réserves prouvées de pétrole au monde, et reprochent au gouvernement bolivarien son indépendance vis-à-vis des compagnies pétrolières nord-américaines.
Le chavisme incarne un modèle de souveraineté économique, de redistribution et d’intégration régionale (ALBA, Petrocaribe) en opposition au néolibéralisme américain. Ce système opposé au néolibéralisme – souvent présenté comme la seule alternative économique viable – fonctionne et il produit un effet de contagion politique : la survie d’un gouvernement socialiste en Amérique latine, malgré sanctions et isolement, devient un exemple dangereux pour d’autres pays.
Caracas entretient aussi des relations étroites avec la Russie, la Chine et l’Iran, renforçant la rivalité géopolitique. Et enfin, le Venezuela défend la cause palestinienne, ce qui irrite Washington.
Pour toutes ces raisons, Nicolás Maduro est devenu l’homme à abattre.
Pour l’Internationale Antifasciste
Favio Figueroa