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Venezuela : L’ouragan Chavez a un an de plus et répand son vent sur le monde

31 Juillet 2023, 16:01pm

Publié par Bolivar Infos

 

 

Par Geraldina Colotti

 

On ne peut penser à Hugo Chavez, à l'occasion de son anniversaire, sans que notre voix tremble comme à trembler la voix de son « fils politiqsue ». Nicolas Maduro au bord des larmes, quand il a annoncé sa disparition physique, le 5 mars 2013. « Chavez n'est pas mort, il s'est multiplié, » a crié immédiatement la foule présente à la veillée funèbre en alimentant une queue de 17 km pendant 10 jours. Un message de rédemption pour les peuples de la planète, qui ravive les espoirs des plus humbles, en leur apprenant à ne pas oublier leurs origines.

 

Dans son émission « Allo président », une véritable école de formation et de communication, le commandant disait, en effet : «  si on pouvait revenir et demander où, je dirais à Dieu le père : envoyez-moi au même endroit. Dans la même petite maison de palmes, inoubliable, le même sol en terre battue, les mêmes murs en boue, un lit  en bois et un matelas de paille et de caoutchouc mousse. Et une grande cour pleine d'arbres fruitiers. Et une grand-mère pleine d'amour, une mère et un père pleins d'amour, et des frères, et un petit village de campagne au bord d'une rivière.

 

Pauvre mais heureux. Un message, non d’orgueil mais de lutte pour dire que ceux qui croient en un monde juste partagent toujours le peu qu'ils possèdent et non ce qu'ils ont en trop. C'est ce qu'enseigne Cuba. C'est ce qu'a enseigné Fidel avec qui Chavez s'est formé et qui l’a accompagné jusqu'à la fin et l'a pleuré.

 

Pauvre, oui, mais pas résigné, parce qu'il était conscient que ce sont les classes populaires qui produisent la richesse–dont elles ne peuvent jouir dans le système capitaliste basé sur les privilèges de quelques-uns- . Et qu'il faut changer les choses, même en sacrifiant sa vie.

 

Chavez a consacré sa vie à construire un Venezuela socialiste basé sur la démocratie participative et agissante. Son voyage a commencé au milieu du XXe siècle à Sabaneta, le 28 juillet 1954, un an après l'attaque de la caserne Moncada dirigée par Fidel Castro à Cuba, le 26 juillet 1953. Un mois après le coup d'Etat au Guatemala contre le président Jacobo  Arbenz, le 27 juin 1954. Presque un mois avant le début de la longue et sanglante dictature de Alfredo Stroessner au Paraguay, le 15 août 1954.

 

Le 24 août de la même année a lieu le coup d'Etat au Brésil, et Getulio Vargas au suicide. Quelques mois auparavant, le 7 mai 1954, l'armée française avait capitulé à Dien Bien Phu, en Indochine. Et quelques jours avant la naissance de Chavez, la première guerre d’Indochine s'était achevée par la victoire du  Vietnam —Viet Minh— un pays jusqu'alors colonisé par la France, et la proclamation de la naissance de la république démocratique du Vietnam, le 2 septembre 1945.

 

Quatre mois après la naissance de Chavez, le 1er novembre 1954, commençait la guerre d'Algérie. Et presque un an plus tard, entre le 18 avril et le 24 avril 1955, avait lieu la fameuse conférence de Bandung, Indonésie, qui a vu la naissance des concepts de « tiers-monde » et de « non-alignés.

 

La grande histoire, celle qui « acquittera », le ommandant, comme l'a expliqué Ignacio Ramonet dans son livre, « Ma première vie » dans lequel le journaliste espagnol évoque la naissance de « l'enfant pauvre de Sabaneta. » « Evidemment, », dit Chavez, « quand on naît, on est comme un veau ou un oiseau, inconscient. Mais plus tard, on a la possibilité de devenir ou non conscient. »

 

« Dans mon cas, explique-t-il, en prenant, comme ancre la célèbre phrase de Fidel « l'histoire m'acquittera »… « En pensant à l'histoire et à la vie, quand j'étais petit, si j'avais une conscience, j'aurais pu dire : « l'histoire m'acquittera. J'ai été emportée par l'ouragan de l'histoire », expliquait à nouveau Chavez en citant Bolivar et en emportant le lecteur   comme un ouragan avec son langage poétique et incisif.

 

L'ouragan Chavez a absorbé la grande histoire pour l'amener vers le présent, même après la chute de l'Union soviétique quand il semblait que le drapeau du socialisme devait être enterré pour toujours. Dans le concept de « socialisme du XXIe siècle », il a réuni dans la pratique et dans l'expérimentation du « laboratoire bolivarien », un ensemble d'idées novatrices soutenues par l'histoire du mouvement ouvrier international et renforcées par une conscience anti colonial renouvelée.

 

Dans les années pendant lesquelles proliférait la philosophie postmoderne qui réduisait l’objectivité à un conte et la vérité historique à une opinion, Chavez racontait l'histoire comme un conte mais dans lequel le narrateur était seulement une voix collective au service des intérêts généraux : ainsi, avec humour et poésie, il disait: « La révolution est amour et humour, » et il a reconstruit une nouvelle mythologie populaire dans laquelle s’identifier, loin des héros bourgeois et de la destruction de la mémoire historique qui s'étaient imposés.

 

Il a été un grand communicant et un grand pédagogue, un véhicule de symboles qui unissaient et animaient les masse avec lesquelles il se sentait profondément identifié dans une vision de l'avant-garde qui cherchait à conjuguer le Christ des origines, Bolivar, Che Guevara et même un peu Lénine : «Comme toujours, a-t-il dit, "il y a la masse du peuple, et je me jette sur la masse, je l'embrasse, je transpire avec elle, je pleure avec elle, et je m'y mets. Parce que le drame est là,  la douleur est là, et je veux ressentir cette douleur, parce que seule cette douleur, unie à l'amour qu'on ressent, nous donnera la force de lutter pendant mille ans s’il le faut. »

 

Très jeune, il a été un grand lecteur. Il a extrait de sa première encyclopédie une exhortation qui allait l'accompagner tout au long de sa vie, et qu'il a su transmettre à son peuple constamment : « Pense ! » Disaient ces pages. « Pense ! » disait toujours le Commandant, « ne reste pas là comme un arbre qui ne pense pas. La pensée est essentielle pour comprendre ce qu'on vit, pour ne pas passer par ce monde comme un nuage passager. »

 

C'est pourquoi, dans ses récits, la recherche de livres est la clé qui permet de débloquer le passé et de comprendre le présent : des livres qui remplissent les coffres des voitures laissées dans les montagnes par les guérilleros assassinés, ou des sacs à dos transmis de père en fils, de frère en frère. Pour expliquer l'importance d'Ezequiel Zamora, qui traversa Sabaneta en mai 1859 en criant : « Terre et hommes libres », Chávez parle de la découverte du livre, « L'époque de Ézéchiel Zamora », du révolutionnaire Federico Brito, Figueroa, dans le coffre d'une vieille Mercedes Benz abandonnée dans les montagnes de   La Marqueseña, une zone d'affrontements entre l'armée et la guérilla dans laquelle il y a encore beaucoup de fosses inconnues de révolutionnaires torturés, assassinés, tombés en se battant contre les démocraties déguisées de la IVe République.

 

Chávez, au milieu des années 1970, avait eu des contacts avec Drapeau rouge par l'intermédiaire de son frère Adán, souhaitant accepter l'invitation du Che à construire "un, deux, mille Viêt Nam", mais il a ensuite choisi de poursuivre son combat bolivarien au sein de l'armée, sans jamais devenir un oppresseur. Au contraire, il est devenu une référence pour les paysans indigènes pauvres, sans aucun droit qui l’ont soutenu de tout leur cœur aux élections de décembre 1998 et ensuite, lorsqu'il a lancé la Constitution Bolivarienne qui a accueilli leur demandes de libération.

 

Dans l'une des premières interview qu'il a accordées à José Vicente Rangel à sa sortie de la prison de  Yare, après la rébellion du 4 février 1992, il a raconté comment il  a caché pendant des années, le petit livre rouge de Mao. Un enseignement qu’il a renouvelé avec celui d'Ho Chi Minh et de « la guerre de tout le peuple » dans le statut du Parti Socialiste Uni du Venezuela (PSUV), fondé en 2007.

 

« Si l'un des deux, à un moment, pour n'importe quelle raison, tombe au bord du chemin, c'est le devoir de l'autre de prendre le sac à dos, de le porter sur ses épaules et de continuer à marcher. » Pendant les journées des funérailles, Adan, le grand frère qui avait guidé la route du Commandant, a raconté cet épisode, la lettre que lui a envoyée Hugo, et, ému, a affirmé : « Je l'ai pris, Hugo. Je marche ici avec ton sac à dos, putain, vive Chavez, merde! »

 

Chávez, le Marron, a apporté à ce siècle le courage de Pétion qui a remis à Bolivar l’épée libératrice d’Haïti en lui donnant les armes et le soutien dans sa lutte pour l’indépendance. Chávez, l’Indien rebelle, réveilla les gestes du cacique Guaicaipuro pour remplir d’histoire les coins les plus reculés du Venezuela. Chávez, le féministe, le 8 mars 2002, a organisé la cérémonie symbolique d’entrée de l’héroïne de l’indépendance Josefa Camejo, au Panthéon national.

 

Le 5 juillet 2010,199 ans, après la déclaration d'indépendance de 1811, sont entré au panthéon les restes symbolique de Manuelita Sáenz, une femme politique et militaire équatorienne, connue comme « la libératrice du libérateur. », Cinq cadettes ont charger le cercueil de « Manuelita », Hilan, remis au président Chaves et à son homologue équatorien de l'époque, Raphaël Correa.

 

Les deux présidents l’ont placé sur une étagère pleine de roses rouges où une plaque avec les noms de Chávez et Correa et la date du 5 juillet accompagne les vers de Pablo Neruda dédiés à Manuela Sáenz : « Et l’amant dans sa crypte tremblera comme une rivière. » Correa a souligné que Manuelita était « une activiste politique bien avant de rencontrer Bolivar et l’a été longtemps après sa mort. » Il a rappelé sa capacité à défier les conventions de l’époque, « vêtue en homme et chevauchant avec plus de dextérité que les hommes, rebelle et combattante. »

 

Et Chávez a déclaré : « Si nous appelons Bolivar « père de la patrie », toi, générale, nous t'appelons « mère de la patrie », « mère de la révolution. » Merci, Manuela, merci de revenir, nous te recevons dans cette époque du Bicentenaire dans laquelle nous avons repris notre chemin, en faisant la révolution dans notre Amerique : au Venezuela, en Équateur, en Bolivie… »

 

Une politique qui s'est poursuivie avec le président Nicolas Maduro, qui, accompagné du président de l'Assemblée nationale de l’époque,  Diosdado Cabello, en 2015, allait faire entrer au Panthéon les restes symboliques de la révolutionnaire indépendantistes Juana La Avanzadora, la première héroïne afro-descendante à être enterrée dans le temple des précurseurs.

 

Chávez, l'internationaliste, l’anti-impérialiste, capable de se faire entendre même par ces mouvements « altermondialistes » qui ne veulent rien avoir à voir avec le « pouvoir. » Son discours à Porto Alegre, en janvier 2003, a fait l'histoire en inaugurant la coutume de faire précéder les grandes rencontres officielles, par celles des mouvements, par les propositions élaborées pendant les luttes du continent. «Ici, on est en train de construire une alternative au modèle néolibéral et sauvage qui menace de détruire notre planète, »,a dit Chávez à Porto Alegre. « Si nous n’en finissons pas avec le néolibéralisme, le néolibéralisme en finira avec nous et avec l'avenir du monde. »

 

En réalité, ce que représentait le Commandant n'était pas un pouvoir militaire et autoritaire comme le prétendait la propagande médiatique, ni celui de la démocratie représentative bourgeoise mais le pouvoir populaire, celui de la démocratie, « participative et agissante » qui a débuté et a été envisagée par la Constitution bolivarienne. Une Constitution très en avance qui est encore donnée en exemple par les classes populaires qui, en Amérique latine, cherchent à saper les vieilles structures du pouvoir ou est présentée comme  un épouvantail par les classes dominantes qui craignent la parole du peuple.

 

Et c'est précisément l'appel au pouvoir originaire, le pouvoir du peuple, le recours à une Assemblée nationale constituante qui a permis au président Maduro de rétablir la paix dans le pays le 30 juillet 2017. Grâce à cette élection faite sous le signe de Chavez, la violence de l'oligarchie à la solde de Washington a pris fin : ces mêmes pantins qui avaient tenté d'éliminer le Commandant mais qui avaient échoué comme ils ont échoué avec l'ouvrier Maduro, désigné par Chavez comme son successeur. Et ils continueront à échouer à cause de la volonté du peuple qui a « multiplié » Chavez.

 

Un 26 juillet, en rappelant l'attaque de la caserne Moncada à Cuba et les paroles de Fidel  (« l'histoire m’acquittera »), Chavez, humble comme toujours, a dit:« Fidel Castro avait raison et l'histoire là déjà acquitté, mais moi, non ! Puisse cet humble soldat, cet humble paysan que je suis, être un jour acquitté par l'histoire, par les peuples, être digne de l'espoir et de l'amour d'un peuple. »

 

Les peuples ont déjà donné leur réponse. L'histoire de la révolution bolivarienne qui résiste depuis 25 ans l’a déjà donnée. C'est pourquoi rappeler Chavez n'est pas perpétrer le culte d'un homme, le « culte de la personnalité » que fuient les révolutionnaires mais célébrer, multiplier les traces que son action a laissée dans le monde. Chavez est présent. Chavez est le présent.

 

Traduction Françoise Lopez pour Bolivar infos

 

source en espagnol :

https://www.resumenlatinoamericano.org/2023/07/27/venezuela-el-huracan-chavez-cumple-un-ano-mas-y-lleva-su-viento-alrededor-del-mundo/

URL de cet article :

http://bolivarinfos.over-blog.com/2023/07/venezuela-l-ouragan-chavez-a-un-an-de-plus-et-repand-son-vent-sur-le-monde.html